Les Murs vagabonds
6.1
Les Murs vagabonds

Long-métrage d'animation de Hiroyasu Ishida (2022)

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Il y a des cinéastes qui nous marquent et d'autre qui savent satisfaire sans trop faire de vague. Soit parce que ce sont de jeunes cinéastes voulant faire des films plus simple comme Bruno Merle et son Felicità ou encore Hiroyasu Ishida qui m'avait plutôt convaincu avec son Mystère des pingouins qui arrivait, sur des détails minime, dégager une personnalité et une sensibilité qui pouvait m'intéresser pour un second film. Ce second film, Drifted Home (ou en français Les Murs Vagabonds, mouef), n'a pas tant tardé car produit par Netflix. Si l'on pouvait s'inquiéter du côté "production Netflix" qui peut faire peur, l'intérêt plutôt modeste que j'avais est devenu plus sérieux lorsque l'on voit que un drame fantastique autour d'enfants vivant une expérience extraordinaire dont ils vont devoir comprendre l'origine pour pouvoir grandir (comme son précédent film, donc continuité thématique, donc plus de chance d'avoir un résultat originale et personnel), et a décuplé à la vu des premières images qui nous présente un univers mixant Gagarine de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh et Le Mystère des pingouins. On peut alors rêver de la réunion des qualités des deux films. D'un côté le travail, on pourrait avoir tout le travail sur l'immeuble pouvant être une forme de refuge et de souvenirs menacé de disparaitre à tout jamais, qu'on va s'amuser à filmer comme un objet de curiosité (dans le cas de Gagarine, une fusée prête à décoller). De l'autre, on retrouverait tout le travail de Hiroyasu Ishida sur la jeunesse, et sa fascination envers les sciences de l'enfant qui viennent chercher une explication à des phénomènes surnaturels. Verdict: Ce film est fascinant.

Le film transpire, tout du long et dès ses premières scènes, d'une véritable tendresse et d'un amour fou pour son sujet. On le ressent dans la manère de filmer ces enfants avec beaucoup de bienveillance, mais aussi dans la manière qu'il a de représenter ces quartiers de logements sociaux en perpétuelle mouvement comme un être à part entière. On va avoir de nombreuses séquences, avec un thème au piano très envoutant et tendre, où l'on va voir les immeubles évoluer avec ou sans échaffaudabes, avec ou sans habitants aux fenêtres, et il est difficile de ne pas déceler une pointe de tristesse et de mélancolie dans la manière de regarder ces barres d'immeubles amenées à disparaitre qui nous font dire que le réalisateur a surement vécu cela (si ce n'est pas vrai, alors il aura tellement digéré et pris son sujet à bras le corps que cela en devient terrifiant). Tout est rendu avec une animation impeccable qui va éviter les détails superflux et la surcharge de couleur pour dépeindre une période qui n'existe plus vraiment. On n'est pas vraiment sur un film comme Dans un recoin de ce monde (qu'il faudrait que je revois, j'ai relu ma critique et je me trouve sévère) où on choisit un style épuré sans trop de détail, mais pas non plus comme le chateau ambulant avec des couleurs vives et des contrastes extrêmement marqué qui alourdissent parfois l'image. Ici on est dans un entre deux qui prend le meilleur des deux technique pour donner un résultat solaire et jeune au film, à l'image de ses personnages, mais tout en ayant une pointe de couleur douces et épuré qui encre l'univers dans une forme de capsule temporelle. Le tout colle magnifiquement bien avec le scénario du film et le ton du film qui joue entre les deux tons.

