Un soir d'été 2012, au bord d'un lac américain, quand l'humidité s'invite et pose comme un voile cotonneux rafraîchissant l'atmosphère, deux frères s'enfument un peu la tête en tétant un joli trois feuilles .
Quelques bières avaient déjà bien aidé à faire tomber la température.
Ethan regardait Joel se perdre dans ses pensées. Il fixait un point imaginaire, au loin, et faisait tourner le goulot de sa binouze, majorette de verre fumé qui dansait, en une ronde qui jamais ne s'arrêtait. Il aimait bien quand il faisait ça, ça donnait toujours lieu à des idées vertigineuses.

Là ça faisait un moment quand même. Il commençait à se sentir seul.
Alors, il appela.

« À quoi penses-tu frangin ? »

Il volait tellement loin qu'il ne l'entendait pas. Pas même un clignement d’œil ou un soupir. Silence radio.

« Dis, tu libères l'otage Khadafi ? »

Un voile sur les yeux du rêveur, signale que le voyageur astral reprenait possession de son enveloppe charnelle et un « ouais ouais ouais, tiens ! » confirmait qu'il était de retour.

« T'étais loin non ? »

« Ouais, carrément. J'pensais à la mort... »

« Houla cool ! »

« Non mais sérieux, on va mourir sans avoir fait un film qui nous ressemble vraiment ? »

« T'es con ou quoi ? On fait que ça ! On tournerait la Bible ou un film de boule, on nous reconnaîtrait ! »

Joel planta ses yeux dans ceux de ce frère qui décidément, quand il ne voulait pas comprendre, ne comprenait rien.

« Ethan ! Et un film avec des couilles ! Ça nous changerait pas un peu ? »

« Je vois, je vois...t'es défoncé ? »

« Pas plus que d'habitude. Écoute, on tourne au bédo depuis trop longtemps maintenant, il faut qu'on passe à autre chose ! On peut parler de loser, d'essayer de caresser le rêve américain, ce putain de cheval sauvage, en portant haut nos paires de roubignoles ! »

« Attends...mais t'es sérieusement sérieux là ? Tu me fais flipper, tu fais un bad trip... »

« Non, écoute-moi et imagine, un gang de culturistes. Ils sont trois. Un cerveau qui ne saurait même pas écrire « cerveau », un black qui fait de la gonflette parce qu'il a une mini-bistouquette et une montagne de muscles qui carbure à la coco et qui a trouvé Jésus. Des foireux qui montent un plan foireux, ça se passera à Miami ! J'ai tout là ! Tu me crois ? »

« Ouais ouais, je te suis... mais Turturro va jouer qui ? »

« Ta gueule. Les mecs enlèvent un juif pour le spolier, tout lui prendre mais le type est plus costaud qu'il en a l'air et ça dure des semaines. »

« Bah voilà, Turturro peut jouer le juif ! »

« Tu me fais chier ! Il ne va jouer personne ! Il faut qu'on ne nous reconnaisse pas ! Pense Wahlberg ! Pense The Rock ! Pense Ed Harris ! On va même prendre un pseudo. Bay. »

« Comme Michael Bay ? »

« Voilà ! On va faire ça : un Michael Bay. Mais ça sera nous ! Nous on le sait ! Un Coen avec des couilles et des nanas topless ! Enfin ! »

« Des nanas ? Des muscles ? De la coke ? Miami ? »

Ethan regarda le ciel tapissé d'étoiles. Et comme il en vit une filer sous ses yeux, se dit qu'après tout, ça se tentait.
DjeeVanCleef
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 8 mai 2014

Critique lue 783 fois

46 j'aime

6 commentaires

DjeeVanCleef

Écrit par

Critique lue 783 fois

46
6

D'autres avis sur No Pain No Gain

No Pain No Gain
Gand-Alf
6

Pumping Iron.

Vulgaire, beauf, clinquant, sexiste et parfaitement crétin, voici ce qui caractérise le cinéma de Michael Bay, archétype du bon gros ricain sûr de lui, le genre à rouler en 4x4 cheveux aux vents,...

le 7 sept. 2014

53 j'aime

3

No Pain No Gain
Truman-
7

Du Michael Bay sans Michael Bay ça donne No Pain No Gain

Michael Bay réalise ici un film qui sort bien de ses habitudes, en effet pas question de fusillades a gogo, d'explosions a tout va et de super cascades de fou saupoudré d'effet spéciaux hallucinant,...

le 12 août 2013

51 j'aime

3

No Pain No Gain
real_folk_blues
6

Bay Harbour Butchers

Bon alors, faites des photos, des captures d’écran, sauvegardez dans le cloud, entourez la date dans votre agenda, envoyez un mail à BFMTV ; j’ai mis la moyenne à un film de Michael Benjamin Bay, né...

le 3 sept. 2014

50 j'aime

20

Du même critique

Retour vers le futur
DjeeVanCleef
10

Là où on va, on n'a pas besoin de route !

J'adore "Retour vers le futur" et j'adore le couscous. C'est pas faute d'en avoir mangé, mais j'adore, ça me ramène à une autre époque, une époque où j'avais empruntée la VHS à Stéphane Renouf -...

le 22 mai 2013

204 j'aime

32

Les Fils de l'homme
DjeeVanCleef
10

L'évangile selon Thélonius.

2027, un monde où les enfants ne naissent plus, comme une malédiction du Tout-Puissant, un courroux divin. Un monde qui s'écroule sous les coups des intégrismes de tous poils, où seule, la Grande...

le 26 juil. 2013

194 j'aime

36

Rambo
DjeeVanCleef
9

La chasse.

Welcome to Hope. Ses lacs, ses montagnes et Will Teasle son Shérif. Plutôt facile de faire régner l'ordre par ici, serrer des pognes et éviter les embrouilles. Par exemple, escorter cet intrus, ce...

le 13 mai 2013

181 j'aime

46