L'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt

Le postulat de Passengers a cela de croustillant que, dans un décor de science-fiction fort à propos, le devenir de ses infortunés « éveillés » intriguait à n’en plus finir. Dans le même temps, la présence de Morten Tyldum (Imitation Game) laissait plutôt circonspect, au mieux songeur, la crainte d’un film de commande se faisant l’écho de la provenance du scénario de Jon Spaihts, alors en ballotage depuis quelques années.


Au final, le divertissement qu’incarne Passengers correspond peu ou prou à ces quelques prédictions, les enjeux passionnants de son intrigue se heurtant de fil en aiguille aux limites narratives et formelles du carcan hollywoodien. Au rayon des bons points donc, l’ironie cruelle que s’arroge le réveil anticipé de Jim Preston captive et interroge, un esprit profondément anti-manichéen instaurant ses quartiers au détour de ses tourments, de sa résilience destinée à succomber aux coups de butoir de la solitude.


Isolé au sein du décor luxueux de l’Avalon, les doutes et la lutte intérieure du bougre ont donc cela de touchant que nous ne pouvons que les partager et, subtilement, comprendre le passage à l’acte (sans pour autant l’approuver). Sitôt le couple installé, Passengers développe ensuite ses ramifications romancées mais pas que, un sous-texte sur les classes sociales et l’envergure toujours plus infinie du capitalisme/profit étoffant le fond de l’affaire.


Bien aidé par les performances correctes de la paire Pratt/Lawrence, le long-métrage semblait ainsi sur de bons rails, nonobstant la froideur immaculée et (paradoxalement) pauvre du vaisseau spatial, ou plus globalement la réalisation sans éclat de Tyldum (ce qui est fort regrettable vu le potentiel du bousin). Toutefois, son second acte cède à tant de poncifs et facilités que l’intrigue y perd tout suspense, le prévisible s’imposant à nous pour ne plus nous quitter : exception faite d’un « secret » révélé plutôt habilement (considérant que cela ne pouvait qu’advenir), les déboires sentimentaux, le danger grandissant et les coups de pouce patauds (chef de quart et bracelet) destinaient Passengers à un dénouement sans saveur.


De fait, outre un sensationnalisme exagéré, le triomphe de l’amour et des bons sentiments se veut aussi téléphoné qu’indésirable, dans le sens où le film avait les moyens de proposer autre chose... que cela soit inattendu, osé ou doux-amer, peu nous chaut. En dépit des grandes questions préalablement posées (l’existence et du sens de la vie, ou encore le pardon), Passengers préfère donc un piètre happy-end venant conclure un dernier acte marqué du sceau du rebondissement artificiel, où la mort-même y perd de sa substance. Dommage !

NiERONiMO
6
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le 8 mars 2022

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3 j'aime

NiERONiMO

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