Leave No Trace est la parfaite représentation de ce cinéma indé US naturaliste et social qu'on voit apparaître chaque année. C'est un peu ce qui fera sa limite surtout qu'il passe après le récent Captain Fantastic dont il possède beaucoup de similitudes. Malgré tout, Debra Granik va y apporter une approche un peu différente et un regard assez actuel sur la situation d'un pays et ses hommes hanté par leurs démons. De prime abord, et dans ses grandes largeurs, il n'y aura que peu de surprises ou de nouveautés dans ce film que ce soit à l'échelle du 7e Art mais aussi à celui du cinéma de Granik qui ne bouscule pas vraiment ses codes. Pour autant, Leave No Trace recèle de belles fulgurances qui serait honteux de sous-estimer.


L'écriture s'impose grâce à une belle finesse qui va construire une relation touchante entre un père et sa fille qui se montrera aussi fusionnelle que complexe. Victime des démons de son père, Tom est une fille intelligente et débrouillarde qui accepte de vivre dans sa désillusion faute de connaître quelque chose de mieux. Mené en 3 actes, la narration nous montre de prime abord leur routine, avant d'explorer la rupture puis nous conduire à un dernier tiers sous forme de détérioration de leur façon de vivre mais aussi du lien qui les unit. Au-delà de la simple exploration de la façon de vivre survivaliste, le film dresse surtout un portrait saisissant sur les ravages du PTSD en suivant ce père tellement déconnecté de la réalité qu'il en est incapable de vivre sans être en marge de la société. L'ensemble en est d'autant plus poignant lorsque cela affecte aussi la vie de sa fille qui finit par rêver d'une autre alternative. En ça, le déroulé se fera plus prévisible, notamment dans les rencontres que feront les personnages et dans les étapes de leur voyage. On retombe assez vite dans les travers du cinéma indé et le film s'avère convenu dans ce qu'il finit par proposer même si il apporte de jolis moments de grâce, notamment une conclusion pleine de beauté qui saura mettre la larme à l’œil.


Mais le film vaut surtout pour son casting, et si tout le monde font un job irréprochable, c'est vraiment le duo principal qui émeut et décroche le plus souvent la mâchoire. Ben Foster à l'occasion de briller dans un de ses rares premiers rôles, prouvant qu'il est bien un des acteurs les plus sous-estimé de sa génération. Il offre une performance poignante, toute en retenue qui sidère par sa justesse. Thomasin McKenzie est loin d'être en reste, se montrant brillante de bout en bout. Les deux acteurs possèdent une belle alchimie et offrent de grandes prestations. La réalisation technique se montre irréprochable, avec une photographie naturaliste du plus belle effet qui magnifie des décors de toute beauté. Même si la mise en scène de Debra Granik reste pour le moins classique et manque parfois de subtilité dans ses symboliques et se montre trop contemplative. L'ensemble reste quand même très maîtrisé et brille de savoir-faire mais reste un peu trop dans les clous du cinéma indé.


Leave No Trace est un beau film. Sensible, émouvant et juste quand à son portrait du PTSD, il s'impose par son intelligence et son savoir-faire. Même si il se montre prévisible et qu'il ne bouscule jamais vraiment le genre dans lequel il s'impose, il parvient à marquer des points et imposer sa réussite. Surtout grâce à un duo d'acteurs magistrale où Ben Foster et Thomasin McKenzie expose toute l'étendue de leur talent.

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le 30 sept. 2018

Critique lue 407 fois

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Flaw 70

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