Le plus grand braquage du cinéma d'animation

Si Disney est le plus grand studio d'animation actuellement, le studio qui est considéré par beaucoup comme son rival n°1 reste Dreamworks. Dreamworks est le studio le plus singulier et le plus border de l'animation grand public, ce qui lui a valu une réputation et une image au yeux du grand public de studio aux productions parfois pas glorieuses. Tout d'abord avec Shrek (qui, même si les cinéphiles l'aime beaucoup pour son audace, reflète encore l'image de film immature à l'image de son ogre vert qui prend sa doche dans de la merde), la trilogie Madagascar, ou encore le tristement célèbre Gang de requin qui fût un bide critique et public tel que cela en a traumatisé plus d'un (même encore aujourd'hui, lorsque l'on re-regarde les bandes annonces, pose encore problème). Malgré tout, ces films avaient l'honneur de vouloir proposer quelque chose de radical et qui cherchait à se dissocier des propositions trop scolaire d'un Disney qui, à l'époque, était en pleine traversé du désert. Une saga de film a réussit à donner une classe et des codes à cette radicalité, et cette saga, c'est la saga Dragon. Cependant, malgré un très sympathique premier volet et un 2e volet concrétisant les essaies du 1er films, le 3e volet, avec ses qualités et sa beauté indéniable, sonnait comme un aveux de défaite face aux canons imposés par Disney. La singularité qui faisait la beauté du studio a laissé place à des créations plus lices et moins singulière à l'image d'un Abominable bien oublié par le grand public ou encore un Trolls 2 timide et incertain. Mais est ce qu'on ne quitterait pas la radicalité pour mieux retomber dedans par la suite. C'est dans cette optique que Dreamworks nous propose Les Bad Guys, une adaptation d'une bande dessiné aux couleurs pop, à l'irrévérence exaserbé, et à la bande annonce savait donner le sourire. Et verdict: Les Bad Guys est le plus grand casse que le cinéma d'animation actuel a connu !
La première chose qui te saute au visage dès le début du visionnage c'est à quel point tout est beau. On a ce jeu entre la 2D et la 3D qui fonctionne et est véritablement admirable. On a ce jeu avec les traits des poils des personnages ou leurs expressions tout droit sorti de la bande dessiné qui donnent une classe supplémentaire à la 3D car étant en 2D et car donnant une nouvelle ampleur à l'action. On va jouer avec ces traits en 2D pour accentuer les mouvements et la vitesse, ce qui donne quelque chose d'extrêmement dynamique et pop dans des scènes réalistes comme une course poursuite en voiture. Le but est de toujours mieux nous faire ressentir ce que l'on voit sans nous proposer quelque chose d'ultra réaliste, et au contraire, fuir un ultra réalisme pour toujours encrer le film dans une irrévérence qui fait la force même du film. Évidemment on aura de l'ultra réalisme par moment, mais ce sont surtout des moments pour mieux faire ressentir l'action et pour créer des ruptures de tons plus grandes lorsque l'on va citer le passage de différents films (on y reviendra plus tard). Contrairement à un Alerte rouge qui utilise l'ultra réalisme sans que cela ait une réelle utilité, ici on nous montre que l'on a le savoir faire, on nous montre que l'on sait ce que l'on fait, et on se contente de faire moins, mais de faire bien, presque pour faire un pied de nez à des productions comme celle que peuvent nous faire Disney (on y reviendra après). Mais plus que de beau graphismes, le film est magnifique aussi dans ses chorégraphies, dans ses cadres parfois d'une pureté absolue, et aussi (et surtout) par les images qu'il invoque pour donner une dimension autre au récit. Le film connait ses références et les maitrises à la perfection. Nous avons aussi les jeux vidéos Payday, mais aussi en terme purement cinématographique. La plus évidente reste Ocean Eleven, le film Agence tout risque, ou encore un hommage hallucinant dans la durée dès sa scène d'ouverture, maitrisé de bout en bout, et qui rend hommage à Pulp Fiction. Toutes ces citations peuvent paraitre étrange voire forcé pour ce qui est de la citation de la scène du Diner (entre le personnage joué par Tim Roth et sa copine avant leurs braquage) puisque d'habitude on s'attendrait de Dreamworks une proposition singulière qui ne chercherait pas tant à épouser des codes mais à justement les détruire. Cependant, cela répond à une certaine logique lié au propos même du film.

Le film veut parler de se renouveler avec son temps, du fait de préserver notre singularité face à une société qui cherche à la brider, et comment faire en sorte de grandir et de faire accepter aux autres ce qu'on est tout en leur apportant quelque chose qu'ils ont besoin. En filigrane, on peut y voir un résumé de l'histoire du studio et de sa guerre contre Disney, de ses heures de gloire, de sa chute dont il faudra se relever, les choix pris pour se relever, soulignant la difficulté que cela pu être pour ceux qui ont fait le studio ce qu'il est, et comment peut se terminer la guerre entre Dreamworks et l'opinion publique qui a toujours préféré la compagnie aux grandes oreilles.


