Non, une excellente mise en scène ne suffit pas toujours à faire un bon film. Il faut aussi des personnages cohérents et un scénario qui tienne la route.
Ce film, dont j'attendais beaucoup est un très bon exemple du ratage qui peut se produire quand on néglige ces deux derniers points.


Commençons par le scénario :
Comme souvent dans les productions américaines ce n'est pas dans les grandes largeurs que ça pêche mais dans une forme de paresse ou de négligence concernant toutes sortes de petits détails. Un peu comme un roman qui n'aurait pas été relu avant parution et dans lequel apparaitraient des fautes orthographe ou de syntaxe.
Alors allons-y pour ces ratés du scénario :
Pourquoi les membres de la secte apprennent-ils par cœur des numéros de versets de la bible sensés être des codes secrets ? Si quelqu'un a compris le comment du pourquoi, je veux bien une explication.


Ces Américains sont décidément costauds : nos deux gars se prennent chacun une balle dans le buffet (dans le ventre pour l'un et dans le cou pour l'autre) mais cela ne les gêne en rien pour cavaler comme des lapins dix secondes plus tard. Hum.


Ils sont costauds mais quand même un peu couillons : ils savent qu'ils sont recherchés par toutes les polices du pays mais cela ne les empêche par de sortir sous les fenêtres de la gérante du motel où ils ont passé la nuit (gérante qui n'en demande pas tant), puis d'avoir un accident de voiture (!) et de flinguer un flic. Et enfin, lors des retrouvailles avec la mère, ils font causette gentiment sous les lampadaires du lotissement. Bref, de vrais pieds-nickelés. Problème : on n'est pas dans une comédie !


A la station-service, le gamin est recherché de partout et sujet à des crises d'angoisse redoutables. Que font nos deux compères ? Ils le laissent tout seul dans la camionnette pour passer un coup de fil (ma chérie on arrive...) et acheter dix paquets de chips. Que croyez-vous qu'il arrivât ? une chute de satellite ! Les Amerloques avalent vraiment n'importe quoi !


Le pays mobilise son armée entière pour capturer le môme et le mettre en lieu sûr dans les locaux du FBI mais ils le laissent s'enfuir tranquillou à la faveur d'une méga panne de courant. Hum qu'est ce qu'ils sont vraiment mauvais ces types du FBI.


Les gens semblent sidérés par ce qu'ils voient dans les yeux du gamin lorsqu'ils sont en prise directe avec lui (rayons bleus). Mais quoi au final ? Des tours à la Dubaï puissance 10 ? quel modèle ^^


A présent les personnages :


D'abord le gamin. Comment Alton arrive-t-il dans cette communauté d'allumés ? De deux choses l'une, soit il y était déjà lorsque son pouvoir s'est révélé mais dans ce cas, quelle coïncidence qu'un gosse-mutant vive précisément dans une secte ! Soit il y est arrivé du fait de ses pouvoirs mais dans ce cas, comment et pourquoi ? Cette absence d'explication qui se comprend au départ comme une ellipse voulue par le réalisateur (on reconstitue nous-même les faits passés) est finalement assez préjudiciable au film. Car enfin, il sort d'où ce jeune Alien ? D'autant que visiblement ses parents biologiques sont tout ce qu'il y a de plus humain. Alors d'où tient-il son identité extraterrestre ? Rien n'est dit à ce sujet. Débrouille-toi avec ça.


Le personnage de Lucas. Il est raté. Déjà, son investissement personnel dans cette histoire parait un peu démesuré. Après tout, ce n'est qu'un ami de lycée du père et rien n'indique qu'il lui soit redevable au point de se sacrifier pour lui. Son rôle dans l'histoire est bizarre : très viril et entreprenant dans sa prise en main de la situation au tout début, il s'illustre ensuite par une maladresse incroyable dans la scène de l'accident. ( Dis-moi, Lucas, t'es bien gentil mais à quoi ça sert de rouler tous feux éteints avec des lunettes spéciales pendant des centaines de klms si tu ne regardes pas la route pile-poil au moment où une bagnole s'est mise en travers de celle-ci ? Tu me diras, "c'est pas de chance" ou plutôt, "Ben,c'était écrit dans ce scénario" ...hum)


"Kylo Ren". Ce personnage du scientifique est sans surprise, presque stéréotypé, comme dans cette scène où il regarde fixement le tableau rempli de coordonnées, entoure en rouge les nombres 30 et 44, se rassoit et - Eureka - il a trouvé ! Pfffff il est sacrément plus intelligent que moi alors ^^


Les deux tueurs : inquiétants, déterminés, ils font du Javier Bardem dans No country for old man remontant le piste du gosse, le kidnappant (dans la scène complètement ratée du motel) mais se faisant cueillir (comment ?) par le FBI quelques instants plus tard. C'est ballot ! Question : à quoi servent ces deux personnages ?


Enfin le personnage de la mère,sans doute le plus inconsistant de tous. A tel point que Kirsten Dunst semble se demander ce qu'elle est venue faire dans cette galère. Il faut dire que son rôle se résume essentiellement à deux ou trois scènes d'atermoiement comme s'il fallait à tout prix que le spectateur éprouve de la compassion pour ces pauvres parents. J'ai de beaucoup préféré la Kirsten toute en retenue de Melancholia.


A noter que les dialogues de tous ces personnages sont d'une pauvreté affligeante.


Enfin, les cinq dernières minutes sont franchement de trop. Car de toute évidence si l'humanité assistait au spectacle hallucinant auquel elle semble avoir été confrontée, impossible de ne pas montrer le choc psychologique que cela représenterait pour elle. Elle vient quand même d'être mise en face d'un truc de dingue ! Non ? En lieu et place de cela, on assiste à un interrogatoire de plus comme si de rien n'était, comme si les enjeux n'avaient pas changé et comme si ce brave Lucas et la mère (qui change de coiffure pour échapper au FBI !!) avaient juste participé à un braquage de bijouterie.
Bref, un final à l'image du film aussi absurde que décevant.


Personnages/interprétation : 3/10
Scénario/histoire : 2/10
Mise en scène/réalisation : 8/10


4/10

Theloma

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20
10

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