De la neige qui tombe. La manière dont les flocons descendent du ciel est tout à fait semblable au rythme de Morse, et il aura l'air d'un film apaisé, à l'atmosphère particulière, dont la lenteur marque de toute évidence le spectateur.

Morse parle de vampires, mais surtout de l'être humain. Procédé classique, Il s'empare d'un thème fantastique pour dresser un portrait de l'Homme ; une réplique d'Eli montre bien que son statut de vampire l'oblige à tuer, à faire le mal. Mais on ne peut pas lui en vouloir puisque c'est inscrit dans sa nature même. En revanche, on peut éprouver un peu plus de dégoût pour la violence humaine, éternelle et inexorable.

2009 avait commencé avec Morse, elle se finissait avec le Ruban Blanc. Les deux films partagent cette vision juste d'une humanité dont le besoin d'humilier l'autre, de le rabaisser, de lui faire du mal, est un besoin premier, une absolue nécessité. Morse est donc une oeuvre très lucide sur cette propension qu'a l'être humain à manifester sa méchanceté.

Morse est traversé par quelques fulgurances : fulgurances d'horreur, les attaques d'Eli. Elles sont les plus intéressantes dans la mesure où la soudaineté d'une attaque rompt avec le calme que la mise en scène avait brillamment installé.

C'est toute la perversité de la chose, cette manière de jouer l'innocence avant de révéler sa vraie nature. Et fulgurances visuelles, ces plans qui touchent le spectateur de par leur beauté qu'on n'attendait pas : le meilleur exemple en est sûrement le plan où l'infirmière sort de l'hôpital, légère contre-plongée, et à l'arrière Eli qui grimpe la façade. Le film est très touchant dans la relation qu'il installe entre les deux personnages

Leur rencontre est d'autant plus émouvante qu'elle est un commentaire supplémentaire sur le rejet permanent que subit Oskar . Et la fin est très belle - la séquence à la super-héros de la piscine - car elle lie définitivement les deux personnages dans le besoin que chacun a d'être avec l'autre.

Morse est à l'image de la neige qui tombe à l'écran : beau à observer, propice à installer du calme chez le spectateur. Mais s'en approcher, fouiller ce qu'il y a plus profondément, le toucher, provoquent une réaction épidermique. Avoir froid pour la neige, sentir un effroi pour Morse. Derrière la beauté et l'innocence apparentes de l'enfance se cachent perversité et cruauté.

Créée

le 6 juin 2012

Modifiée

le 7 août 2012

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Charlotte-Bad

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