Le choix de représenter le méchant à travers un rongeur utilisant le système et la crédulité de la société pour faire le mal n'est pas anodin. Même qu'à plusieurs reprise on le prend pour une peluche ou une créature adorable, et durant toute l'arrivé des Bad Guys en prison, ils n'arrêtent pas de décrire le cochon d'inde comme un rat, renforçant le parallèle avec Mickey Mouse


C'est une histoire qui est pour ceux qui veulent faire accepter au monde entier qui ils sont, mais aussi pour les cinéphiles et les fans de la première heure qui ont pu voir le style du studio se calquer presque à ce que pouvait produire Pixar ou Walt Disney Compagnie. Il est donc logique que le film s'ouvre directement à un hommage au cinéma, car le film annonce quel est le sujet même du film: l'état cinéma d'animation actuel. A travers ses personnages qui cherchent à faire les meilleurs braquages et cherchant la crainte de la société, on y voit une troupe de joyeux luron cherchant avant tout à casser les codes et aller toujours plus loin dans leurs arts afin de marquer les esprits. De la même manière que les personnages veulent casser les codes, Dreamworks casse les codes et prend beaucoup de risques en terme d'écriture. La volonté ici n'est pas tant de créer un suspense et laisser toute la réussite scénaristique du film sur le fait (ou non) d'être surpris par le dénouement finale, mais plus de raconter une histoire qui, pris sous plusieurs angles, peuvent parler de plusieurs histoires qui ne sont en réalité que plusieurs facette d'une même pièce. L'idée est de littéralement faire un hold up, et prendre tout le monde à dépourvu en étant captivant, tout en n'essayant pas des procédés scénaristiques trop sophistiqué. Plaire en retournant aux sources, dire non à l'animation sophistiqué imposé par Disney préférant la maturité à la beauté même de l'animation (avec des films de plus en plus tourné vers le réalisme formelle, peu d'humour simple, et beaucoup de sophistications parfois inutiles), et en exploitant l'expérience et les différentes découvertes engrangé au fil des années pour exacerber notre singularité qui, de base repousse, mais qui va trouver ses lettres de noblesses. Dans un système cinématographique allant toujours plus vers l'avancé technologique, le propos de fond mature, et la nécessité de rendre un film d'animation adulte et faussement cinématographique en le rattachant aux films live avec des artifices parfois lourd et pesant, Les Bad Guys prend le choix risqué de faire l'inverse et de faire redécouvrir qu'est ce qu'un vrai film d'animation tout publique avec une emprunte qui devient, de suite, beaucoup plus cinématographique que n'importe quel film Pixar allant vers l'ultra réalisme déraisonné. C'est pas tant un hasard si, au début du film, on nous présente le film en disant "un braquage commis par Dreamworks ", parce que c'est littéralement le cas. Comment proposer autre chose dans un cinéma d'animation asphyxié par des propositions Disney qui prennent le monopole ? Comme je le disais précédemment, le film cherche à parler de comment Dreamworks a pu faire la guerre contre Disney dans le passé, du résultat où ça en est aujourd'hui, et de ce que prévoit le studio dans l'avenir. Je le disais en introduction, Dreamworks a évolué et a tenté des choses en allant vers le style Disney dans ses propositions passés. Pour montrer cela, le film va adopter des codes scénaristiques et déployer différents outils qu'utilise Disney et Pixar. Il y a les scènes allant vers l'ultra réalisme comme dit plutôt, mais il y a aussi des éléments scénaristiques et des moments de pure échange entre les personnages, et dans ces moments là, on peut avoir quelques frayeurs parce que l'on peut croire que le studio a décidé de pleinement épouser ses codes, mais c'est bel et bien pour rebondir et faire mieux que ces codes sont utilisés. On a une scène dans une prison où l'on va avoir une scène typique de chez Disney mais qui va s'achever de manière abrupte pour laisser place à une scène incroyablement belle et audacieuse (casant au passage une magnifique référence) en total rupture de ton avec ce qui peut être attendu d'habitude dans ce genre de situation. Le fait est que le film est conscient que quand Dreamworks essayait de faire "comme Disney", cela ressemblait pas à grand chose. On le voit littéralement lorsque les Bad Guys essayent d'être gentil et où on les force à porter des vêtements ridicules, le but est de montrer à quel point on a l'air très con lorsque l'on essaye d'être trop consensuel et que l'on veut plaire à tout prix (être gentil). Du coup pour ne pas se reposer que sur les aspect Disney du scénario, le film va beaucoup puiser vers les films de gangster et de braquage comme les films de Tarantino, les Agences Tous Risques, ou encore la trilogie Ocean pour proposer un vrai hommage aux films des années 80/90 en animation, mais va aussi se reposer sur un nombre incalculable de fusil de Tchekhov globalement tous très bon afin de donner du rythme et un dynamisme à l'ensemble. Il y en a bien un ou deux qui sont mauvais et que tu vois venir à des kilomètres, mais c'est pour mieux cacher ceux qui servent réellement à l'histoire et à la claque du final qui est très réussit.