Le film parlent d'enfants quittant le CM2 et allant bientôt au collège, et le réalisateur a un don pour décrire avec détaille cette période très spécifique où l'on est un enfant, on est jeune, mais on rentre tout doucement dans l'adolescance sans jamais trop tomber dans une adolescance trop brutale comme un Harry Potter qui, par moment, va au contact de la figure adulte. On est dans une période où l'on est toujours un enfant, mais où l'on comprend tout doucement la froideur du réelle avec la mort, le divorce, le temps qui passe, la nostalgie, et les premières prises d'indépendance où l'on refuse d'être rabaisser ou d'être réduit à ce qu'on est. On va avoir des enfants qui grandissent. Certains cherchent à grandir, d'autres cherchent à fuir cette éternelle course en avant, alors que d'autre ont déjà grandit. Le cadre même du film et son atmosphère ambiant nous plonge dans une véritable poésie filmique bouleversante qui va prendre un malin plaisir de bousculer le spectateur. Ceux qui auront vu Le Mystère des pingouins retrouveront cette sensibilité et cette tendresse pour l'enfant, mais seront surpris par les parti prix du film qui vont parfois dans un registre beaucoup plus noir. On va suivre des personnages au parcour parfois écorché vif à cause d'évènements traumatisants, qui ont détruits des amitiés voire même toute une famille, et qui vont devoir apprendre à se reconstruire à travers un évènement surnaturel qui va être une énigme pour ces personnages. Contrairement à son précédent film, ici l'énigme est beaucoup plus accessible (trop ? on y reviendra après) et est plus signifiant , et elle démarre avec une scène véritablement glassante et forte qui prend le contrepied totale avec le ton espiègle et joyeux dans lequel on démarre. Cependant cela ne vient à aucun moment comme une faute de gout mais bel et bien comme une nuance qui montre une autre face de cette période de l'âge. A cet âge il peut y avoir des disputes, des bagarres, des jeux dangereux, voire même parfois des accidents graves, et le film a bien compris que cela relevait du non sens d'éclipser cette facette de l'âge. C'est là qu'on remarque que l'on a un véritable auteur à la barre et un véritable expert des jeunes enfants rentrant tout doucement au collège (pas de sous-entendu aucun). On va alors voyager entre scène de pure juvénilité et de cruauté morale qui ferront mouche tant on est transporté dans une ambiance cohérente et tant le mystère autour de cet immeuble flotant sur les fleaux fascine. Cependant il y a un soucis, c'est que si le film est globalement très agréable et propose une véritable expérience agréable, le film est beaucoup trop long pour que cela ne soit sans défaut.

