
Attention, cet avis comporte ce genre de spoilers:
Tu m'étonnes qu'il y a de mauvais cultivateurs! Surtout quand ils font de la monoculture dans des bassins bétonnés, sous perfusion et nourrie aux pesticides.
Alors oui mais non. Avec son unité de lieu (Montfermeil comme décor à ciel ouvert), de temps (24h) et d'action (une bavure policière), Les misérables ressemble à une tragédie en 3 actes. On prend un réel plaisir à découvrir les rapport de force et les rouages officieux qui régissent cette...banlieue, cité, quartier populaire...à travers une galerie de personnages tous nuancés qui évite tout manichéisme.
On est pris par le mouvement d'une caméra toujours mobile qui induit une urgence et une tension permanentes de situations qui peuvent dégénérer à tout moment.
Sauf qu'il y l'acte 3, sidérant. Et il remet tout le film en cause. Attention, démonstration:
pendant tout le film, le réal s'attache surtout aux individualités des adultes, leurs postures, leurs magouilles. Leur comportement brutal s'explique dans un contexte de lutte pour un territoire. Les microbes, en arrière plan n'ont pas droit au même traitement. Eux aussi semblent dédaignés par le réal. Ils sont tout juste montrés comme des "petits cons" déjà contaminés par la violence de leurs aînés.
A la fin, ils finissent par se retourner contre les adultes dans une révolte organisée, une vengeance préméditée. Mais le réal les traite alors comme une masse d’encapuchonnés anonymes et unis. Il renonce alors à toute pédagogie de leur motivation personnelle et fantasme la rage destructrice d'une génération spontanée sortie de nul part.
On avait l'impression de comprendre un peu mieux la banlieue et voilà que le réal renverse la table en annonçant la violence accrue et aveugle de la génération d'après. La "banlieue" (re)devient un lieu de désordre hostile.
Et ça, c'est un bon gros message qui confortera ceux qui ont peur de la "banlieue" sans la connaître.
Bref, Les misérables est un film captivant qui décrit un réel beaucoup plus sérieusement que ce qu'on entend sur les plateaux TV mais qui finit fasciné par sa propre impuissance à réfléchir aux racines de la violence.