Avec ce Mauvaises herbes, Kheiron adapte au cinéma son expérience en tant qu'éducateur pour jeunes en difficulté (poste qu'il occupera quatre ans avant de se lancer dans le one-man show), mais il n'oublie surtout pas d'amener sa bonne humeur et son goût pour les récits de vies émouvants, donnant une comédie dramatique très sympathique. On s'amuse beaucoup avec les répliques inattendues (et très drôles) qui sortent comme des punchlines d'un sketch (à peu près tous les dialogues entre l'éducateur et les élèves, on a vraiment bien rigolé), on suit avec grand plaisir les aventures amoureuses de Wael avec la belle avocate, et de Monique avec Victor (qu'on regarde presque comme un feuilleton-télé). Les arnaques à la petite semaine, toutes plus ingénieuses les unes que les autres, sont de très bonnes séquences (le coup du chariot de courses, le concours de danse) et la "dernière arnaque", plus dramatique, conclue le film avec plus de sérieux. Mais jusque-là, n'allez pas croire que le film en manque, de sérieux. Car Kheiron dégaine sa plume pour écrire un passé tragique au petit Wael qui briserait le cœur des plus insensibles, et si le montage est parfois un peu juste (cela coupe très net, le montage est assez tranché quand on passe aux séquences dramatiques), le contenu rattrape largement la forme. On s'attache instantanément (et irrémédiablement) à ce duo atypique du jeune arnaqueur beau-parleur et de la mamie ("qui n'est pas vieille !") qui tourne autour du papy directeur un peu dans la Lune (elle lui fait du plat, il ne voit rien). Les acteurs qui interprètent les élèves sont tous très crédibles dans leur rôle, qu'on croirait écrits sur mesure, on les adore tous. Et même si l'on passe rapidement sur les problèmes de chacun (attouchements, problèmes de gangs, analphabète...), cela permet de leur donner plus de personnalité et de "corps". Entre les dialogues qui sont tous très drôles, les séquences dramatiques bien écrites et les personnages très attachants, Mauvaises herbes ne nous donne pas envie de passer la tondeuse.