Le film ne souffre pas tant de longueurs, tant il sait écrire et rythmer ses scènes entre elle. Seulement le film n'a pas grand chose à raconter et à montrer mis à part son scénario qui aurait pu tenir en 1H20/1H30, et très vite on commence à tourner en rond et à anticiper une fin qui viendra 20 minutes voir 40 minutes plus tard. La chose est d'autant plus frustrante que le film sait bien conclure son histoire, mais qui, dans une volonté jusquauboutiste de finir les choses à sa manière, nous demande presque une demi heure de film qu'on subit comme Jérome Commandeur subit un Didier Allouch beaucoup trop fier de ses anecdotes. On finit épuisé face à un film qui sait ne pas ménager son spectateur face à des scènes particulièrement violente, mais malheureusement aussi et surtout car le mystère n'en est pas vraiment un au bout d'1h20 d'un film qui veut faire 2h. Cela instaure une longueur où les défauts se retrouvent particulièrement visible car laissant trop le spectateur réfléchir et se poser pour analyser ce qu'il voit d'une manière froide qui ne convient pas pour analyser ce film. Le film vient très vite à tourner en rond dans sa seconde parti, qui n'est pourtant pas la plus mauvaise, mais qui va accumuler les reddit de scènes où des personnages apprennent des choses, évoluent, et recommencent comme si rien ne s'était passé et/ou qu'il n'y a pas de lien entre les scènes. On sent quelques longueurs et certaines lourdeurs dans l'écriture des personnages qui pèchent. On a le personnage de "la peste" du groupe qui va s'en prendre au moins 4 ou 5 fois aux mêmes personnages avec à peine 10 minutes d'intervalle entre les scènes, ce qui crée une redondance et une régression pénible des persos. Sans compter le personnage de l'inconnu qui ne sert pas à grand chose, qui fait la figuration tout le long du film, qui n'a pas grnad chose à faire, et qui accumule les grossièreté d'écriture qui vendent la mèche de ce que va être la réponse au mystère de l'histoire. On sent les bonnes idées autour de ce personnages mais à cause d'une écriture trop étiré de force pour tenir sur 2h, le personnage devient vide de sens et d'intérêt tant il n'arrive pas à être intéressant. Le tout avec des dialogues qui, par moment, sentent trop adulte et cassent de trop le côté enfant pour les rendre adulte. En soit c'est une bonne chose car cela reflète surtout une volonté de prendre au sérieux ces enfants et de les mettre à égale avec les problèmes adultes, mais parfois on a des scènes qui auraient mérité plus de sensibilité et de jeunesse. Lorsqu'on a un enfant qui voit un proche mourir, ou qu'un enfant s'éclate le genoux en se l'ouvrant avec du verre, on ne peut pas faire comme si c'était "juste une égratinure" car on tombe peut tomber dans des extrêmes très peu crédible (heureusement le film ne tombe pas totalement dedans). On a tout une aisance pour exprimer un univers paranormal très complexe à manié, mais maitrisé et limpide qui fait de ces problèmes d'écriture presque une honte. On a tout un jeu avec des éclaires bleu qui viennent pour émerger de la mer ou du ciel pour frapper les personnages, en à peine deux scènes on comprend comment marche ces éclairs, on sait ce qu'ils racontent, et ça fonctionne. Comment ça se fait que cela ne soit pas aussi net et précis avec les personnages ? Enfin, la réalisation pèche de sa propre initiative de proposition épuré car ne tenant pas le spectateur sur la longueur. Le film manque le coche, parfois à pas grand chose, pour offrir au spectateur une véritable scène marquante. On sent les scènes pouvant être marquantes et visuellement impactante, mais qui à cause d'un mauvais rythme, un mauvais plan de caméra, un moment ultra intéressant visuellement parlant devient moins intéressante. Le film ne rate pas tout, bien au contraire. On a tout un jeu avec la peluche de l'héroïne qui est très intéressant et donne immédiatement un corps et un attachement, ou encore des plans sur l'immeuble et les batiment en pleine dérive sur la mer qui sont majestueux, mais on aurait aimé plus de plan mieux travaillé. Il y a notamment une scène de pure paranormal où les enfants sont dans un centre commerciale, et on a un évènement paranormal tout de bleu et de jeu d'éclair qui aurait pu être visuellement impactant dans la façon dont cet évènement crée une terreur et une fascination pour ces enfants, et qui est filmé de côté de manière très étrange ne mettant très peu en valeur la bizarrerie et le côté étrange de l'évènement. J'ai l'impression d'avoir Jean michel cadrage qui n'a pas bien fait son job, le tout avec un plan finale qui est mis en scène de manière étonnante. On a tout un jeu avec un appareil photo qui appartient au héros, qui est le symbole de tous les évènements du film, et qui devient presque une capsule temporelle de cette expérience troublante et fantastique vécu par nos héros. Je ne sais par quel inspiration et c'est arrivé, mais le dernier plan du film est vraiment traité de manière bizarre, ça me rappelle presque la fin de certaines vidéos amateur chelou qui savent pas comment finir. Cette fin est un peu à l'image du film: une très belle proposition qui va au bout de son concept, qui aura mis du temps à venir, mais qui sait toucher avec des émotions sincères... malgré certains choix artistiques et de cadrage que je ne comprends pas vraiment, et un scénario qui aurait peu être du rester dans une forme d'efficacité que le film, en 2h, ne fait qu'effleurer. On sent tout de même une nette progression depuis Le Mystère des pingouins qu'il faut saluer et encourager pour permettre à son auteur de progresser de ses erreurs et attendre un point un jour où il marquera tout le monde. C'est encore balbutiant, mais je sens les prémices de quelque chose de dingue, et je serais aux premières loges pour voir son prochain film !


14/20


N’hésitez pas à partager votre avis et le défendre, qu'il soit objectif ou non. De mon côté, je le respecterai s'il est en désaccord avec le miens, mais je le respecterai encore plus si vous, de votre côté, vous respectez mon avis.

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le 25 sept. 2022

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Youdidi

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