J'ai compris que je ne devais pas comprendre.

Avec l'Orange Mécanique je pense enfin comprendre ce qui à la fois me fascine et me dérange tant chez Kubrick.

D'un côté, on a cette puissante maîtrise de l'image où chaque plan semble avoir été pensé pour marquer les esprits à l'indélébile, presque comme du pop-art cinématographique : parfois par le non-sens, parfois par la brutalité, souvent par un mélange des deux. Si cet art de la réalisation confine au génie jusqu'à en devenir un cas d'école majeur, il nous renvoie surtout à notre triste conditionnement par l'image. Et ça me déplait. Je n'aime pas être ce pantin face à l'image dans le seul but de me renvoyer à cette condition de pantin. (Je me comprends.)

De l'autre côté on a ce "fond" des films de Kubrick, ce pourquoi on en parle encore tant aujourd'hui. On peut prendre l'exemple flagrant de 2001 L'Odyssée de L'espace, où les théories explicatives s'élaborent encore alors que, selon toutes vraisemblances, Kubrick voulait nous exposer aux prémices de réflexions sur la condition humaine et la dépendance à la technologie sans jamais avoir l'intention de nous donner de l'eau au moulin. Il en est de même pour l'Orange Mécanique où Kubrick semble tant discréditer une justice punitive que curative : on nous fait vivre ces deux positionnements à leurs extrêmes et dans leurs dérives. A nouveau, on a le début d'un débat, comme si le prof de philo venait -avec grande éloquence- nous exposer un sujet royal sans nous donner ni sa vision des choses ni les pistes à explorer pour se forger une opinion. On reste là, impuissants, devant une situation qui ne semble pas appeler de réponses mais pose pourtant question.

Alors oui, le fond comme la forme de ses films sont cohérents dans ces aspects : ils interpellent et marquent. Mais ce non-positionnement de Kubrick me dérange profondément. Et quand je vois à quel point beaucoup arguent encore pour tenter de percer le "sens caché" de ses œuvres, je me dis que le bonhomme doit beaucoup en rire de là haut.

(Le nombre de "d'après moi" et de "je pense que Kubrick a voulu dire" que je peux lire dans les critiques environnantes me confortent dans mon analyse. Oui, je m'aime. Beaucoup. Bisou-bisou.)
LaClobiche
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le 8 avr. 2013

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