Ce film dépeint les turpitudes d'un ouvrier et d'une orpheline à la recherche d'un emploi et plus largement d'une place dans la société capitaliste industrielle. La portée philosophique du film est introduite par la citation "humanity crusading in the pursuit of happiness", dans le décor trivial d'une ville portuaire ouvrière.
Chômeurs, communistes, orphelins, détenus, ouvriers, tous sont mis à mal par le capitalisme qu'ils tentent (ou non) de questionner. Une des forces du film consiste à ne pas tomber dans le traitement grossier car général de ces groupes sociaux. Il célèbre l'être humain, sa spontanéité, sa faiblesse, sa contingence. Comme pour contrer la similarité alarmante entre un troupeau de moutons et une foule d'hommes sortant de la bouche d'un métro, qui ouvre le film.
La dénonciation de l'abrutissement des masses par le système est manifeste : c'est l'automatisme qui fait visser autant des écrous que des boutons d'un habit ; c'est l' "automangeoire", invention qui fait passer de l'agréable à la torture.
Pris dans ce monde d'automatisme et d'efficacité, à l'image d'une chaîne de production, nos deux personnages, un ouvrier et une orpheline, ont du mal à se positionner. Entre la tentation de la servitude volontaire et le naufrage dans le mirage du rêve bourgeois, il reste tout de même un élan d'entraide, de commun, d'artistique, comme une réponse aux maux du capitalisme.
Certaines réflexions gênent par leur racisme ou la critique non cachée d'une soi-disant oisiveté des chômeurs, consentant à faire quelque chose de leur vie "même si je dois travailler". Elles ne sont heureusement pas représentatives de la force de proposition du film, tout en solidarité et spontanéité.