C’est avec une moue oscillant entre le scepticisme et l’indifférence que je suis allé voir Fury Road. Le nouveau volet de la saga Mad Max de George Miller revient 30 ans après le troisième volet - le presque immonde Au delà-du dôme du soleil - pour un reboot avec Tom Hardy en remplacement de Mel Gibson dans le rôle titre, pour ce qui s'annonce comme le départ d'un nouveau cycle.


Il a été susmentionné le terme d’indifférence car oui, cette série m’a toujours laissé de marbre. Que l’on évoque le premier (1979) ou Le défi (1981), bien que les deux finalement réussissent à proposer quelque chose de différent mais tout en restant chacun assez bancal. Alors forcément quand on m’a annoncé le retour de Max par une oreille l’information est de suite sortie de l’autre. Mais comme on peut toujours être surpris, je me suis tout de même déplacé après m’être préparé mentalement à payer une place plus de 7 euros.


Alors finalement, qu’est ce que j’en retiens ?


Tout d’abord que George Miller du haut de ses presque 70 ans en a encore dans le slip si vous me permettez l’expression. Ce que je veux dire, c’est qu’il n’y est pas allé par quatre chemins, n’a pas pris de pincettes. Il a voulu faire de ce 4eme opus un film d’action pur et dur. On ne peut pas dire que le long métrage porte mal sa classification.
C’est bien simple, la majorité du film est centrée sur une course poursuite véhiculée qui en met plein les yeux et les oreilles, ça pète littéralement de partout. On est bien loin évidemment de l’ascétisme visuel du premier. D'ailleurs, je me demandais même véritablement, si cette orgie explosive à l’écran allait s’arrêter à un moment donné. Bien que le tout, en étant honnête est plutôt bien mis en scène. Miller n'étant pas un manche, je trouve que le tout est plutôt lisible à l'écran, ce qui n'arrive finalement pas si souvent que ça dans le genre. Donc même si ce n'est pas trop ma came, ce qui se passe devant nos yeux n’est donc pas désagréable à regarder.
Et le point soulevé précédemment est je trouve un des gros problèmes du film (disons le principal même). Il a voulu trop en faire et pendant trop longtemps en ne proposant pas un contenu assez varié. J'avais comme l'impression qu'on voulait me gaver avec de bons donuts jusqu'à l'écœurement. Le sens de la mesure et de l’équilibre sont je trouve des éléments importants … Surtout qu’on a l’impression de voir la même chose deux fois de suite entre l’allé et le retour, bien que les scènes en substance diffèrent tout de même. Il faut bien avouer par contre que la grande proportion de séquences en prise réelle est réjouissante et tranche assez avec ce que l'on voit habituellement et sur ce plan là ça fait bien plaisir.
Néanmoins, je ne vous parle pas en détail de cet « insupportable » accompagnement sonore, pourquoi es tu né Hans ? - se voulant grandiloquent mais qui pour moi tombe à plat - et couplé avec le feu d’artifice visuel m’a donné un mal de crâne assez déplaisant que je ne vous souhaite pas.


Tout cela est d’ailleurs dommage car l’univers du film est plutôt sympa en soi. Bon, on reprend pas mal celui de Mad Max 2 avec cette zone désertique, mais le réalisateur s’en tire plutôt bien et la photographie d’ensemble bénéficiant d’un superbe paysage naturel est assez cool et le tout donnant une ambiance poussiéreuse du plus bel effet. Surtout que le réalisateur nous gratifie par moments de plans assez travaillés et réjouissants. On retrouve toujours le même trip d’une terre désolée abandonnée aux charognards et aux groupes violents faisant la loi sur leur territoire tout en essayant de s’accaparer les rares ressources naturelles restantes.
L’évocation de ces individus m’amène notamment à évoquer une caractéristique du film que j’ai trouvée positive. Ce qui a trait à la direction artistique. J’ai dit plus haut que niveau action, à l’écran le réalisateur c’est bien lâché, mais pour le design de ses personnages c’est aussi le cas. C’est même complètement barré. Bien plus qu'en ce qui concerne les précédents Mad Max. Le lien avec la série vidéoludique peut bien sûr toujours être fait, mais là c’est encore plus déjanté, notamment avec en tête le grand méchant méphistophélique et ses horribles frères. Puis on a aussi le droit à un rocker à fond dans sa partition, des kamikazes endoctrinés nouvelle génération et d’autres petites trouvailles alors que demander de plus … A noter que les véhicules, occupant une grande place dans le film, ont aussi bien de la gueule et débordent de petits détails amusants. On sent que ce côté là a été bien travaillé.


