Ris, tout le monde rira avec toi. Pleure, tu seras seul à pleurer.

Mon Roi, le quatrième long métrage de Maïwenn a été l'une de mes plus grosse attente cinématographique de ces derniers mois. La bande-annonce avait quelque chose de saisissant, la musique lancinante et la photographie y étant pour beaucoup. C'est donc galvanisé par un élans d'émotions que je me rendis vers les salles obscures du Mk2 Bibliothèque, bien décidé à en avoir pour mon argent. Au final, après deux heures de projection, le bilan est plutôt positif quoiqu'un peu mitigé sur certains éléments.


Le film raconte l'histoire de deux êtres qui, irrémédiablement, vont se rencontrer et s'aimer. Nous avons Georgio (Vincent Cassel) d'un côté, restaurateur et séducteur de son état, Marie-Antoinette, dit Tony (Emmanuelle Bercot), de l'autre, une avocate un poil passe-partout. Leur histoire, s'étalant sur plusieurs années va être secouée d'orages, de combats, d'amour tendre, d'amour vache, de jeux de pouvoir... Parallèlement de leur couple naissant, nous suivrons une Tony plus âgée, accidentellement meurtrie suite à une blessure au genou. Je ne désire pas en dire plus à ce sujet, vous laissant le soin de le découvrir par vous-même.


Maintenant que nous savons de quoi le film parle, je tiens à souligner un élément de taille. On a beaucoup entendu parler de ce film, que ce soit dans la presse ou à la télévision, et à chaque fois, un élément revenait à la surface, élément que l'on matraquait honteusement en oubliant les aspects les plus marquants de l'oeuvre. Tout ce qui importait pour les médias était de réduire le personnage de Cassel au terme "Pervers-narcissique". Je sais que ce terme est très en vogue de nos jours mais il est de mon devoir de rappeler que cette classification n'existe pas et n'a jamais existé. Un "pervers-narcissique" ça n'existe pas ! On peut rencontrer des sujets pervers, d'autres narcissiques, d'autres avec des traits pervers ou narcissiques mais jamais ensemble, c'est une ineptie et une méconnaissance totale de la psychiatrie moderne. C'est honteux et stupide, je souhaite être clair sur le sujet. Autre chose : Vincent Cassel dans le film n'est ni pervers ni narcissique. C'est juste un homme avec ses problèmes à qui il arrive de souffrir, souffrance qu'il détourne en direction d'une illusion de contrôle de soi et de son monde. Georgio c'est vous et moi tout autant que Tony. Le film nous parle de gens qui se détruisent et qui souffrent à deux. Tu peux appeler cela "folie à deux" si tu veux te la péter mais "pervers-narcissique" c'est n'importe quoi.


Ce qu'induit de plus ce terme c'est de rejeter entièrement la faute et tous les problèmes sur le personnage masculin lorsque tout le film nous montre bien que le couple n'arrive pas à se comprendre. L'un se confronte à l'autre dans la douleur de l'incompréhension. C'est trop facile d'accuser une personne quand le climat et la tension fait qu'une situation est vouée à l’échec.


Tony, tout comme Georgio ont tout deux la personnalité distinctive du faux semblant. Lorsque les deux ne se connaissent pas encore, ils sont heureux, joueurs, ont les traits d'un couple. En franchissant le pas, on remarque que rien n'est normal dans leur histoire, si bien que l'on ne peut les penser en couple. Pour s'aimer, ça ils s'aiment, mais ils ne savent pas comment s'y prendre. Georgio, contrairement à ses airs très sûr de lui, est très maladroit sentimentalement parlant. En surface nous avons un homme extraordinaire, un homme capable d'attirer n'importe quelle femme. Un homme qui sait les choses avant que vous ne les lui dites, un homme qui fait constamment rire... Et c'est sur ce dernier point que je voudrai insister. Lui se situe dans ce schéma du rire à tout prix lorsqu'elle, tout comme le spectateur, est entraîné avec. Plutôt que d'être heureux, du moins de vouloir et réussir à l'être, on rit pour tromper les apparences parce que rire est beaucoup plus simple. Ce rire est le propos même de l'emprise que Georgio peut avoir sur Tony. Elle se laisse prendre, lui passe tout et l'aime malgré tout. On pourrait dire que, de ce fait, c'est de sa faute, qu'il est malsain etc. Ce serait encore une fois résumer trop simplement les relations humaines. On connait tous des histoires d'amour où l'un, si ce n'est les deux, tiennent l'autre dans son giron pour éviter le sentiment d'échec. On sait tous que par amour on se fait plus de mal que dans n'importe quel autre contexte. C'est la vie tout simplement.


Maintenant je vous conseille vivement Mon Roi. Il mérite d'être vu et parle, je pense, à beaucoup plus de monde qu'on ne pourrait le croire. L'histoire est prenante, les acteurs formidables. On a de l'émotion, du drame, de la comédie... Certaines scènes sont extraordinaires quand d'autres tirent sur la corde. C'est ça l'amour. Un amour à mort, certes, mais cela reste de l'amour.

Fosca
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le 24 oct. 2015

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