Période Décès

J'en ai vu des dessins-animés à la gueule bizarre, mais des comme ça jamais ! Et même si le dessin est dégueulasse au premier abord, il prend vite son charme et se justifie en renforçant le côté fictionnel. Puis l'idée audacieuse de placer des photographies animées pour transparaître au mieux les sentiments des personnages est intéressante. L'expérience convainc et crée une identification partielle à cette étrange chimère.

Et pourtant, la première grande scène dans le restaurant est troublante de réalisme. Avec des prises de vues marginales et impressionnantes, Masaaki Yuasa nous mène au plus près de la violence, avec une séquence qui dispose de plus de tension qu'une armoire électrique. Le grand yakuza est inarrêtable, va commettre l'irréparable pour une véritable torture morale pour le spectateur. Une leçon d'animation à l'ambiance horrible et haletante dans un univers glauque.

Notre société actuelle, elle, est abondamment bercée par les nouvelles technologies. On change de chaîne pour voir tout et n'importe quoi. On se laisse immerger par du cinéma grand spectacle. On fait 'restart' pour redémarrer notre partie échouée sur Playstation. Nous faisons tout pour nous évader de notre petit monde pour un univers artificiel.

Certaines nuits, suite à un événement marquant quelconque, on s'est tous surpris à penser "Et si j'avais fait ça ?", on imagine de multiples scénarios qui seraient plus favorable que notre action débile, puis on se dit finalement "J'aurai dû faire ça.". Du coup on préfère rêver de notre action imaginaire, mais fictive, car ce n'est pas la réalité, et elle ne le sera jamais. C'est plus simple quand c'est faux. Tout ceci est représenté par Nishi, homme faible qui incarne nos doutes, nos failles, nos espoirs, mais surtout nos rêves impossibles. Suite à un coup de pied au cul, ou une balle, il aura l'opportunité de mettre en pratique nos utopies, en reprenant la vie par derrière, sans se poser de questions.

Il va reprendre le contrôle de sa vie moisie, se sentir plus vivant que jamais à travers sa mort plus ou moins fictive. Et c'est par le biais des technologies qui envahissent notre quotidien, qu'il va s'aspirer à une nouvelle vie. Il ne veut plus être le looser lambda, il kidnappe la belle, menace les bandits, et est prêt à les maraver durant une course-poursuite digne d'un Fast and Furious. Dorénavant c'est lui le héros à qui tout réussi, et il vit sa vie comme un fantasme surréaliste. Et ce côté surenchère est d'autant plus beau, captivant et émouvant, quand on sait que ceci est factice, et qu'il aurait dû être mort comme un tocard, et qu'il vit cette vie par procuration, une fois que c'est trop tard.

Dans cette ambiance psychédélique, que beaucoup ont tendance à résumer de "Mind Fuck", il règne des réflexions incroyables dans le fond de l'oeuvre. Le symbole de la baleine n'est pas anodin. Cela symbolise une deuxième confrontation avec son égo et ses peurs pour s'en sortir, comme une ultime renaissance. On peut voir que cela peut durer très longtemps, quand on voit la situation du grand-père, qui prend son temps pour recréer un monde extérieur artificiellement (Jeux Vidéos), alors que nos deux jeunes filles et Nishi ont vite compris qu'on pouvait, et surtout devait, se divertir avec d'autres moyens. Il n'y a quoi voir la mélancolique et magnifique scène de danse de Yan où elle mêle cet art, à la peinture et l'animation. Ou encore la scène où Nishi laisse libre court à son imagination littéraire en racontant une histoire métaphorique actuelle sur des hommes qui mangent de la merde et qui en sont contents.

Mind Game est un véritable hymne à la vie, une incitation à ne pas rester dans sa petite bulle pour profiter de cette éphémère existence comme il se doit.

On peut voir au tout début de cette grande oeuvre, un homme qui écrit un texto :"Your life is the result of your own decision". Une réplique percutante qui nous pousse à ne pas attendre une foutue balle dans le cul pour en prendre conscience, ou encore d'attendre trente fichues années comme ce vieux pervers, pouvant représenter cette 'nouvelle' génération de gens cloîtrés dans leur chambre, seuls et désespérés, accompagnés du fantasme d'une vie fictive entre mondes imaginaires et pornographie.

M'enfin c'est vrai que de temps en temps, un bon gros film de boule, bah c'est vachement cool.