A ce stade, vous l'aurez compris, ce film est un véritable coup de cœur et il m'a eut sur plein d'aspect. Cependant il est faux de dire que le film n'a aucun défaut. Tout d'abord, j'en parlais précédemment, le film a de nombreux fusil de Tchekhov et certains sont vraiment pas discret qui servent parfois le récit, mais n'empêche, qui produit des scènes assez insistantes et lourdes qui plombe un récit extrêmement bien équilibré qui se retrouve rabaissé à plus petit qu'il ne l'est. Ensuite nous avons le fait que le film prend le risque de ne pas chercher à développer un suspense outre mesure et que, de ce fait, l'histoire est un peu cousu de files blancs. Cependant, encore une fois, c'est une histoire qu'on a peu être déjà vu ailleurs une fois, mais qui ici est vu dans un contexte et un propos différent sur un studio qui cherche à sortir la tête de l'eau et à réaffirmer ses valeurs et son identité, ce qui va rendre le tout passionnant, non pas pour le voyage que l'on va faire, mais plus sur comment on va le faire. Le tout se ferra avec un véritable amour pour le cinéma et une véritable générosité en terme d'action et en terme de réflexion qui ferra qu'on sera touché lorsque l'équipe des Bad Guys aura des conflits et des problématiques qui mettront à mal leurs gangs. Le tout se ferra à travers l'humour qui s'aura être finement dosé, malgré un gag à base de prout qui fait tache au début, mais qui saura avoir son importance par la suite. Et enfin à travers les références qui vont des films d'actions, au film de gangster à la Tarantino, ou encore aux films d'animation afin de nouer un lien de confiance sincère avec le spectateur. Oui le film cite des films et peut paraitre détaché de toute personnalité tant il peut donner des références, parfois à la seconde. Cependant le film montre qu'il n'a absolument pas oublié ses origines et qu'il n'a pas non plus oublié que c'était un pure film d'animation. On ne sera donc pas étonné d'avoir une scène de concert rappelant la fin des films Shrek, des scènes montrant le paysage à travers un plan sur un personnage submergé par un décors qui le domine comme dans la saga Dragon, ou encore un clin d'oeil à un décors de Les Incognitos, le dernier film du studio BlueSky qui portait sur le monde de l'espionnage et du film d'action. Enfin, un point qui me pose problème, c'est le doublage français. A la vue des bandes annonces, lorsque l'on nous a annoncé Sam Rockwell et que l'on a retrouvé le doubleur officiel de Sam Rockwell pour jouer Monsieur Loup, cela marchait parce que le doubleur est habitué à travailler sur les différentes performances de l'acteur américain, et on retrouvait le côté bad boy et sombre que peut avoir Sam Rockwell. Pourtant, la société de doublage a décidé de faire appel à du star talent pour les rôles de Monsieur Requin, interprété par Jean-Pascale Zadi, et Monsieur Loup qui se retrouve désormais doublé par un Pierre Niney qui galère sévèrement sur le doublage des bandes annonces. Malgré tout cela reste loin d'être mauvais... mais disons que c'est l'un des moins pires. Le doublage de la Diane Foxington va du passable à l'épouvantable dans le sous-jeu, ce qui ruine pas mal de scène reposant en parti sur elle. Mais malgré tout, ce que l'on peut retenir de ce film, c'est que Dreamworks a fait un véritable hold up dans le monde du cinéma d'animation, exécuté d'une main de maitre, et au résultat époustouflant de maitrise. Malheureusement, de par sa forme, le film risque très probablement de ne pas rencontrer son public à la manière d'un Megaman à l'époque qui, aujourd'hui, est beaucoup apprécié pour sa lecture du superhéros. Il ne faut pas que cela n'arrive et il faut aller soutenir ce genre de proposition en prenant pleinement conscience de ce que vous allez voir. Oui ce n'est pas sophistiqué avec un travail quasi photoréaliste h24, oui c'est un peu plus bas de plafond que certains films qui cherche parfois trop l'intellectualisation, mais cela n'empêche que c'est un grand film qui n'attend qu'à être apprécié à sa juste valeur.


18/20


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Youdidi
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le 3 avr. 2022

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Youdidi

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