AVERTISSEMENT : LES SPOILS SONT EN LIBRE SERVICE PARCE QUE JE NE PEUX PAS PARLER DU FILM SANS SPOILER UN MINIMUM !

Après Hérédité, Ari Aster nous propose un nouveau film classé « Horreur » mais plus psychologique, philosophique encore que le premier. Voici Midsommar. Encore une fois pour les films de Ari Aster, je vais le voir par le plus grand des hasards sans même avoir lu le synopsis ou vu la bande annonce.
Je m’attendais à un gros navet, très cul cul où j’allais rester extérieur au film, mais rien de tout ça. J’ai été surpris, très fasciné et bouleversé par ce long métrage. C’est avant tout une grandiose expérience cinématographique, il est d’une telle richesse que je n’ai pas pu repérer tous les détails intéressants.

Un contraste esthétique splendide de faire passer le grotesque, l’outrancier, le malade, l’abominable, l’horreur en choisissant de la verdure, de la blancheur et des fleurs. C’est un cauchemar paradisiaque qu’on nous montre. Dés la première scène où on entend le téléphone sonner sans le voir est une scène anodine pour le spectateur au premier abord mais en fait Ari Aster nous prépare psychologiquement à endurer quelque chose de lourd avec cette scène qui nous met mal à l’aise et qui nous perd.

L’horreur de la situation se dévoile progressivement en même temps qu’on découvre l’ampleur du piège dans lequel ils s’engouffrent. Comme dans Hérédité, le réalisateur place ses personnages comme des jouets au service d’un culte démoniaque. En effet, dès leurs arrivés dans le village, leur destin est déjà scellé et rien ne peut les sauver de ce cauchemar.

Tout le film tourne autour du deuil, drame traumatique de Dani d’avoir perdu ses parents et sa sœur. Ce deuil qui s’accompagne de crise de panique régulière qui paralyse notre héroïne. Le film cherche à nous montrer le besoin inavouable de renaissance et de destruction qui se cache en elle, et que cette secte suédoise lui offre de manière matérielle dans ce qu’elle comporte à la fois d’horreur et de jouissance. Détruire pour renaitre, mettre à mort pour revivre, exulter de joie pour conjurer la souffrance à travers ces rituels.

Le loto meurtrier, la robe de la reine la transformant en une grosse patate fleurie vient se confondre avec des rituels des plus macabre. Je ne savais tout simplement plus où me mettre tellement l’absurde était fort. La scène où les hurlements, la détresse et les pleurs de Dani sont mimés par la meute de jeunes filles l’accompagnant, agrippées à son corps comme si elles faisaient qu’un et que finalement toutes les peurs, les doutes, les tristesses, les joies, les rires devaient être partagés par tous dans le but de soulagés la personne en transmettant ses émotions a tous pour montrer qu’elle n’est pas seule. Fascinant et très énigmatique

Pendant le voyage, quand les personnages sont presque arrivés on assiste avec la scène sur la route a un retournement à 180 degrés de l’image comme si on entrait dans un autre monde tel Alice de l’autre côté du miroir, et ceci se confirme quand on remarque que de nombreuses scènes dans la secte sont filmées avec les rebords de l’écran très flou, grelotant comme dans un rêve. En soi, on pourrait se demander si Dani n’est pas entrée dans un rêve réel ou pas finalement, un rêve où elle pourrait s’écarter de sa souffrance du monde réel où entre crise de panique, morts de sa famille et consultation chez le psy, elle n’est pas bien dans sa peau et se créer « ce monde » où elle pourrait aller mieux, un monde où finalement elle se sent mieux, accepter et aider par les autres. Cette scène d’entrée de renversement de l’écran au moment de la banderole de la commune m’a fait penser à « Il était une fois l’Amérique » où le personnage principal entre dans un salon pour y fumer de l’opium et où on nous raconte ensuite sa jeunesse, son histoire et sa vieillesse pour ensuite retourner avec une dernière scène dans ce salon d’opium a la même époque comme s’il avait juste rêvé et que tout ceci n’était pas réel. Je pense que c’est exactement la même chose pour Dani après avoir commencé à prendre les différentes drogues. Cependant, il n’y a pas de retour a une scène passée, peut être qu’elle est bloquée dans ce rêve cauchemardesque a jamais.

Le plan visuel, le cadre vient confirmer ce rêve. Un endroit coupé du monde, lumineux, avec une mise en scène très esthétisante et ultra soignée et ses décors et costumes très recherchés dans cet univers très folklore scandinave. Tout ceci n’est pas seulement là pour montrer mais également pour conter, transmettre et vivre la culture, coutume.

