Le grand méchant loup

Meilleur est le méchant, meilleur sera le film... C'est bien connu ! C'est du Hitchcock. D'ailleurs, il y a quelque chose à voir, peut être, entre Les nuits de Masshad et Strangers in a train. Les deux "méchants" sont persuadés de bien faire. Dans le film iranien, on suit la vie quotidienne de ce père de famille investi selon lui d'une mission religieuse de nettoyer la ville des prostituées qui la gangrènent. Il est une sorte de justicier. Dans le film américain, l'antagoniste est convaincu d'avoir conclu un pacte avec le protagoniste, de double meurtre inversé donc sans mobile. A chaque fois, donc, un pacte autorise le meurtre, dans un cas avec un dieu, dans un autre avec un homme. Chez Hitchcock, c'est sûr que ce pacte est une illusion et que l'homme est atteint de troubles psychologiques. Chez Abassi, il se fait passer pour fou lors de son procès, mais rien n'est moins sûr, même s'il a des crises de temps en temps. Son pacte avec dieu est de l'ordre de l'imaginaire, lui aussi.

On peut aussi remarquer que, à l'image de La loi de Téhéran sorti l'an dernier et dans le même décor quoique nocturne cette fois, le film laisse parler le "méchant". Cela signifie qu'il donne une raison à ce comportement. Ils ont une vraie histoire, un passé. C'était la misère chez Roustayi. Ici, le radicalisme religieux. On peut s'attacher à eux. Derrière ce geste narratif, l'idée sans doute que la société est à l'origine du mal, plus que l'individu seul. D'ailleurs, ce que veut découvrir la journaliste sur l'affaire, c'est si derrière ce justicier ne se cacherait pas l'État, en secret. On pourrait le croire. On ne le sait pas. La froideur des condamnations est commune dans les deux films. Ici l'enquête est au féminin, concerne les femmes directement. Le sujet même du prochain film de Roustayi Leilas Brothers, que j'attends maintenant avec hâte... Rdv en septembre.