Véritable bête de scène et idole des jeunes, Johnny Hallyday a été longuement célébré pour sa carrière musicale. Mais qu'en est-il de sa carrière d'acteur ? Hallyday a joué dans une trentaine de films, de qualité variée allant du premier rôle (Vengeance de Johnnie To en 2009) à une simple apparition (Les rivières pourpres 2 d'Oliver Dahan en 2004). Pierre William Glenn l'a fait tourné dans le génialement improbable et bordélique Terminus (1987) et il tenait à rendre hommage à l'acteur qu'il préférait au chanteur. On pourrait d'ailleurs penser que le réalisateur reviendrait longuement sur son film de science-fiction, mais même pas. Il évoque un peu son expérience avec l'acteur Johnny, mais pas le projet même ou sa réception pour le moins catastrophique.


De même, le documentaire aurait pu se concentrer sur ses films les plus connus. Pourtant en dehors de L'homme du train (Patrice Leconte, 2002), de Détective (Jean-Luc Godard, 1985) et de Salaud on t'aime (Claude Lelouch, 2014), le film se concentre sur des projets plus intimes, moins mis en avant dans sa filmographie avec le témoignage de leurs réalisateurs. C'est ainsi que Laëticia Masson, feu Jean-François Stévenin et Robert Hossein évoquent leur expérience avec Johnny Hallyday sur les tournages de Love me (2000), Mischka (2002) et de Point de chute (1970).


Les interventions de Stévenin sont d'ailleurs très informatives, car en plus de sa réalisation, il était également du film de Masson et le connaissait depuis plusieurs années. Il parle ainsi d'une crise de trac donnant lieu à un bouton sur le tournage de Love me, des conseils qu'il lui a donné avant de se lancer dans le film de Jean-Luc Godard et de la scène qu'il lui a fait tourner sur son troisième long-métrage. Une scène quasiment improvisée et tournée façon commando en moins d'une journée (l'acteur devait être à l'Olympia, d'où la présence de l'hélicoptère), même si le roi du coucou était prêt à rester plus longtemps encore.


Lui comme Hossein et bien d'autres reviennent à un même sujet : le fait qu'il était bien moins sûr de lui quand il jouait la comédie, son trac. Hossein dit même avoir été étonné qu'il lui demande des conseils au vue de sa présence sur scène. Si cela ne se voyait visiblement pas dans ses films, l'acteur Johnny était visiblement face à des doutes, au point de refuser certaines pièces car il ne se sentait pas assez mûr. Ce qui apparaît comme paradoxal pour quelqu'un qui voulait devenir acteur avant même de devenir chanteur (le destin s'est chargé du reste). Néanmoins, tous s'accordent à dire qu'il était professionnel sur les tournages et qu'il ne se comportait pas en diva.


Cela se confirme aux propos de Patrice Leconte, parlant d'un homme ému lors de la présentation saluée de L'homme du train à Venise. On le voit également par l'anecdote de Claude Lelouch et Eddy Mitchell à propos de Salaud on t'aime où le premier était étonné que Mitchell et Hallyday ne veuillent pas chanter comme les chanteurs qu'ils étaient, avant que les deux interprètes ne lui disent qu'ils ne jouent pas des chanteurs. Outre le fait que le réalisateur ne savait pas trop ce qu'il faisait, on voit là un certain professionnalisme.


Un autre point souvent soulevé par le documentaire : le fait que les fans de Johnny n'apprécient pas vraiment ses films. Ainsi, des plans filmés lors de l'hommage national et plus tard montrent bien que ses fans se sont un peu trop contentés de le voir dans son propre rôle comme le confesse Philippe Grimbert. Ils ne voulaient pas le voir dans autre chose que le personnage de Johnny au contraire de Jacques Dutronc ou Eddy Mitchell, quitte à n'apprécier que des films comme Jean-Philippe (Laurent Tuel, 2006) ou L'aventure c'est l'aventure (ce qui est d'autant plus réducteur, vu son temps de présence à l'écran).


Si on aurait pu apprécier que Glenn revienne un peu plus longuement sur davantage de films (au hasard Vengeance ou Le Spécialiste cités par des extraits), Les silences de Johnny est un documentaire intéressant dans ses témoignages, montrant un Johnny Hallyday plus intime, loin de l'image d'Epinal que l'on pouvait parfois lui donner et de mettre en lumière une face peu mise en avant de sa carrière artistique. De quoi avoir envie de se frotter un peu plus longuement à la carrière d'un acteur pas si médiocre qu'on a bien voulu le faire croire. Surtout au regard de bons nombres de prestations plus que correctes, voire très convaincantes et de choix de films aussi étonnants que couillus (Love me et Détective en sont bien la preuve).

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le 15 janv. 2022

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