"Remember, use your zoom, steady hands."

*Nightcrawler* dans sa version d'origine, un film américain écrit et réalisé par Dan Gilroy. Il est le scénariste notamment de *Real Steel* de Shawn Levy ainsi que *Jason Bourne : L'héritage* de Tony Gilroy. Pour sa première réalisation, il est aidé par des producteurs réputés, puisqu'ils ont produit notamment *Drive* de Nicolas Winding Refn. Sorti le 26 novembre 2014 en France ; globalement les critique l'accueil dans les salles avec plaisir. Puis dans le box office, le film réussi à avoir un petit succès en salle dans le monde et donc remboursé ce qu'il avait coûté. 

Lou Bloom ( Jake Gyllenhaal, qui a joué dans Donnie Darko, Enemy... ) est un somnambule, l'inverse de Guillaume Canet dans Narco, il ne dort jamais le jour comme la nuit. Il gagne sa vie comme il peut. Un soir, encore après avoir raté l'obtention d'un job, il découvre sur sa route un accident de voiture, et rencontre des journalistes reporters. Il est tout de suite fasciné par eux. Et va travailler dans ce métier risqué. Mais Lou s'avère à avoir un don particulier de l'observation pour ce travail...
Il va être aidé par Rick ( Riz Ahmed, vu récemment dans The Night Of ), son partenaire et Nina Romina, la patronne ( Rene Russo ) de la chaine de télévision qui diffuse ses images de reporter.


Évidemment pour une première réalisation, Dan Gilroy utilise des influences cinématographiques comme modèle, pour trouver son "style" de réalisation et de rendre hommage. Ici, la première scène de rencontre entre Lou et Rick dans le restaurant, fait référence (in?)directement à *Drive* : les nombreux champs/contre champs, plans rapprochés épaules (voir gros plans), légère contre-plongée, tout ça rappelle l'esthétique des scènes de restaurant de Nicolas Winding Refn. Un autre exemple, la promotion française avait fait écho à la chanson B.O de *Drive* : Nightcall. Évidemment, elle a raté le sens du titre, juste pour sensibilisé l'attention des spectateurs ayant aimé le précèdent film. Et pourtant, malgré les similitudes : ce n'est pas *Drive*. Il est tout aussi réussi. 

La mise en scène reste quelques fois assez basique, des champs/contre champs, plan frontal, demi-ensemble, gros plans... Tout se répète un peu. Malgré ceci, le réalisateur trouve des idées de mise en scène. Au début, montage très fragmenté dans la maison de Lou pour montrer sa solitude, plans courts, très peu d'objets, de décors, c'est très peu animé. On sent une atmosphère d'une personne abandonnée, où sa maison est vide. Comme lui.
Le personnage incarné par Jake Gyllenhaal est un personnage calme, un anti-héros, même un homme sociopathe. L'acteur méconnaissable a perdu plusieurs kilos pour qu'on voit son corps de squelette et ses yeux globuleux, il nous donne, alors, l'image d'un fantôme rôdant dans la nuit. Ce métier l'avait en parti intéressé car personne ne remarquait les reporters filmant les scènes, comme s'ils étaient invisibles... Comme lui. Donc lors des scènes de reportage, il va partout et personne ne le voit, à part quand il s'approche trop des victimes ; la caméra de Dan Gilroy reste à l'écart et il le filme en porté pour montrer l'excitation de Lou face aux accidents. Il veut toujours aller au plus loin de l'action, prendre les meilleurs images. Il est doué pour ne pas se poser de limite, il veut qu'on grave son nom dans l'histoire, celui de l'homme qui a fait le meilleur reportage sur un meurtre, ou autre.
Il fera tout pour arriver à avoir ce qu'il veut, voir même faire une mise en scène lors d'un après-braquage, changé de place quelques photos sur un frigo, faire un plan sur ceci et faire un panoramique sur les victimes qui sont dehors. Transition en montage cut, on voit les images qui sont diffusés à la télévision, résultat : la patronne de la chaine adore et l'adore. Lou modifie un peu la vérité juste pour créer des émotions aux spectateurs qui verront le reportage. C'est l'envers du décor de journaliste, le réalisateur l'analyse avec Lou et nous fait découvrir un autre monde. Il ment aussi lorsqu'il fait croire aux policiers qu'il n'a pas vu les criminels après une scène de crime, alors que si. Il les avaient même filmés. Il ment juste pour avoir le reportage de sa vie. Il se moque de la vie des gens, car il ne les aiment pas, comme il le dit si bien à Rick lors d'un dialogue en longue focale et en champ contre champ. Tout ce qui l'importe c'est son métier et sa voiture rouge, qu'il ne quitte pas... ( Drive ? Décidément. ) Nous avons du mal à s'identifier à ce personnage froid à soi-même, plutôt glaçant avec autrui. Nous sommes plutôt Rick, le personnage qui pense qu'un métier se résume avec un salaire, où on est celui qui perds tout ses moyens dès la moindre scène d'action, de poursuite...


