Film notamment sur une amoureuse au syndrome d'infirmière pensant guérir un toxicomane.

...mais aussi sur tous nos fantômes du passé , ces morts de notre jeunesse avec lesquels certains vivent encore , voire leur parlent, comme ici lors de la très belle idée de scène finale à la Aventure de Mme Muir, qui dialogue aussi avec son fantôme.

Mon texte n'est pas une critique mais juste quelques remarques en vrac sur ce film français honteusement censuré en 2022 alors qu'on est en France: condamnation qui n'avait déclenché en fait que peu de réactions et scandale:

"J'ai peur.", comme dit un personnage.
"Quand je me suis réveillée, j'étais comme avant. Et aussi plus jamais comme avant."

J'en ai payé sa location sur ma box Orange comme geste de soutien car je fais partie des rares furieux (fu-rieux) qu'un film soit retiré des écrans dans certaines salles de cinéma l'an dernier...sans que ça ne déclenche scandale et débat national comme ça le devrait! Nous ne sommes pas au Pakistan ou Russie, et un film censuré dans des salles de cinéma en France en 2022 devrait déclencher des émeutes, au moins dans les rédactions. On m'a hélas en revanche plus parlé de la santé des putains de pieds et chevilles du joueur de foot Neymar que de cette censure d'un film dans mon pays! Sommes-nous devenus tant amorphes?

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Reste que cette quasi crise psychotique visuelle, surtout au début, qui se veut film, m'a pour l'instant très déçu.

Je le reverrai comme je tente de le faire pour tous les films.

Je n'en suis bien sûr pas expert mais je ne vois hélas pas beaucoup de cinéma dans ce film.

Peut-être trop de plans rapprochés (pas "trop de notes"...car j'en ai aimées les musiques; notamment le hyper bien placé titre 'Wolf Hunt' juste au moment où un personnage prédateur est filmé en chasse...). Un per-so-nna-ge.

Pire, les rares plans larges sont souvent sur le théâtre des Amandiers vu de haut et loin...un de plus , un de trop, que j'en ai arrêté un instant le film. (Même si ce plan me rappelle les aussi trop nombreux plans extérieurs sur l'opéra dans ...Tenet, dont on ne fait pas de reproches à Nolan).

Je n'ai pas d'antipathie ou a-priori négatif sur sa réalisatrice Valéria Bruni Tedeschi dont j'ai aimé beaucoup de rôles (Asphalte, Ma Loute etc. ) et de réalisations (Estivants, Gens normaux etc.).

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Ma scène préférée est quand elles se découvrent "Cas contacts"! En lien avec le patient zéro de leur mini groupe.

J'ai préféré toutes la deuxième heure du film, surtout à partir de 1h10 et sa scène des toilettes qui m'a réveillé le cerveau: des femmes en cercle dans des sanitaires couverts de mosaïque bleue tentent de rassurer l'une d'entre elle convaincue d'avoir attrapé le SIDA...comme Woody Allen et son hypocondrie, la malheureuse se tâte le cou, convaincue de déjà sentir des bubons.

Mais soudain, ce qui gonfle, ce ne sont pas ses ganglions lymphatiques à elle, mais la peur chez les autres car en deux/trois phrases, elles découvrent toutes que le mistigri du SIDA peut leur tomber dessus...même si le SIDA ne s'attrape pas par les poignées de mains, elles découvrent soudain toutes, toute la théorie des six degrés de séparation qu'on a avec une star: ce pompon ici étant le SIDA.

Un instant avant, elles tentaient de rassurer celle qui a couché avec un porteur mais elles se découvrent toutes "cas contact" par les partenaires qu'elles ont eues car ils (s)ont directement ou indirectement un lien sexuel (quasi le seul qui compte) avec le patient zéro de leur petit groupe.

Sur le fond, pas la forme, pas-la-forme, cette scène (ma préférée du film) me rappelle 'Le messager' de Losey avec des touches de 'The Thing' de Carpenter: car elles ne savent pas qui d'entre elles portent l'alien SIDA, qui a donné le SIDA, qui leur a transmis le SIDA.

Je trouve que la réalisatrice et ses scénaristes ont très réussi à représenter la panique naïve et terreur de cette épée de Damoclés.

Cette scène de ces passagères du vaisseau Amandiers, filmées au dessus de la ceinture , quasi autour de leur collègue se plaignant de grosseur au cou, m'a soudain rappelé les aussi demis corps aussi autour de John Hurt dans l'Alien de Ridley Scott: le SIDA est le troisième passager clandestin des couples qu'elles formaient.

Scène importante quand on traverse une période où on ose se plaindre du COVID et du réseau de cas contacts...la scène où le Xénomorphe explose le bide de John Hurt , résonne avec cette fille ici aux grosseurs au cou, qui explose la tranquillité de ces femmes , soudain dé-vo-rées par l'anxiété.

