Mon voisin Totoro
7.8
Mon voisin Totoro

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (1988)

J’ai souvent emmené mes enfants au cinéma, je les mets régulièrement devant un grand classique. C’est un moment important durant lequel je tente de leur ouvrir les yeux sur ce qui peut exister de chefs-d’œuvre, sur les mérites du noir et blanc, de la VO, sur la grandeur de Trou dans l’menton (Kirk Douglas) ou James Stewart


Ça prend, le papa n’est pas peu fier. Souvent, aussi, face aux daubes contemporaines, je tente de m’abstenir, je les laisse aimer tranquillement, même s’ils veulent fatalement savoir ce que j’en pense. J’en avais déjà parlé à propos de Tous en scène version 2017, les voir regarder un film est déjà en soi une séance.


Pour Totoro, c’est particulier. Parce que ce film, ils le connaissent par cœur, et que je ne l’avais jamais vu en entier. Des fragments, pleins, sur diverses séances, qui m’avaient de toute façon déjà convaincu, une mélodie, des envolées… Et les étoiles dans les yeux des enfants.


Ce sont donc eux qui m’ont fait voir un film.
Et c’était, bien entendu, une pure merveille.


Et c’est d’autant plus fabuleux de passer par le relais de leur regard pour ce film qui échappe à toute analyse. Totoro, c’est l’évidence même de la magie. C’est la beauté avec laquelle on crie pour conjurer la peur de lieux inconnus, c’est rendre attachante l’obscurité effrayante par l’invention des noiraudes, c’est le soleil et le vent, une rivière et des herbes hautes, des glands au sol et la frondaison des arbres qui frémit dans la brise.


Totoro, c’est la familiarité pour l’enfant qui contemple : oui, bien entendu, la magie existe, et les héros de mes livres me rendent visite pour me soutenir dans l’adversité ; mes rêves annoncent la réalité, les arbres sont démesurés et ma tristesse peut être endurée lorsqu’elle se mêle au vent.


Les adultes au contact des enfants n’ont rien à faire, si ce n’est s’attendrir et se souvenir d’avoir été, un jour, comme eux, les rois du monde.


Totoro, le film, est une déclaration d’évidence : la plus grande singularité du récit provient de son absence continue de surprise. Il suffit pour s’en convaincre de (re)voir (en boucle) les rencontres avec Totoro, la créature : en pleine sieste entre deux racines géantes d’un arbre, ou à l’attente d’un bus sous la pluie, il est simplement là. Et les deux sœurs, en sa compagnie. Pas de frayeur, pas d’appréhension, puisque de toute façon, on sait que pour conjurer la peur, on crie de joie.


Dès lors, la poésie peut surgir, et la magie s’épancher. Une goutte de pluie fait vibrer l’univers, la nuit se colore d’une mélodie soufflée au sommet des arbres, le bus est un chat aux yeux qui foudroient les bois obscurs, et la terre se fend pour faire surgir la vie.


Mei et Satsuki n’ont qu’un pouvoir, celui de savoir regarder la véritable beauté du monde.


Mes enfants s’en sont fait les relais, et m’ont convié à la danse.


Merci à eux.

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le 19 oct. 2017

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Sergent_Pepper

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