Une scène résume bien ceci. Aussi, elle rappelle une scène dans Taxi Driver de Martin Scorsese, lorsque dans son taxi Robert De Niro observe la femme, qu'il a comme coup de coeur, devant l'endroit où elle travaille. C'est une sorte de proie pour lui, il essaye de trouver un moyen de s'approcher d'elle. Ici, dans Nightcrawler, Lou attends que ses proies ( les deux criminels ) agissent pour essayer de s'approcher d'eux avec sa caméra.
Lou et son partenaire ont appelés la police, mais avant, ils avaient attendus que les deux criminels s'arrêtent à un endroit public. Lou demande à Rick de sortir et filmé la future scène de confrontation entre les policiers et les tueurs. Lou lance un petit sourire dès que Rick est sorti de la voiture, il reste pendant que son partenaire risque de mourir, l'adrénaline monte et le montage est rapide. Raccord regard de Lou, au début il reste loin de Rick, puis plan rapproché épaule sur Rick au loin dans la voiture rouge. Focale sur le zoom de la caméra de Lou et non sur le personnage, il est flou. La caméra de celui-ci filme l'action dans le restaurant, on pourrait la voir de plus près, mais on reste dans le point de vue de Lou. Utilisation de focale longue, le stresse augmente. Du côté de Rick, une caméra épaule, il n'est pas du tout confiant, le réalisateur filme aussi le zoom de sa caméra, mais elle est moins stable. Il ressent de la peur par rapport à son patron. Les plans fixes sur Lou font contraste avec ceux de la caméra épaule de Rick. Gros plans sur les deux. Deux plans sur le cadre de zoom de leurs caméras, raccord mouvement de gauche à droite de la caméra de Lou et inversement de celle à Rick. Les caméras se coordonnent, on voit la scène des deux criminels dans leurs zooms, au loin ils sont flous. Une musique extra-diégitique s'installe depuis le début de la scène. On suit l'action a distance, nous sommes les deux journalistes, on est témoin, il y a une utilisation de la caméra témoin, on est spectateur de l'action extérieur qui se déroule, on se concentre sur nos deux journalistes. Ensuite le réalisateur fait un insert sur le cadre de la caméra de Lou, pour qu'on suive l'action. Les policiers rentrent, les criminels les voient. Lou reste calme, malgré l'action dangereuse qui se déroule devant ses yeux globuleux. La fin de cette séquence ouvrera sur le climax du film. Cette séquence montre la relation entre les deux journalistes, ce ne sont pas des amis mais des partenaires. Puis le réalisateur montre la face cachée du métier de journaliste, qui est assez obscure, car ils n'interviennent à aucune seconde.
Les personnages secondaires sont omniprésents et sont aussi travaillé que Lou, mais ils restent à côté. Car il ne veut pas se faire voler la "vedette", c'est lui qui tient les ficelles. La patronne de la chaine de télévision à la même ambition que Lou : montrer le meilleur. Mieux que les autres chaînes, plus de sang,... On est constamment dans les coulisses du journalisme, qui est montré comme horrible. Eux aussi mentent. La musique est plutôt discrète, et reste souvent en dehors de l'action, il y a un travail sur le son ambiant, où on entend juste le moteur de la voiture, celui-ci couvre les autres sons. Ensuite, le montage suit les personnages dans leurs péripéties, mais comme le scénario, il reste assez classique. Puisque le montage est fragmentés, il montre les ellipses grâce aux plans d'ensembles sur le paysage qui montre la nuit ou le jour, etc. Et le scénario est celui d'un homme lambda qui trouve une voie/une quête et va avoir plusieurs péripéties pour arriver à ses fins. Même si c'est basique, il reste très plaisant à voir, ça rajoute un atout au film qui est un bon film. Pour finir, la lumière faite par le chef opérateur ( Robert Elswit ) a su comment faire pour que la lumière semble artificiel, faux de A à Z. Comme si on était toujours dans les coulisses du journalisme, celui du truqué. Même le monde est faux. Puis il a su aussi comment éclairer avec des lumières qui semble venir de la ville, de la route... Qui créer une sensation de monde qui vit même durant la nuit, où personne ne dort, comme Lou, et il a su sublimé la voiture grâce aux lumières. La voiture ne passe jamais inaperçu quand elle roule cependant elle reste cachée lors des moments de scène de reportage.


Les producteurs ont pris le risque de produire ce film avec un réalisateur qui n'était jamais passé derrière la caméra, l'acteur semble s'être vraiment investi à fond dans le rôle, il l'a même produit le film ; il fait prendre vie le personnage de Lou. Grâce aussi à la mise en scène, où tout les plans avec lui sont stables, fluides, et fixe. On sort de ce film avec une sensation très plaisante, on voudrait bien le revoir par la suite pour mieux (re)découvrir le film dans son ensemble. Certaines scènes/plans du film restera (sûrement ?) gravé dans l'histoire du cinéma, telle que la scène de la poursuite vers la fin du film. En tout cas, l'histoire et les personnages nous envoient dans leurs univers lors de la diffusion de l'œuvre. 
ElevenPlayer11
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le 17 août 2017

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