Moi, à la base, je voulais me faire plaiz' en matant Le Trou, mais celui avec Katsumi, Bella Foxx et Benicio Del Zgegdetoro. À vrai dire ça commençait bien, l'univers carcéral était bien là, mais pas la moindre gonzesse en vue, ça a calmé mes ardeurs direct. Pourtant ça semblait ne pas en manquer, de hardeurs.


Décédé juste après le montage du film, Jacques Becker délègue avec Le Trou, sans doute son plus bel héritage. Ici, la Santé ce n'est pas le travail, mais bel et bien la prison, qu'il dépeint avec sincérité, avec de vrais détenus humains. L'humanité est sans doute ce qui ressort le mieux dans le film, avec ces cinq légendes solidaires qui s'accordent confiance pour fuir leur destin tragique.


L'attention donnée aux détails des préparatifs de l'évasion éclipse presque le jeu des acteurs pour donner au film une authenticité incroyable, presque documentaire.


Des p'tits trous, des p'tits trous, toujours des p'tits trous ♫


Le trou, c'est avant tout la prison que le cinéaste met parfaitement en scène avec ses détenus. Ces scènes d'entraides entre détenus pour passer diverses choses par la fenêtre, ou simplement le respect avec certains policiers - dont on retiendra la jouissive scène des plombiers - sont d'autant plus intéressants et folâtres, qu'elles renforcent notre immersion dans ce huis-clos carcéral.


Le trou, c'est surtout ce qu'ils creusent de leur cellule afin d'échapper à leur dessein. La réalisation est remarquable lors de cette préparation d'évasion, particulièrement lors des séquences de travaux quasiment en temps réel qui se mélangent à de courtes ellipses en fondus, ou encore avec ces fameux jeux de zooms fascinants dans le tunnel, véritables surprises esthétiques brutes.


Salué comme un chef d’œuvre par François Truffaut, l'ultime film de Jacques Becker a l'intelligence de mettre le spectateur sur la même longueur d'onde que les protagonistes. Nous découvrons et avançons en même temps que les personnages, pour une tension permanente, capable de tenir en haleine n'importe qui, même Woody ou Lily. Il n'y cas voir les moments avec la brosse à dent miroir, qui sont incroyables, jusqu'à l'apogée avec ce final mythique. Puis cette réalisation est splendide par son approche naturaliste propre au cinéaste, avec ces cadres et gros plans serrés qui accentuent l'aspect étouffant de la cellule à l'instar de la proximité des personnages.


Plus qu'un simple film d'évasion, Le Trou, en plus de remettre en cause un univers sans en faire trop, est un film dramatique qui se démarque avec cette intrigue amoureuse et injuste sur Gaspard, ou encore cet humour rafraîchissant, propre au personnage de Géo, dont sa passion pour l'amour restera dans la mémoire, particulièrement lors de sa question sur les points noirs après l'acte.


Jean-Pierre Melville considérait le film comme étant le plus grand film français de tous les temps. Il est vrai que cette adaptation reste un modèle de mise en scène n'ayant pas pris une ride, dont le final résonne encore jusqu'à la fin du générique et bien plus encore, plus de 50 ans plus tard.


Ces hommes d'honneur dont les chemins se sont croisés, leurs amitiés ont formés les branches d'une étoile, et le bonheur complice est parfaitement retranscris. La scène quand le souffle de la liberté les caresse, lorsqu'ils ont la tête hors de la bouche d’égout, avec ce contre plan sur l'extérieur de la prison, est tout bonnement magistrale. Particulièrement lorsqu'elle est suivi par ce retour solidaire en cellule, avec ses gros plans sur chacun et le fameux «Ce soir, on est dehors».
Mais quand l'étoile prend la forme de celle de Judas, et que le sentiment de trahison estompe la joie, c'est également le spectateur qui doute et qui stresse. Puis ce dernier regard à travers la serrure, c'est le choc, c'est la surprise inattendue, c'est la perfection.


Finalement, j'ai beau m'être trompé de film, le résultat n'en demeure pas moins le même. Sauf que l'orgasme arriva au bout de 2h10, et non en trois minutes et quarante secondes.

Alex-La-Biche
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le 5 juil. 2015

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Alex La Biche

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