Les aventuriers de l’arche perdue : derrière ce seul titre se cache toute une dimension du cinéma de divertissement que Spielberg et sa clique vont mettre en place pour les décennies à venir. Après le carton des Dents de la Mer, le lyrisme philosophico mystique du 3ème type annonçant le futur classique E.T. et une tentative échaudée sur le registre de la comédie (1941), Spielberg s’attelle à ce qui va devenir un mythe.


L’ouverture en est un bon exemple : la façon dont le cadrage diffère l’identification du visage du héros éponyme est une signature qu’on retrouvera dans tous les épisodes à venir. Le chapeau, le fouet vont faire le reste, le tout dans un décor de carton-pâte qui préfigure à peu près tout ce que le jeu vidéo va exploiter par la suite : des parcours semés d’embuches, une luxuriance exotique et une course euphorique… sans oublier le score mythique de John Williams, indissociable du personnage.


Indiana Jones pourrait se voir comme une nouvelle déclinaison du héros qui depuis plusieurs années fait déjà la loi sur le box-office : James Bond. Même invincibilité, même talent hors-norme, identique façon de sillonner le globe en enchaînant les cascades. Mais c’est dans ses distinctions que se définit l’enthousiasme sémillant du jeune Spielberg : son personnage est doté d’importantes composantes comiques, dont la dérision et l’aspect chien fou qui lui donnent un charme instantané. Dans des aventures assez proches de celles de Tintin, l’ennemi local grouille, on se cache dans des jarres, on est à la merci d’un singe espion et l’on découvre des secrets ancestraux. L’archéologue déboule la plupart du temps comme une boule de bowling en passe de faire un strike, y compris avec tout le mobilier qui aurait le tort de se trouver sur son parcours.


Le film est une ode au mouvement, convoquant les modèles d’Errol Flynn et les investissant d’une musculature volontairement moins fine, avec la même énergie que celle de Belmondo chez de Broca, empruntant cheval, avion ou camion et bastonnant avec enthousiasme un ennemi protéiforme, qui défile en attendant les coups.


Si le film a quelque peu vieilli dans sa gestion du rythme, occasionnant quelques légers temps morts, il occasionne de superbes scènes d’action dans des décors grandioses, et sait doser l’humour pour faire du personnage la synthèse parfaite de l’aventurier sortie des usines à rêves. Un mythe est né, et il a encore quelques belles années devant lui.


Revoyons Indiana Jones

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le 21 janv. 2016

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Sergent_Pepper

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