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Del Toro, figure iconique du cinéma des années 2000, a très vite su trouver un public réceptif à ses créations, tant dans ses blockbusters défouloirs et jouissifs comme Pacific Rim (2013) que dans ses créations fantastiques plus personnelles comme Le Labyrinthe de Pan (2006). Toujours est-il qu’il a su s’imposer comme un grand nom et ce, en une poignée de films mythiques, même si très peu auront récolté des avis positifs unanimes.


Le fantastique étant la veine de son cinéma depuis ses débuts avec le film Chronos en 1993, ce n’était qu’une question de temps pour le voir s’essayer à d’autres genres, chose qu’il avait tenté avec le genre de la science-fiction avec Pacific Rim. Son dernier film, La Forme de l’eau (2017), bien qu’explorant la relation amoureuse fantastique entre une femme muette et une créature semblable à celle du Lagon Noir, montrait déjà un renouveau du réalisateur. On pourrait même y voir une forme d’attendrissement envers un cinéma d’époque que Del Toro n’a pas vraiment connu, mais avec lequel il a rêvé et forgé sa culture.


Et c’est justement cette forme d’attendrissement, cet amour d’un temps passé, dont témoigne le réalisateur dans Nightmare Alley. En adaptant un roman de 1946 dépeignant la montée fulgurante vers le succès d’un homme au passé mystérieux dans une foire au freaks des années 40, cela permet au réalisateur de s’adonner à une reconstitution grâce à des décors de toute beauté, noyés dans des clairs-obscurs somptueux. Que ce soit en dévoilant la foire brillant au loin, en plein cœur d’un orage, ou tout simplement via des atmosphères intérieures Art déco, Del Toro pose une ambiance remarquable, qui oscille entre le cadre luxueux des demeures bourgeoises et la froideur des cages de freaks. Il renoue alors avec son credo instauré depuis le Labyrinthe de Pan, selon lequel les monstres sont parfois bien plus humains qu’on ne l’imagine.


Il narre avec un rythme posé, presque contemplatif par moments, la montée en puissance d’un homme dont on devine les intentions peu nobles, mais dont la chute est d’autant plus fascinante à observer. Cherchant à lutter contre le déterminisme, cet homme désire ardemment s’initier aux arts de la tromperie et du trucage pour monter LE spectacle du siècle. On jurerait presque que le resplendissant Bradley Cooper vient d’une décennie lointaine, tant le rôle lui va comme un gant. Willem Dafoe, Rooney Mara, Cate Blanchett, et même Ron Perlman… Tout autant d’acteurs et d’actrices talentueux interprétant à merveille leurs rôles respectifs.


Del Toro décortique donc les coulisses et travers d’une foire aux trucages et aux freaks, conservant les valeurs de ses précédentes créations. Nightmare Alley, au-delà d’une ode aux films noirs, ne serait-il pas un hommage aux tours de passe-passe qui font l’âme de ses films, et donc l’une de ses réalisations les plus personnelles ?

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le 26 janv. 2022

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