Nonobstant cela, à mon grand regret le film est rempli de petits points qui en s’entassant commencent à devenir véritablement gênants pour le spectateur peut être un peu susceptible que je suis.
Evidemment, même si le film fait quasiment continuellement dans le « boom-boom » on essaye tout de même de montrer qu’il n’est pas que ça en incrustant un semblant de profondeur et d’histoire aux personnages. Mais comme pour l’évocation des traumatismes de Max - qui a perdu ses proches (hum bonjour les incrustations bien laides) - je trouve ça plutôt raté.
On peut aussi citer la présence du fameux personnage « marrant pas vraiment méchant" dans le rôle d’un illuminé - aux mutations psychologiques expresses et tellement prévisibles - et qui se voit offrir une romance absolument insipide arrivant comme un parvenu dans un diner mondain.
Malheureusement, la trame scénaristique (dotée de pas mal de « twists » repérables à mille lieux) -plutôt caduque - est clairement mise au seconde plan et le tout n’est pas aidé par des dialogues insipides et des instants d’émotion (avec du violon of course) ou des situations censées être humoristiques tombant royalement à plat (je suis aussi dubitatif devant la mise en place des ellipses). En gros quand on sort de l'action ça devient vraiment mauvais ...
De manière générale, c’est vraiment dommage car avec un univers comme ça il y aurait moyen de faire quelque chose de construit, de touffu et de véritablement riche avec un peu d’efforts sur l’écriture. Ce qui ne m’empêche pas de trouver qu’un effort supplémentaire a été fait par rapport au deuxième opus, notamment sur le début du film mettant un petit peu en scène le cadre général.
De même, je n’ai pas trop compris cette volonté de mettre partout des personnages féminins. Attention, elles ont un rôle ici moins ingrat que ceux qu'on leur réserve dans le cinéma du genre mais là je trouvais que ça faisait plus affichage qu’autre chose, « regardez moi je suis un réalisateur progressiste! » (par contre je les mets presque à poil, faut pas exagérer non plus les amis). Cependant, Charlize (qui joue un peu trop aux yeux mouillés), contrairement à ses petites protégées - agaçantes, lisses et à l'apparence toujours aussi impeccable après leurs péripéties désertiques - est tout de même dotée d'un taux de charisme assez élevé. Un personnage plutôt intéressant, volant même quelque peu - voire beaucoup - la vedette à un Tom Hardy finalement un peu terne et qui ne marque pas le film de sa prestance. Puis évidemment, il y a énormément de petites incohérences, mais les énumérer pourrait être une occupation un petit peu fastidieuse. Mais bon, ce n’est pas un point rédhibitoire en soi, surtout dans ce genre de film.


Je me suis finalement pas mal emmerdé pendant cette séance. Un comble.
Pas vraiment mon type de film, mais je peux très bien comprendre qu'on y adhère. C'est donc une mauvaise note pas vraiment mauvaise, si je puis dire.


En tout cas, le prochain, il se fera sans doute sans moi.


PS : Par contre, j’ai eu l’impression qu’il y avait une certaine retenue dans la violence pure et sanglante, suis-je le seul à avoir senti cela ? J'ai même trouvé que finalement, de manière générale, le ton reste bien plus léger que dans les anciens Mad Max, que ce dernier est moins impertinent, plus lisse.

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