La comédie est le genre qui vieillit le plus vite au cinéma, et rares sont les films humoristiques qui accèdent à un statut intemporel.
Découvrir "M.A.S.H." en 2015, c'est se heurter à cette cruelle réalité, tant le potentiel comique et irrévérencieux du film de Robert Altman s'est dilué dans l'évolution des sociétés occidentales, et de notre sens de l'humour collectif.
Entre-temps, le cinéma a connu plusieurs générations d'artistes qui ont dynamité les normes du rire, à l'instar des ZAZ, du Saturday Night Live, du Frat Pack ou de Judd Apatow, pour ne citer que les plus célèbres, uniquement sur le continent américain.
Bref cette satire militaire, sociale et religieuse ne m'aura pas transcendé, même si je parviens aisément à imaginer son énorme impact en 1970, en pleine guerre du Viêt-Nam.
Immense succès public et critique, "M.A.S.H." a enthousiasmé les spectateurs de l'époque par sa drôlerie, son culot, son cynisme assumé derrière ses outrances burlesques. Au point de générer la création d'une série TV dérivée, qui passionnera le public américain pendant plus d'une décennie!
La critique a sans doute été sensible aussi au savoir-faire technique de Robert Altman (encore peu connu à l'époque), qui parvient brillamment à mettre en scène le chaos de ce camp militaire de campagne, par le biais notamment de l'overlapping, procédé autorisant les comédiens à parler tous en même temps.
Altman offre une certaine rigueur à cette suite de sketches juxtaposés, sans véritable charpente scénaristique.
Certaines séquences sont très potaches, illustrant l'humour débraillé des militaires (l'enregistrement radio du rapport sexuel), alors que d'autres segments bénéficient de plus de subtilité (celle du faux suicide), mais le film ne décolle jamais vraiment, à l'image du match de football final assez longuet.
La force du cinéaste est surtout d'avoir su conserver les scènes de boucherie au bloc opératoire, qui rappellent le contexte dramatique en dépit du ton général très léger, contribuant à ancrer "M.A.S.H." dans le registre du pamphlet antimilitariste.
A noter que selon la volonté d'Altman, le casting est composé de comédiens assez méconnus, aux côtés de quelques rares têtes d'affiche, telles que Donald Sutherland, Elliot Gould ou Robert Duvall.