Dans ma quête pour découvrir des pépites méconnues, je me suis inspiré d’une liste de 100 chefs-d'œuvre (que vous n’avez pas vu) éditée par Première en 2015.


Parmi cette liste, on retrouve Sorcerer, Wake in Fright, La colline des hommes perdus, Punishment Park ou encore Idiocracy. Des films que j’ai déjà eu le plaisir de voir. Ce sont surtout des œuvres à part, des curiosités, qui méritent qu’on s’y attarde.


Parmi cette liste, Les Charognards a attiré mon attention. Le synopsis est intrigant, comme une sorte de Les Chasses du Comte Zaroff dans les plaines arides de l’Ouest américain. La présence d’un de mes acteurs préférés, Gene Hackman, a fini par me convaincre de me lancer dans ce western.


Une femme parmi les hommes


Melissa Ruger (Candice Bergen) est une institutrice. Elle est mariée à un riche propriétaire violent, Brandt Ruger (Gene Hackman). La bande de Frank Calder (Oliver Reed) la kidnappe pour qu’elle lui apprenne à lire. A l’annonce de la nouvelle, Brandt se lance avec de riches amis à leur poursuite. Ils vont les traquer sans répit comme des animaux.


La femme se retrouve prise en étau, entre ses hommes violents. Elle va subir leurs violences physiques et psychologiques, jusqu’à un viol. Frank semble la protéger de ses hommes, avant de se montrer aussi violent qu’eux, au point d’être l’auteur de ce viol. Il la traite comme du bétail, ce qui était aussi le cas avec Brandt. Elle ne cesse de fuir. Il continue de la rattraper, de la malmener, de la dresser comme une jument. La relation est aussi ambiguë, que malsaine. Elle semble atteinte du syndrome de Stockholm. A moins que la violence subie par son mari, fait que ce type de relation, lui semble acceptable.


L'Ouest des plus sauvages


Les Charognards est un western sale et violent, au rythme de la ritournelle entêtante de Riz Ortolani. En quelques plans, le réalisateur Don Medford esquisse ses personnages. Les hommes sont violents. Peu importe leur statut social, ils émanent d’eux une violence permanente, susceptible d’exploser à tout moment.


Mélissa est le réceptacle de cette haine et de la rage qui les animent. Elle est un morceau de viande pour ses mâles en rut. Son mari la méprise mais ne peut supporter que sa propriété lui soit enlevée. C’est son ego qui est blessé. Il ne s'inquiète pas pour elle. Il a peur qu’elle soit salie par ses sauvages et finisse engrosser. Pour éviter cet affront à sa virilité, il embarque ses riches amis dans cette chasse à l’homme.


Un réalisateur sous influences


L’ombre de Sam Peckinpah plane sur cette œuvre crépusculaire. La violence de la scène de l'oasis, avec ses ralentis où se mélangent les coups de fusil et les hurlements, est typique du cinéaste. C’est magnifiquement chorégraphié avec ses corps transpercés par les balles, ainsi que la peur et l’incompréhension qui se lit dans les yeux de Frank. Le bandit est épargné. Brandt Ruger se refuse à l’abattre. Il garde le pire pour la fin.


Au milieu de toute cette violence, il y a cette scène improbable du pot de pêches. Un instant suspendu où même la musique s'accorde à la légèreté du moment dans un improbable triangle à trois. Elle ressemble à celle entre Katharine Ross et Paul Newman sous le regard de Robert Redford dans Butch Cassidy et le Kid, le classique de George Roy Hill. Butch vient parader sur son vélo devant Etta, avant qu’elle ne grimpe sur sa monture alors que Raindrops Keep Fallin’ on My Head les accompagne. Une chanson interprétée par B.J. Thomas et composée par Burt Bacharach, récompensée par l’Oscar de la meilleure chanson originale en 1970.


Les références sont nombreuses. Don Medford a su s’inspirer des plus grands pour signer un western d’une impressionnante violence. L’homme est un réalisateur de télévision prolifique dont les séries les plus connues sont Le Fugitif, La Quatrième Dimension ou Dynastie. Ces deux longs-métrages ne vont pas connaître le même succès. Ils ressemblent à des exutoires où l’auteur peut sortir du cadre restreint de la télévision. Il ne rencontre pas le même succès dans les salles obscures et va continuer de briller dans les tubes cathodiques.


Enfin bref…


Les Charognards est un western ambigu d’une extrême violence, à la moralité des plus questionnables. La simplicité de son scénario, ainsi que le jeu outrancier d’Oliver Reed ne rendent pas honneur à cette partie de chasse qui avait tout pour devenir un classique.

easy2fly
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le 13 mars 2023

Critique lue 16 fois

Laurent Doe

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