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Mes scènes très décevantes me sont pour l'instant plus nombreuses: tous les "(bientôt) je vais coucher avec toi"(soudain susurré au cou par derrière); les soudain "j'aime ta bouche", les "embrasse moi ou je saute"(du balcon)..."C'est normal de toucher la chatte de MA femme?(...)oh oh oh touche pas à MA femme"(sic) ...rappelant les pénibles, 'oh oh oh-comment-ti-parles-à-ma-soeur?' et autres combats de gorilles poilus à dos argenté se battant pour femelles...

__La scène de sexe en confessionnal dans l'église n'est pas drôle en ces temps où depuis longtemps des terroristes font littéralement caca dans des églises et que tout le monde s'en fiche.

___La scène de happy ride et conduite en voiture à toute berzingue sous emprise avec grillage de feux rouges. Un jour surnommée 'une Palmade'?

___Ils savent pas fumer et crapotent comme des ados. (un des acteurs de dos, se bouche même le nez)

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Une scène utile et passionnante est celle de la sorte d'exercice de style: une intrusion dans une lecture de texte...

3 acteurs lisent un passage,

les 3 suivants lisent le même passage, et la différence saute aux yeux/oreilles et aux émotions de même un béotien comme moi. C'est très émouvant de voir un hommage et défense du travail de saltimbanques et intermittents comme ça dans cette courte scène.

J'ai enfin compris à cette scène les justes compliments que reçoit Nadia Tereszkiewicz (à parfois tête de Courtney Love).

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J'ai mieux aimé les scènes à la fin en coulisses de la représentation après que la troupe soit frappée de deuil. Genre "the show must go on"(mais ici en plus intello). Elle rappelle aussi tous les artistes racontant monter sur scène après des horreurs personnelles: comme par exemple Michel Serrault après le décès de sa fille; Baptiste Lecaplain le racontant à la fin de la captation de son spectacle Origines. etc.

Entre autres détails, je ne sais d'ailleurs pas pourquoi lors de cette scène de théâtre finale, un des personnages proposant une partie d'échecs a des cigarettes enfoncées dans les oreilles...peut-être une didascalie de Tchekhov que j'ignore encore.

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Les trois acteurs principaux n'ont pas été ceux que j'ai préférés; mes yeux et oreilles allaient surtout à des 'secondaires' dont je suis allé chercher les noms après:

Suzanne Lindon: celle qui s'infiltre comme serveuse dans le théâtre et l'école après avoir raté l'entrée...elle a des airs et surtout même talents et aura de Romains Duris en perruque.

Vassili Schneider: celui qui ne sait pas marcher car si on regarde bien, on le voit tomber lors de la scène à New-York avec le pont en second plan; avec sa tête de Patricien Romain et ses gros yeux, et menton en galoche, il semble un mélange de la tortue chantante et d'un Romeo...il est extrêmement télégénique. Un voleur de scènes. S'il se muscle un peu, je le verrai bien dans une adaptation des BDs Alix du dessinateur Jacques Martin.

Clara Bretheau: celle qui prévient son amie qu'un cogneur un jour, est cogneur toujours (elle le fait en d'autres mots lors de la scène dans le métro) a des airs de la précog dans Minority Report, Samantha Morton, et de l'actrice autrice Anglaise géniale, Vicki Pepperdine.

Elle tente de prévenir son ami que le toxicomane violent ne changera pas: mais sa copine pense le réformer, le changer...je crois que c'est le syndrome de l'infirmière.


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_Un très court plan est ma-gni-fi-que (à 1h45) et m'a rappelé mes années de lycée ...et soudain fait voyager aussi dans mes années après le bac: c'est la toute courte scène toute simple mais vrai tableau...et scène de théâtre...dans le réfectoire de l'école à la fin où ils sont tous réunis après une mauvaise nouvelle...la lumière vient de droite...les couleurs sont celles d'un tableau par Edward Hopper

_C'est au même endroit où plus tôt dans le film, les deux amies sont filmées façon Bergman (ou sketch des Inconnus des filles à la fenêtre...), regardant à droite par la fenêtre qui éclaire leurs visages...l'une posant sa tête sur l'épaule de l'autre: "J'ai peur".


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Un effet de montage (volontaire ou pas) m'a fait 'ricaner'(sic), il est malin et bien vu, si volontaire: un personnage (excellente Clara Bretheau, ma Samantha Morton française) est ravie que sa copine a un enfant et lui fait un tableau idéalisé de ce que sera ce fils "dans 40 ans" (genre une aide, une oreille, un pilier, aimant et spirituel...). Mais cette scène et son enthousiasme sont suivis/immédiatement coupés, par un plan sur le personnage du film le plus macho...le plus agressif, qui engueule dans le métro devant tout le monde sa petite amie...on découvre qu'il la houspille avec un culot monstre puisque c'est lui qui a volé ce qu'elle cherche...on repassera donc sur le "garçon grand beau plein d'esprit protecteur"...portrait idéal que faisait juste avant Clara Bretheau.

