Voici donc le Prix du Jury du festival de Cannes 2014 : un Mommy acclamé pour sa prétendue virtuosité technique et ses innovations quadrilatérales, innovations laissant supposer un incroyable coup de génie de la part de Xavier Dolan... On est en droit d'y voir un certain talent chez le jeune filmeur, tout comme on peut trouver la démarche trop belle pour être vraie, et a fortiori pas réellement sincère.


Avec ses personnages péniblement hystériques, qui débitent avec un accent à couper au couteau un québécois de pur charretier et qui affichent des caractères plus naturels que nature Mommy confond, dans un festival cacophonique assommant, truculence et vulgarité. Avec un sens de l'excès frisant l'insolence et la posture émotionnelle Dolan braille et renverse les chaises au travers de son alter ego Antoine Olivier Pilon, cousin germain proprement insupportable dans ses frasques improvisées de fils hyperactif... Toute cette esbroufe cinématographique ne repose que sur de fausses émotions puisque Dolan empile à nouveau les poncifs qui faisaient la faiblesse de son catastrophique J'ai tué ma mère, même si sa technique s'est effectivement affinée. L'oeuvre, en plus d'être redondante, reste assez paresseuse quant à son développement, laissant l'impression que le jeune réalisateur s'appuie sur des insistances faciles et racoleuses. C'est lourd et antipathique.


Une scène toutefois, magnifique, suscite une certaine puissance sensitive : celle où Steve s'adonne à une séance de karaoké presque bouleversante et surprenante dans sa pudeur. Alors que le film restait jusqu'à présent assez détestable il devient ici étonnamment subtil, montrant le personnage dans toute sa vulnérabilité et ses écorchures. Le film par la suite se bonifiera sans pour autant éviter le pathos et les faux-semblants de dignité ( la fameuse mommy cherche effectivement à camoufler son malheur, mais de façon trop empruntée, trop tiquée ) s'achevant sur une ouverture laissant plus perplexe qu'autre chose...


Sans doutes l'un des films de Xavier Dolan les plus aboutis techniquement, mais profondément démonstratif voire prétentieux dans ses intentions, inspirant le sentiment désagréable que le jeune cinéaste ne peut s'empêcher de filmer la bouche pleine. Un cinquième long métrage provocateur, dans le mauvais sens du terme.

stebbins
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le 20 mai 2015

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