Lettre d’une inconnue est avant tout une plongée dans un esthétisme de tous les instants. Louis Jourdan et Joan Fontaine forment l’un des plus beaux couples du cinéma. Dirigé avec brio par le réalisateur franco-allemand Max Ophüls, les acteurs semblent être à l’apogée de leur beauté.


Le film se base sur une mystérieuse lettre que reçoit un jour Stefan Brand, un pianiste de renom vivant à Vienne. L’expéditrice, Lisa Berndle, lui rappelle l’amour, éphémère, qu’ils avaient connu le temps de quelques instants des années auparavant. Pour elle, il était l’amour de sa vie. Pour lui, elle n’était qu’une inconnue, un nom sans visage, une femme parmi tant d’autres.


Un drame qui ne semble de prime à bord touché que Lisa, mais qui va petit à petit fissurer la carapace de Stefan. Sa curiosité piquée au vif, le pianiste va ensuite ressentir une immense frustration. Celle d’avoir été l’objet d’un amour si puissant et complet sans y avoir prêté attention, lui qui se sent à présent terriblement seul. Cet amour, authentique, à l’épreuve du temps et du comportement égoïste et narcissique de Stefan va être le fil conducteur de Lettre d’une inconnue. Rarement au cinéma ce sentiment sera porté à l’écran de façon aussi intense.


Adapté de la nouvelle éponyme de l’écrivain Stefan Zweig, Lettre d’une inconnue sera néanmoins édulcorée par Howard Koch lors de l’élaboration du scénario. Supprimant les scènes de sexe et raccourcissant l’amour entre Lisa et Stefan de trois à une seule nuit, Howard Koch, connu pour avoir travaillé sur de nombreux films de Michael Curtiz dont Casablanca, à certainement pris la meilleur décision qui soit. Raccourcir l’idylle et user de la suggestion au lieu de montrer les choses purement et simplement contribue énormément au caractère naïf et sincère de cette histoire.


Un film paisible, beau et empreint d’une formidable tendresse à découvrir de toute urgence. La réalisation de Max Ophüls aborde en profondeur les sentiments des deux protagonistes et donne à ce romantisme de doux accents de nostalgie.

Vincent-Ruozzi
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le 8 mai 2016

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Vincent Ruozzi

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