
Quelle étrangeté que ce film inclassable. Une mère de prime abord tout à fait adéquate débarque chez ses filles, qui occupent une maison de vacances de façon apparemment définitive, parce que la cadette est enceinte jusqu'aux oreilles. En dépit des réticences initiales de la future mère, elle s'avère plutôt contente de bénéficier de l'expérience de son aînée. Après tout, la maternité n'est-elle pas essentiellement une affaire de transmission ? Tout semble aller pour le mieux, à part l'opposition des parents du jeune père, Mateo, à cette grossesse (trop) précoce. Mais les deux ados se font une joie d'entamer cette nouvelle phase de leur vie. C'est compter sans les intentions retorses des adultes, et je ne peux guère en dire davantage sans déflorer le suspense. Je ne peux pas dire non plus que je me sois régalée dans cette histoire plutôt plan plan, qui recèle néanmoins quelques belles surprises. On en ressort dans des abîmes de perplexité : qu'est-ce qui distingue les gens frappés de troubles psychiques graves des autres ? Qui, dans cette histoire, est le plus dérangé ? Les dérives les plus spectaculaires se font à bas bruit, en-dessous des radars de la société, et peuvent prendre des proportions monstrueuses. Comment se prémunir contre les courants sous-marins insondables qui agitent les êtres humains ? En abandonnant tout conformisme social et en s'autorisant des comportements parfaitement amoraux ? Les parents toxiques condamnent-ils leurs enfants à la marginalité ? Voilà quelques questions que ce film finalement plutôt malin pose, sans avoir l'air de trop y toucher au début, et le basculement est d'autant plus perturbant. Les interprètes sont au poil.