Particuliers, en effet : une petite fille qui dissimule une mâchoire féroce derrière ses boucles blondes, une jeune beauté aérienne que seules d'énormes chaussures orthopédiques retiennent au sol, des jumeaux emmaillotés des pieds à la tête, ou encore un petit génie dont le cerveau projette des films... A se demander si, il y a cinq ans, Ransom Riggs n'a pas écrit son best-seller de fantasy exprès pour qu'il soit adapté par Tim Burton. Toutes les obsessions du cinéaste figurent dans ce pensionnat délicieusement défraîchi, coincé dans une boucle temporelle : le regard des enfants, la différence, les mondes parallèles qui protègent...
Ces enfants sont menacés par des morts-vivants qui veulent... gober leurs yeux. Heureusement, la sage et autoritaire Miss Peregrine veille sur eux, et elle a la beauté gothique décidément sidérante d'Eva Green. Le réalisateur en fait la gardienne du temps et du temple, et lui offre la métamorphose la plus gracieuse vue depuis la scène finale des Noces funèbres, où la mariée se changeait en papillon. Mais la miss a bien besoin de l'aide d'un héros malgré lui : un adolescent persuadé d'être normal, malgré sa croyance dans les histoires folles que lui racontait son grand-père...
L’idée du film est séduisante, riche en possibilités, propice aux rêves… Et on s’y laisse prendre, sans grand mal. Burton n’a pas perdu de son talent de conteur cruel. Mais toutes les pistes ne sont pas exploitées avec le même don pour la féérie sombre, surtout dans la dernière demi-heure, sonnant davantage l’obligation de finir dans la précipitation. Le rythme s’accélère et le divertissement remplace le plaisir d’un récit vieilli qui s’installait peu à peu. Le film perd alors en mystère ce qu’il gagne en ressorts commerciaux pour mômes...
Un peu maladroit ces derniers temps ( Alice au pays des Merveilles en 2010 lui vaut des critiques peu enchantées malgré un certain succès dû aux prouesses d’une bonne 3D , Dark shadows est un bide considérable et Frankenweenie ne fera gère mieux et ne parlons pas de Big Eyes ), Tim Burton retrouve inspiration et poésie avec ce film destiné au même public. A travers le combat sans merci entre des monstres gentils et des créatures maléfiques, sur une île sauvage, dans un jardin en friche, ou autour d'un manège où il rendra le plus beau des hommages à Ray Harryhausen, grand maître des effets spéciaux à l'ancienne. Burton retrouve enfin le fil perdu de son inspiration !!!