Miss Peregrine et les enfants particuliers
Tout le monde l'attend au tournant, Tim Burton oscille gentiment entre génie du début, probablement aidé par une loufoquerie gothique nouvelle, et déceptions. Comme si en vieillissant on se laissait aller à moins de poésie, se laissant bercer par ses lauriers.
Miss Peregrine et les Enfants Particuliers commence maladroitement : l'introduction du héros mal dans sa peau reste très standard même si c'est un personnage typique de la filmographie du bonhomme. Avec pour point de départ un personnage lunaire que personnes ne prend au sérieux, la relation avec son père est extrêmement navrante, il m'est difficile d'entrer dans l'histoire. Le contexte est posé mais avec Tim Burton on est généralement prêt à entrer dans l'étrange sans besoins de prémisse fade.
Quand on rencontre Miss Peregrine et ses enfants, on est dans l'univers burtonnien sans aucun doute, un mélange entre le macabre poétique et la douce rêverie de Big Fish. Pourtant je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec les X-Men : une école cachée qui accueille des jeunes avec un gêne modifié leur procurant des pouvoirs effrayants pour le commun des mortels. Alors qu'on espère que le film ne se transformera pas en film de super-héros, on tente de comprendre les enjeux d'une boucle temporelle, glissée astucieusement pour baigner dans les années 40, chères à Tim Burton.
Le film s'enlise très vite, et si on ne peut en incomber l'entière faute au réalisateur, il est quand même responsable du chaos qui nous emporte dans un grand n'importe quoi sans queue ni tête.
Le scénario, au demeurant très fragile, est l'apanage d'un livre pour enfants, et si le conte laisse ouvert de nombreuses portes fantastiques, mon échelle de logique s'est vite pris les pieds dans le mince contexte qu'on nous donne. Au final beaucoup de pourquoi ? Avec pour seule réponse une avalanche de péripéties bordéliques.
Pour commencer, les grands méchants de l'histoire, très réussis visuellement mais sérieusement écourtés niveau historique, deviennent ridicule par la seule mise en scène de Tim Burton. La où Guillermo Del Toro nous effrayait avec son monstre, Burton ne veut quand à lui surtout pas apeurer le public. L'ambiance qui se dégage des scènes laisse le spectateur de marbre face à des monstres à la puissance terrifiante incroyable que seul Burton semble ignorer. Samuel L. Jackson devient lamentable et ridicule (il collectionne ce genre de rôle de méchant à côté de la plaque ces temps-ci). Le point d'orgue sera la scène de la fête foraine, nous laissant perplexe, entre retrouvailles avec la dérision de Mars Attacks et direction mal assurée pour une réalisation qui ne sait quel ton adopter.
J'ai d'ailleurs moyennement aimé cette mise au banc des humains dans cette scène, simples spectateurs effrayés quand Burton avait pris l'habitude de les inclure dans ces parades monstrueuses, donnant une fois de plus dans le cliché des super-héros à la rescousse. Car c'est bien là que réside le problème de Burton, il ne sait pas dans quelle direction aller, donnant à l'ensemble du film une cacophonie qui déstabilise plus qu'elle émerveille.
Entre des ficelles scénaristiques qui laissent beaucoup notre compréhension dans l'ombre, Burton s'arrange avec le scénario pour faire ce qui lui chante ; à l'image de ces boucles temporelles mal gérées, et une réalisation qui manque d'une clarté, voire d'une ligne directrice, le spectateur sort perplexe. Pourtant il y avait des idées visuelles très enrichissantes mais malheureusement sans âme. On retrouve donc une imagerie propre à Burton mais la poésie a déserté le navire pour mieux se calibrer sur une énergie très hollywoodienne qui consiste à suivre le courant d'une tendance, plutôt que d'oser le contre-courant. Tim Burton se fourvoie une fois de plus dans une mascarade qu'on aurait voulu plus osée, ou tout du moins cohérente.