Si on a reproché au premier épisode des animaux fantastiques une intrigue simple, voire simpliste, et un discours léger de marchand de jouets plus intéressé par refourguer une peluche niffleur à ta petite-cousine que de te vendre une aventure épique, force est de constater que J.K. Rowling a entendu les critiques et a pris un virage à 180° avec cette suite, quitte a pas tout a fait contrôler son dérapage.


Alors oui, il reste des bébêtes à capturer pour un Eddie Redmayne toujours aussi à côté de la plaque - très bon dans ce registre au demeurant - mais passé une première demi-heure plutôt réussie, le scénario adopte un ton plus sombre et les intrigues inutilement complexes se développent confusément à travers une multitude de nouvelles têtes pas vraiment mémorables, de personnages que l'on croyait mort ou d'autres pas encore nés. La nouvelle venue Zoë Kravitz va, par exemple, se tailler la part du lion alors le quatuor héros installé dans le premier opus n’aura même pas le temps d'un échange, s'extirpant à peine d'un second plan dans lequel le film les pousse, comme si la saga ne savait plus quoi faire d'eux.


La faute a des facilités scénaristiques nombreuses et un fan service plus massif que dans le premier épisode qui n'hésite pas à envoyer la continuité rétroactive débroussailler un saule cogneur pour afficher quelques têtes connues. Un vrai problème, car si Jude Law en Dumbledore trouve l'équilibre juste entre nonchalance et sérieux alors que Johnny Depp en grand méchant gourou fan de narguilé a du potentiel pour explorer des thèmes plus "réalistes" que ce à quoi l'univers d'Harry Potter nous avait habitués, le scénario tout simplement mauvais emprunte des ficelles déjà utilisées dans la saga initiale et se sent forcé d’enchaîner références visuelles et name dropping presque indécent pour titiller le pottermaniaque hardcore. Le néophyte sera paumé tandis que le monde magique est réduit à un joyeux amphigouri clignotant.


L'univers présenté est toujours aussi beau pourtant, le Paris sorcier des années folles se révélant le superbe terrain de jeu d'une direction artistique inspirée, mais dommage qu'il ne soit peuplé que d'écervelés inconstants qui se croisent dans une valse improbable. Plus encore que dans la saga originale, j'ai vraiment eu l'impression de voir l'intrigue d'un livre de 700 pages charcutée pour tenir dans un récit de 2h14. La caméra brouillonne de David "minimum syndical" Yates, n'ayant pas évolué d'un iota après six films dans le même univers, n'aide pas non plus à s'attacher à ce bordel trop sérieux pour son bien.


Au final, Les Crimes de Grindelwald est une suite qui continue de faire vivre la franchise tout en ressemblant de plus en plus à du fan service qu'à un vrai ajout signifiant. Un petit syndrome Disney Star Wars se fait sentir et s'il n'est pas encore fatal, difficile d'avoir une confiance aveugle dans les 3 prochains films censés pousser l'histoire jusqu'en 1945.


Mais de toute façon, quoi que j'en dise, c'est pas ça qui l’empêchera de cartonner au box-office...

Cinématogrill
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le 19 nov. 2018

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Cinématogrill

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