Nomis
5.2
Nomis

Film de David Raymond (2018)

Sur le papier, "Night Hunter" a pas mal d'ingrédients pouvant laisser penser à un petit thriller en forme de parfait plaisir coupable de fin de soirée.
Une bonne vieille enquête autour d'un kidnappeur/tueur en série dingo parvenant toujours à frapper même une fois derrière les barreaux, un Henry Cavill en flic/père dépressif avec barbe et cheveux gras fournis, un duo très intéressant de "vigilantes" (emmené par Ben Kingsley) s'en prenant aux prédateurs passés entre les mailles de la justice, les jolis yeux bleus d'Alexandra Daddario pour scruter l'âme des criminels et même Stanley Tucci ou Nathan Fillion venus faire d'inexplicables apparitions dans les rôles les plus insignifiants de leurs carrières respectives. Bref, avec un tel casting et cette variété de personnages pris dans une toile d'araignée policière où les morts s'entassent, on était parti pour au moins passer un bon moment avec ce long-métrage de David Raymond...


Peine perdue, il est quasiment impossible de se passionner pleinement pour ce qu'a à raconter "Night Hunter" tant son montage chaotique semble tout vouloir faire pour le transformer en catastrophe industrielle. C'est d'ailleurs particulièrement flagrant dans sa première demi-heure, le film ne fait que passer du coq à l'âne avec des scènes à la durée inexplicablement aléatoire et qui peinent à construire un véritable liant entre elles sinon les agissements encore lointains du tueur. Cela empiète bien entendu sur les développements des protagonistes et de l'enquête qui va en découler car, en plus, de ce découpage hasardeux, "Night Hunter" fixe ses séquences les plus longues sur les points les plus inintéressants de son histoire. Là où le personnage de Ben Kingsley et l'étrange binôme qu'il forme avec sa complice méritait vraiment d'être sous le feu des projecteurs, le film les survolera complètement pour se concentrer bien trop longuement sur la relation père/fille terriblement classique du héros. Bien sûr, on comprendra qu'il y avait là une volonté d'établir un parallèle entre ces deux figures paternelles aux méthodes drastiquement opposées (et de conceptions de la justice) mais la construction en miroir ne prendra jamais car ceux qu'elle met en scène ne sont pas du tout traités sur un même pied d'égalité (il faudra juste se contenter d'une séquence discussion/débat en mode "c'est moi qui ait la meilleure façon de rendre la justice et pas toi !" entre les deux et basta), le point de vue incarné par Ben Kingsley ne sera qu'effleurer et, sous prétexte de parti pris dans le sens du héros policier, son personnage gesticulera dans le vide en vivant par deux fois exactement la même situation en guise de punition. Quant aux autres intervenants, mis à part Brendan Fletcher dans un rôle pivot, ils en seront réduits au minimum syndical, à simplement donner un peu de chair à une enquête qui va avancer à grands coups de déductions magiques devant des informations et des vidéos bien pratiques mises sur la route des enquêteurs. Il y aura bien quelques petites percées qualitatives ici ou là (le coup du colis) mais la succession d'événements sera tellement mal agencée qu'il sera bien difficile de s'y impliquer, de même pour le sort réservé à certains seconds rôles vu que personne ne nous aura vraiment laissé le temps de nous y attacher.


Enfin, il y aura la surprise du chef en bout de course pour tout expliquer et démontrer que ce "Night Hunter" était en réalité plus malin qu'il n'y paraissait ! Seulement, vu sa teneur, on ne peut pas s'empêcher de se demander si elle est réellement bonne ou si elle tient de la facilité absolue (ce genre de rebondissement est toujours à double tranchant), d'autant plus que, encore une fois, le film ne parviendra pas à exploiter la nouvelle dynamique qu'elle engendre en la réduisant à ses issues les plus grossières lors d'une confrontation finale au ras des pâquerettes (on n'abordera même pas l'épilogue plan-plan de mauvais téléfilm).


Trop souvent à côté de la plaque et mal fichu, "Night Hunter" ne parvient donc pas à tirer parti des atouts dans son jeu (et il en a pourtant quelques-uns !) pour tenter d'être un tant soit peu mémorable. À part quelques rares bonnes trouvailles et un casting beaucoup trop grand pour lui, ce petit thriller que l'on imaginait bien sympathique, du moins pouvant faire le job le temps d'une soirée de disette, nous fait avoir une indigestion de ses trop nombreux défauts.

RedArrow
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le 30 août 2019

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RedArrow

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