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En musiques, parfois à de bons moments et en liaison avec la scène, le film me fait découvrir, entre autres:

___"Guardia Che Luna" (Fred Buscaglione): qui sauf erreur, si je lis bien internet, peut être compris comme allusion à une amoureuse, folle d'amour, et qui reste la seule à se souvenir d'un disparu? (comme celle dont c'est le visage à l'écran quand ce titre commence?)

J'ai revu le film et c'est la scène finale où elle joue le rêve éveillé de ce dialogue avec le disparu...j'adore les rêves éveillés. Elle parle et voit son fantôme comme Gene Tierney voit Rex Harrison dans L'aventure de Mme Muir.

__"O Cessate Di Piagarmi" (Alessandro Scarlatti): air de l'opéra Il Pompeo (sur Pompée dit « le Grand »? militaire au service de dictateur.)...air qui commence justement au moment où la tête de fou du metteur en scène est à l'écran. Il est joué par Louis Garrel (soi-disant Patrice Cherreau; qui justement disait plus tôt à la troupe "je ne serai pas démocratique"; ...et ordonnait à un élève "embrasse moi")...titre qu'on entend au moment où enfin sa pièce se joue, il vient de pousser sur scène son actrice et l'accompagner du bras appuyé sur l'épaule...Je trouve alors à Garrel la tête de Jack Nicholson dans le labyrinthe à la fin de Shining, avec son regard par en dessous...

___et je découvre surtout "Wolf Hunt" (Vladimir Vysotsky) dont le titre commence juste quand un lourdaud tente de manipuler une jeune agnelle sur un balcon (l'actrice a deux gros yeux de jeune brebis...); le mâle alors au yeux de loup à ce moment là, lui a parlé de "sa bouche"(si bien soignée car elle a été riche toute sa vie?! ), lui a susurré le jour d'admission que maintenant qu'ils sont dans le même cours, il va "coucher avec elle" ...

je découvre sur le net que la chanson est plus sur la vulnérabilité "des loups qui ne sont pas à égal avec les chasseurs" ??!! ...d'où l'exercice qui suite cette scène de balcon (est ce un balcon pour faire allusion à Roméo et Juliette? ...Juliette et un Romeo psycho, car menaçant de se pendre au ...balcon: "j'aime pas les chantages"dit elle==>le maladroit de répondre "c'est pas une menace, c'est une déclaration"...commence alors le titre Wolf Hunt...

...qui se poursuit dans la scène d'exercice entre acteurs, que bien sûr je ne connaissais pas...où un des acteurs joue le loup, entouré de chasseurs qui lui en veulent..."ils m'ont entouré, ils m'ont entouré mais ils ont rien"??...c'est la scène où le normalement gentil Vassili Schneider a l'air d'un tueur en série.

Je découvre que c'est une chanson de 1968 qui a marqué l'histoire russe? ...qu'ont adoré les citoyens soviétiques?

Et ironie du sort pour un film Français censuré en France , je découvre que le chanteur d'une des chansons utilisées, avait été censuré par la racaille communiste intégriste?

Ce Vladimir Vyssotski a donc été harcelé et censuré.

Et c'est ce film qui utilise une de ses chansons, que des petits managers sans courage de cinéma ont décidé de censurer en 2022: managers à colonne vertébrale faite de bave cédant aux cris d'orfraie de chouineurs sans éthique jugeant sans procès et donc retirant un film...

Retirer un film quand un acteur est accusé serait un standard qui fera(it) des dégâts si appliqué de partout, à d'autres films et d'autres oeuvres: par exemple, Maigret de Leconte distribué par SND aurait donc dû aussi être retiré des écrans?... etc.

Ce titre Wolf Hunt de ce Vladimir Vyssotski ("Marié à Marina Vlady"?) commence sur le visage du personnage Étienne aux yeux de loup, en train de chasser la donzelle, puis continue sur les acteurs en exercice où ils jouent le loup et les chasseurs.

Mais je découvre que ce Vladimir Vyssotski est mort plutôt jeune, rageait de son manque de reconnaissance et s'est battu contre des addictions...comme justement ce personnage Etienne; est-ce à dire que la réalisatrice associe cet Etienne à ce chanteur compositeur acteur Vladimir Vyssotski? En commençant une de ses chansons sur son visage?

(Internet me dit qu' "un million de personnes étaient à son enterrement", à lui...)

PierreAmo
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le 25 mars 2023

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PierreAmo

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