Tout d'abord, si l’effervescence autour de ce film vous a donné des préjugés catégorisant le film en un drame arrogant et sérieux, libérez-vous en immédiatement. Mademoiselle n'est pas un appât à Oscars. C'est un film étranger merveilleusement dirigé, sexuel et mûr, fixé pendant une période où un pays en a occupé un autre, et suit des femmes de différentes classes échappant à leurs patriarcats respectifs.
Les tragédies dans la filmographie de Park Chan-Wook ont souvent été appelées shakespeariennes, et si je ne savais pas que Mademoiselle était basée sur un roman de 2002, je dirais que c'était la version de Chan-Wook d'une farce shakespearienne. Au lieu de Romeo et Juliet ou Macbeth, pensez Twelfth Night ou Comedy of Errors. Mademoiselle est une comédie de mœurs, teintée d'humour noire, mais toujours en laissant la comédie en premier plan et la noirceur en second plan. Il s'agit également d'un film de casse, ou plutôt, de plusieurs films de casse impliquant des complots sur complots où tout le monde est détenteur de secrets.
On débute avec Sookee (Kim Tae-ri), un voleuse coréenne choisie par le "Comte" Fujiwara (Ha Jung-woo) pour l'aider à voler l'héritage de Mademoiselle Hideko (Kim Min-hee) - une richissime héritière japonaise. Fujiwara a déjà convaincu la famille de Hideko qu'il est un noble japonais, quand il n'est qu'un simple escroc en vérité, et recrute Sookee pour jouer les agents double servant auprès d'Hideko tout en la persuadant de s'enfuir avec le «comte» plutôt que de rester avec avec son oncle qu'elle doit épouser. Les choses se compliquent quand Sookee commence à tomber amoureuse d'Hideko et qu'Hideko semble éprouver le même sentiment. Et puis les choses se compliquent encore plus.
Et c'est tout ce que je dirai sur l'intrigue, parce que ce film va vous faire partir sur de véritables montagnes russes. Mademoiselle a un switch scénaristique des plus efficace en perspective, avec un côté à la Rashomon, et des torsions et des virages qui nous rappel The Usual Suspects ou Fight Club. La dernière fois qu'un film m'a lancé pour une boucle comme celle-ci c'était Gone Girl, et Mademoiselle le surpasse grandement.
La complexité du caractère et de l'intrigue est complétée par la grandeur écrasante du décor et de la direction. La majorité du film se déroule sur le domaine de l'oncle d'Hideko, un château massif qui est à moitié un manoir victorien et à moitié un palais japonais, entouré de forêts verdoyantes. Les hommes portent un éventail de costumes, de chapeaux et des queues de pie; tandis que les femmes basculent entre d'élégantes robes d'époque jazz et de kimonos période Edo. Mademoiselle n'est pas du tout timide sur le niveau de richesse et d'extravagance de ces personnages.
Une autre chose sur laquelle le film n'est pas timide c'est son érotisme. Mademoiselle est un film incroyablement sexuel, mais ce n'est jamais que de la titillation. La partie la plus extraordinaire d pourrait en fait être la façon dont les climax sexuels dans le film - les scènes de sexe complètement nu - représentent des clichés narratifs; Ils sont le résultat cathartique du récit et des préliminaires sexuels où les choses deviennent vraiment électriques. La scènes la plus érotique du film au final est plutôt une scène de bain relativement inoffensive où les protagoniste se regardent mutuellement de façon assez maladroite.
Avec Mademoiselle, Park Chan-Wook parcourt la ligne entre l'excès et la retenue. Il en a fait une histoire d'amour chargée érotiquement avec des corsets qui sont soigneusement déchaussés plutôt que déchirés, où on a la perspective de vue d'un vagin lors d'un cunnilingus qui nous montre le visage d'une amante aux yeux innocents et émerveillés . C'est un film sur le subterfuge et le vol, le patriarcat et la servitude, mais au-dessus de tout, c'est une histoire d'amour.