Michael Bay est un réalisateur qui divise. On lui reproche régulièrement sa surdose d'action, son grand n'importe quoi visuel ou encore ses montages épileptiques. De manière générale, il synthétise un cinéma pop-corn bourrin et à première vue inoffensif, qui s'il ne manque jamais de péter les scores au box-office, s'attire pourtant à chaque fois une armada de réfractaires jugeant son œuvre générale beauf, puéril, ou tout simplement débile.

Le cinéaste derrière Armageddon et Pearl Harbor, ou plus récemment les purges que constituent la saga Transformers, semble avoir bien compris les critiques qui lui était adressés et sort en 2013 No Pain No Gain, un film d'apparence plus personnel censé remettre à plat la carrière de Bay. Le résultat est toujours aussi discutable, perdu entre des inspirations trop évidentes et un fond franchement douteux.

No Pain No Gain met donc en scène un trio de bodybuilders aux pieds cassés qui vont commettre un kidnapping afin d'eux aussi accéder au rêve américain tel qu'ils se l'imaginent. Une histoire classique en somme : celle d'une bande de losers se lançant dans une arnaque criminelle qui va forcément foirer et qui les amènera lentement mais sûrement à se faire coffrer, ou pire encore. Cette fameuse logique d'ascension puis de descente aux enfers si propre à la filmographie de Scrosese se retrouve donc transposée dans l'univers surexcité de Michael Bay, pour un ensemble globalement indigeste, parfois drôle mais souvent inutilement vulgaire. Certaines situations prêtent à sourire, les acteurs sont globalement funs et convaincants (Dwayne Johnson en tête), et le film ne manque pas d'idées visuelles, ses couleurs ultra saturés et ses plans en caméra embarquée donnant un certain style à l'ensemble.

Là où No Pain No Gain échoue, c'est dans son rythme qui ne prend jamais le temps de rien. Enchainant maladivement les séquences par son montage trop frénétique, le film donne la curieuse sensation de se retrouver face à un succession de clips à l'esthétique surchargée. Le tout se paie en plus le luxe d'être souvent vulgaire et tendancieux, et on se demande vraiment où les deux heures et dix minutes de métrage veulent nous emmener. Un malaise qui se transpose également dans les dialogues lourdingues du film, frôlant souvent un sexisme et une homophobie faussement camouflés sous le signe de l'humour et de la prétendue débilitée des personnages. Des personnages qui se veulent par ailleurs détestables malgré les constants et maladroits efforts du film pour les rendre sympathiques. Suivre une bande de mégalos qui tuent et torturent pour s'enrichir est une chose, mais s'en est une autre de vouloir les rendre sympathiques et rigolos quand bien même ils sont en train de commettre les pires atrocités. La chose est d'autant plus vraie que le film nous rappelle constamment qu'il s'agit d'une histoire vraie, et l'absurdité recherchée se confond finalement dans une débilité crasse qui va souvent chercher en dessous de la ceinture.

On ne sait pas où Michael Bay voulait en venir avec ce film censé traiter du rêve américain, mais ce qui s'annonçait être un sympathique film de gangsters bourré à la testostérone s'avère finalement être un curieux objet un peu indigeste, pas irregardable mais franchement douteux dans le fond, parfois marrant mais souvent énervant. Mais surtout, No Pain No Gain n'est pas aussi innocent qu'il en a l'air, loin d'être dangereux, il fait surtout preuve d'un mauvais goût général quand bien même il aurait pu s'avérer être une comédie noire des plus sympathiques. Preuve en est que le genre est difficile d'accès, est qu'il est plus facile de se complaire dans sa violence et sa vulgarité plutôt que de se confronter à elles-mêmes.

Bukowski-Bags
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le 14 févr. 2023

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