En 2013, Leatherface et les doux ronronnements de sa tronçonneuse avaient déjà commencé à sombrer à nouveau avec le piteux "Texas Chainsaw Massacre 3D", un film qui se voulait être une suite directe au film originel de Tobe Hooper mais dont la médiocrité était telle qu'elle en était presque arrivée à gommer les efforts du remake de Marcus Nispel (et de son sympathique prequel "Le Commencement") pour ressusciter avec réussite la saga en 2003. Toutefois, les derniers clous sur le cercueil des aventures du rejeton Hewitt durant cette décennie ont été clairement enfoncés par le film de 2017 consacrée à sa jeunesse, sobrement intitulé "Leatherface", réalisé par le duo Maury & Bustillo et sur lequel il ne vaut mieux pas s'étendre par politesse pour eux.
Condamnée à un repos bien mérité depuis cinq ans, la franchise fait aujourd'hui son grand retour sous l'égide du duo Fede Álvarez/Rodo Sayagues (le remake de "Evil Dead", les "Don't Breathe") à la production et à l'origine de l'histoire de cette suite une fois de plus directe au film de 1974 mais qui, ici, fait table rase de tout ce qui a pu mettre en scène Leatherface entre le long-métrage de Hooper et elle. Pour résumer, le tandem applique exactement les principes de la formule qui a fait le succès du "Halloween" de 2018 en convoquant à nouveau un duel entre les personnages les plus emblématiques de la saga au milieu d'une nouvelle génération prête à en être les dommages collatéraux. Michael Myers avait sa Laurie Strode, Leatherface aura ainsi sa Sally Hardesty, aujourd'hui interprétée par Olwen Fouéré à la place de Marilyn Burns et ne vivant que pour mettre la main sur le tueur à la tronçonneuse mystérieusement disparu il y a donc quarante-huit ans (!).
Cependant, contrairement à "Halloween" 2018 qui se fixait très vite sur le sort de Laurie Strode et ses descendants, "Massacre à la Tronçonneuse" 2022 a la bonne idée de laisser Sally un bon moment au second plan, se contentant d'évoquer le passé et sa soif de vengeance à travers ses apparitions, dans le but de mettre en avant le groupe de jeunes citadins qui va réveiller involontairement la soif sanguinaire de la bête texane. Bon, de ce point de vue, le film ne fait pas dans la dentelle en faisant de ses futures potentielles victimes une sacrée belle bande de bobos influenceurs, venue s'accaparer la ville fantôme de Harlow en compagnie d'un bus d'investisseurs afin d'y créer un lieu de villégiature pour une population urbaine. Autant dire qu'un tel projet ne peut que déchaîner le courroux de la folie furieuse de l'Amérique profonde sur eux !
Même si on a un peu de mal à croire que Leatherface se soit tenu à carreau pendant autant de temps, il faut bien reconnaître que les agissements malheureux des protagonistes qui vont conduire au réveil de ses pires instincts sont plutôt bien sentis pour signifier concrètement la "punition" qu'il s'apprête à subir du fait du choc de civilisation qu'ils engendrent en s'appropriant ces lieux à des fins purement superficielles. Et, aussitôt que Leatherface passe en mode dingo pour incarner le bras vengeur de cette Amérique rurale et oubliée, "Massacre à la Tronçonneuse" 2022 se calque sur la même fureur que la tronçonneuse de son tueur pour découper de la chair fraîche à tout-va ! D'une durée très courte comme celle de l'original et dans une esthétique assez similaire à celle mise en place par la relecture moderne de Marcus Nispel, ce nouveau chapitre se donne en effet pour but de redonner ses lettres de sang au titre "Massacre à la tronçonneuse" en tant que tel, avec une profusion d'exécutions toutes aussi généreusement gores les unes que les autres sur un rythme soutenu et qui atteignent même leur point culminant lors d'une séquence qui risque de rester dans les annales de la saga en termes de victimes découpées en un temps record !
En s'axant autant sur le déchaînement de violence de son prédateur, "Massacre à la Tronçonneuse" 2022 n'évite bien sûr pas les excès, rappelant même "Don't Breathe 2" (autre production d'Álvarez et réalisée par Sayagues) sur cet aspect too much ici décuplé et même carrément WTF dans certains rebondissements de son acte final, trop peu de temps est également accordé aux développements des principales héroïnes, sur leur relation de sœurs ou le fait que le traumatisme du survivant de l'une fait écho à celui de Sally, pour nous y attacher véritablement (cela dit, les autres personnages se résument simplement à de la chair humaine à côté d'elles), mais, au-delà de ses faiblesses évidentes, le film réalisé par David Blue Garcia s'avère tout de même une bonne surprise en nous envoyant en permanence des giclées de sang à la figure comme pour nous rappeler que la sauvagerie de Leatherface et de ce qu'il incarne est sans commune mesure face à ses collègues croquemitaines.
On n'en attendait vraiment pas grand chose mais force est de constater que ce nouveau "Massacre à la Tronçonneuse" remet la franchise sur de meilleurs rails que ceux où on avait laissé sa carcasse démembrée pourrir. Rien que pour ça, on dit merci à Fede Álvarez et Rodo Sayagues.