Le film traite également les ruptures difficiles. En effet, la lente séparation entre Dani et son copain est entrepris dès le début du film avec les doutes du copain quand ses amis lui font part de ne pas rester avec Dani jusqu’à la fin du film où le copain va tromper Dani certes involontairement mais qui affecte Dani jusqu’à le choisir lui en offrande en passant par les oublies telles que l’anniversaire de Dani, le temps qu’ils sont en couple où le fait qu’ils ne sont plus proche physiquement.

Cette société sur fond de communisme absolu. On partage tout, nous sommes tout et à la fois un seul (partage des émotions). Chacun des membres de cette secte a un rôle attribué a la naissance, avec des coutumes et lois présente et présentées. L’image est saturée d’indices, de mise en garde avec les peintures murales, d’œuvres graphiques faites un peu partout. On a l’impression que les personnages viennent dans le storyboard du film. Et toutes ces images annoncent, expliquent ce qui va arriver ou ce qui est arrivé. On entre et on nous immerge dans une société nouvelle, inconnu auquel nous ne connaissons rien, on y entre avec nos protagonistes américains de la même manière que les européens sont entrés dans les coutumes et cultures des peuples amérindiens. Un beau parallèle.

C’est donc pour donner suite aux décès des membres de sa famille que Dani va se retrouver psychologiquement très fragile et va se laisser entrainer et endoctriner dans des situations a chaque fois de plus en plus étrange et emblématique. Son rapport avec la mort va être transformé et aura surtout un impact fort sur la réalité et aux gens qui l’entourent. La scène où Dani rencontre les amis de Christian pour préparer le voyage et après avoir discuté avec Pelle, on la voit faire une crise de panique et entrer dans les toilettes, mais elle se retrouve direct dans les WC de l’avion. Au-delà du fait que la scène est très belle, j’y ai vu l’entrée de Dani dans les rouages de la secte de Pelle, qu’il a commencé à l’harponné, l’endoctriné à rejoindre sa secte. J’ai pensé tout de suite aux gens qui nous harponnent dans la rue type Témoins de Jéhovah ou Evangéliques.

C’est un film écrit et réalisé sans doute de manière voulu par Ari Astier pour casser les codes du film d’horreur classique eco+ en choisissant l’omniprésence de la lumière, l’absence de réel grand méchant, les personnages ne sont pas pris de courage comme on a l’habitude de voir.
La bande son est bruyante parfois terrifiante et même festive. Un bon combo qui se mélange et qui est en accord avec cet ensemble très étrange et bouleversant sur le ton de l’incompréhension de notre cerveau et de nos sens.

Le film est plutôt lent, 2 h 40. On le voit principalement avec la scène à table où les personnages restent immobiles pendant de longues secondes à attendre que le chef s’assoie. Ari Aster ne cherchait pas l’efficacité quoiqu’il arrive. Il a préféré nous faire entrer dans son monde. Nombreux seront d’accord pour affirmer que les 30 premières minutes étaient peut-être en trop. Oui sans doute, mais si cette lenteur de départ n’était pas présente, aurions-nous eu ce final aussi intense ? Je ne sais pas. Le réalisateur parvient à filmer des horreurs et à nous les faire passer pour du divin. Cette violence et cette brutalité parvient à se transformer en quelques chose de beau. Bluffant.
Mention spéciale à la scène du vol plané du couple de vieux et de l’écrasage sur l’autel et où on doit finir le travail avec trois grands coups de marteau suédois sur la tête du vieillard. Particulièrement atroce.

En somme, Midsommar est un conte de fée horrifique, une quête et une histoire très prononcée sur la spiritualité et qui met en lumière les dérives sectaires. Nombreux ne seront pas réceptif à la compréhension du film, et je ne sais pas encore si j’ai assisté à un bon film déstabilisant ou à un véritable chef d’œuvre mais une chose est sure, nous tenons là un choc de l’année. Mon cerveau en est tout retourné et on ressort de la salle en chancelant comme si on venait de prendre une dose de drogue bien placé. Ari Aster est un génie dans sa façon de transmettre à l’état brut sa philosophie. Ce film est un OVNI, juste : Foncez le voir et vous comprendrez, personne ne peut vous le résumer autrement. Et j’avoue ne pas savoir comment noter ce film, une première. Mérite-t-il la moyenne, en dessous ou au-dessus ? Un navet ou un chef d’œuvre ? Je n’arrive pas à avoir la réponse.

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Piast_Fidra
8
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le 12 août 2019

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Piast_Fidra

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