Ceux qui m'aiment prendront le rail !

Le film se veut, si j’ai bien compris, une autofiction de la part de la réalisatrice, Valeria Bruni Tedeschi. Cette dernière a sûrement conçu avec ses deux co-scénaristes, dont Noémie Lvovsky, ce machin à partir de ses souvenirs d’étudiantes, dans les années 1980, du théâtre des Amandiers à Nanterre, dirigée par Patrice Chéreau.


Je ne connais ce Monsieur que par l’intermédiaire de sa carrière cinématographique et je confesse ne pas avoir une admiration immense pour lui. Je trouve qu’il se complaisait un peu trop dans l’atrabilaire et surtout dans l’hystérie. Ce qui me saoule principalement dans ses films, c’est que ses personnages sont incapables de discuter cinq secondes sans que ça parte dans un pugilat physique et verbal. Chéreau au cinéma, c’est hystérique du début jusqu’à la fin. J’avais au moins l’espoir, en visionnant ce truc, de pouvoir comprendre pourquoi il était considéré comme grandiose au théâtre, qu’il était considéré comme un metteur en scène hors pair, sachant tirer le meilleur du meilleur de ses comédiens et comédiennes.


Eh ben, pas du tout, c’était un type qui s’enfilait des sachets de sucre dans les narines les trois quarts du temps. Ce qui lui grillait trop les neurones pour avoir la capacité d’exercer convenablement la tâche pour laquelle les impôts des contribuables le payaient (oui, c’est un Centre dramatique national et pas une institution privée !), dissimulant sa médiocrité en s’énervant contre tout le monde, incapable d’assumer ses responsabilités en ce qui concerne le fiasco de la direction d’une pièce de Tchekhov et le fait d’avoir engagé des brêles pour la jouer (au passage, en mode "je m'en bats les couilles !", ça ne s’étend pas réellement sur les répétitions pour que le spectateur ou la spectatrice puisse voir les progrès réalisés ou plutôt non réalisés, puisse voir avec un minimum de profondeur la méthode Chéreau, avec ses défauts et ses peut-être quelques qualités, puisse voir ses relations, positives ou non, avec ses comédiens et comédiennes !). Ah ouais, et on le voit embrasser de force un de ses étudiants… moment qui est censé être comique ou, du moins, amusant (comme les autres exemples déplorables que je vais mentionner plus loin dans cette critique !) du point de vue de la réalisatrice... yeah… Alors que peut-être Chéreau était un artiste de théâtre ainsi que d’opéra extrêmement talentueux (je ne me prononcerai pas sur ce sujet puisque je n’ai jamais vu ou assisté à la moindre de ses créations sur scène !), mais ce n’est pas l’image qui est donnée de lui dans Les Amandiers.


Et pour les brêles… euh, je veux dire les étudiants. Euh, ils sont incapables de jouer (ouais, les contribuables-spectateurs nanterriens, ayant vécu dans les années 1980, seront certainement heureux de savoir que leurs impôts ont possiblement contribué à payer un voyage à New York à ce type de nullos !). Ils sont incapables de bien se comporter dans la vie de tous les jours, de se calmer un seul putain d’instant (et tout le monde a l’air de trouver ça normal, comme si on était sur une autre planète !). Ils ont plus leur place dans un asile que sur une scène. D’accord, je veux bien que jeunesse se passe, etc., etc. Ils ont besoin de sensations fortes, d’une bonne dose d’adrénaline constante. Et puis, quand on suit l’existence d’une bande de brêles qui ne pensent qu'à se shooter ou qu'à niquer (tout le monde baise avec tout le monde !), qui n'ont pas l'air d'en avoir grand-chose à foutre de leur rôle sur les planches, il est inévitable qu’ils plongent la tête la première dans des situations connes (genre, s’en prendre à la fenêtre d’une pauvre caravane n’ayant rien demandé !) ; ce qui veut dire que ça peut donner le sujet d’un ensemble au ton comique, à un regard mêlé d’ironie et de tendresse, poussant à se foutre (avec affection !) de la gueule de ces branquignols. Ainsi, le spectateur ou la spectatrice aurait envie de s’y attacher malgré tout. Eh ben, pas du tout.


Ça se prend désespérément au sérieux. En conséquence, on est obligé de prendre au sérieux des cons hors concours, des champions du monde. Et quand le tout s’essaye à être plus léger (c’est-à-dire quand les personnages ont l’air d’être réjouis !), ben, c’est uniquement quand il ne le faudrait pas. Oh, mon Dieu, untel a attrapé le sida… oh, oh, oh, lol, trop marrant… Oh, le metteur en scène (pas Chéreau, l’autre… Pierre Romans, le directeur de l’école !) s’est tellement défoncé avant une répétition qu’il en est devenu inconscient… Une de ses élèves en profite pour le tripoter devant les autres, amusés… oh, oh, oh, les attouchements non consentis, c’est trop rigolo… Griller à toute vitesse les feux rouges au risque de tuer des innocents, je suis plié de rire, mes côtes n’en peuvent plus, mdr… Pfff, c’est du mauvais goût, c’est de l’indécence, c'est malsain, c'est toxique. Je ne suis pas contre le fait de montrer tout ça. Ce n'est pas du tout le problème ici, que je me fasse bien comprendre. Le problème, c'est que ça expose ces comportements comme s'ils étaient acceptables alors qu'ils ne le sont pas du tout.


Les protagonistes m’ont tellement énervé que j’aurais bien voulu qu’une météorite géante, sortie de nulle part, leur tombe sur la gueule.


D’ailleurs, quand l’un d’eux meurt de sa toxicomanie (Le fiancé de l’autre bêtasse... ouais, mais c'est un pauvre écorché vif méritant notre compassion et pas du tout un connard insupportable et nocif... oui, donc le fiancé de la bêtasse, servant de personnage principal. Euh, ouais, il faut préciser que le fil conducteur prédominant est celui de la bêtasse et de l' "écorché vif" qui vivent ensemble une “romance” se résumant juste à s’engueuler ou à avoir des réactions physiques violentes. Bien évidemment, on est supposé(e)s ressentir de la tristesse face à une aussi belle et tragique "histoire d'amour" !)... euh, bref, où en étais-je ? Ah oui, quand l'autre connard insupportable et nocif crève, je ne me suis pas dit un “ouin !” de tristesse, mais un “enfin, putain !” de soulagement.


J’ai rarement vu des personnages aussi haïssables alors qu’on est censé sympathiser avec eux un minimum, partager leurs émotions, saisir leurs motifs.


Et le cabotinage atroce des acteurs et des actrices (en plus dénué(e)s de la moindre once de charisme, même, sur ce coup, Nadia Tereszkiewicz !), à qui Valeria Bruni Tedeschi a dû donner comme consigne d’en faire des gigatonnes, n’arrange absolument rien à l’affaire.


Dernier clou dans le cercueil, le récit s’éparpille dans de multiples sous-intrigues sans jamais rien approfondir.


Et l’amour du théâtre ? Du cinéma ? De l’art en général dans tout ça ? Ben, il peut aller se faire foutre bien profond.

Plume231
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le 17 nov. 2022

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