Y a-t-il quelquechose après la mort ?

J’avais vu le septième sceau pour la première fois, quand j’étais tout jeune (une dizaine d’années). Bizarrement mes parents m’avaient laissé regarder. Je dis bizarrement, parce qu’on ne me laissait pas regarder les films le soir, à l’époque, surtout pour un film « pour grands ». Mais je me souviens que j’avais insisté pour regarder, fasciné par le début et cette fameuse scène de la partie d’échecs entre le chevalier et la mort.
Je ne me souvenais plus trop de la continuité du récit, mais seulement de quelques flashs marquants et une impression magnifiée qui me faisait penser que le 7éme sceau était un chef d’œuvre absolu.
En fait, en le revoyant, tant d’années après, je dois réévaluer cette œuvre un petit cran en dessous de ce que je pensais. Néanmoins, c’est du costaud !


L’histoire est simple, un chevalier, Antonius Block (le charismatique Max Von Sydow) et son écuyer (Gunnar Björnstrand, très bien également) rentrent de croisades. En Suède, la peste fait rage. Sur une plage de galets, le chevalier croise la mort (impressionnant Bengt Ekerot, avec son masque blanc) qui vient le chercher, mais il lui propose une partie d’échecs. S’il l’emporte, il aura la vie sauve, sinon, il devra suivre la mort. Etant un bon joueur, il espère gagner et de toute manière, tant que la partie dure, il reste en sursis.
Il croisera ensuite sur sa route divers personnages, dont une troupe de saltimbanques, avec un jeune enfant, qui lui redonneront un peu de goût à la vie.


Ce qui frappe d’entrée, c’est que le traitement du noir et blanc, très contrasté, les éclairages expressionnistes et le jeu des acteurs donnent presque l’impression de voir un film muet de Murnau ou de Dreyer.
Ce qui est frappant également, c’est l’ambiance austère qui enveloppe le film. Bon évidemment, le thème principal du film est la mort, les interrogations sont : la vie a-t-elle un sens ? Dieu existe-t-il ? Si oui, pourquoi se tait-il ? Y a-t-il quelque chose après la mort ?
Le chevalier et son écuyer sont usés par les croisades, où régnait déjà la mort. En Suède, c’est encore la mort qui règne, avec la peste, les processions chrétiennes annonçant la fin du monde, les pseudo sorcières qu’on brûle au bûcher, les femmes égarées qu’on viole et qu’on tue, les saltimbanques qu’on pourrait tuer également juste pour se distraire … le tableau n’est pas gai.
Le chevalier est anxieux. Il aimerait croire en Dieu, mais ce qu’il voit autour de lui ne l’encourage guère à croire et lorsqu’il cherche désespérément dans le regard de la jeune sorcière agonisant sur son bûcher, un signe de l’existence de Dieu ou du Diable, il n’y voit que la peur de mourir de celle-ci. Quand il interroge la mort elle même, pour savoir ce qu'il y a après, elle lui avoue qu'elle ne sait pas.


Heureusement, pour contrecarrer toute cette noirceur, il y les jeunes saltimbanques, Jof (Nils Poppe) et Mia (la magnifique Bibi Andersson) qui représentent la vie, l’insouciance, la gaieté, l’altruisme, le rêve et l’art. Ce sont eux qui insufflent un souffle d’espoir et permettent à la pulsion de vie de triompher.


On peut reprocher au film une certaine âpreté et un soupçon de grandiloquence, par moments, mais il est esthétiquement très beau et le propos est profond. Bergman exposait ses angoisses métaphysiques et s'interrogeait sur le sens de son art avec style et élégance. Et je peux témoigner que certaines images restent gravées longtemps dans la mémoire ...

Roinron
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 25 févr. 2017

Critique lue 360 fois

15 j'aime

3 commentaires

Roinron

Écrit par

Critique lue 360 fois

15
3

D'autres avis sur Le Septième Sceau

Le Septième Sceau
DjeeVanCleef
10

S'il n'est pas trop tard, Ingmar

Ingmar, si tu m'entends, j'ai un truc à te dire. Ça ne prendra pas longtemps, j'ai cinq minutes et toi l’Éternité, alors n'aie crainte, je viens en ami. Du passé, faisons table arabe ! Je viens pour...

le 4 sept. 2013

118 j'aime

19

Le Septième Sceau
pphf
10

Et maintenant, l'apocalypse

« Quand l’agneau ouvrit le septième sceau, un grand silence envahit la terre ». Après le passage des quatre cavaliers et leurs cortèges de misères, les guerres, les désastres naturels, la peste,...

Par

le 16 mai 2014

87 j'aime

9

Le Septième Sceau
Grimault_
9

Sceau vers l'au-delà

Le Septième Sceau d’Ingmar Bergman est un incontournable pour beaucoup de cinéphiles, car il fait partie de ces films qui assurent au spectateur un vertige enivrant, assailli de questions...

le 16 juil. 2018

77 j'aime

8

Du même critique

Call Me by Your Name
Roinron
6

Une pêche un peu fade, qui m'a laissé sur ma faim

Quelle déception ! J’avais entendu tellement de bien de ce film que je m’attendais à passer un grand moment. Hélas, il ne m’a pas fait vibrer. Je l’ai même trouvé plutôt fade, lent, presque ennuyeux...

le 14 mars 2018

34 j'aime

114

Une pluie sans fin
Roinron
5

Memories of China

Fortement inspiré de Memories of murder (meurtres en série dans une province reculée, pluie incessante, faux coupable tabassé, vrai coupable non identifiable, background socio-politique) ce premier...

le 27 juil. 2018

28 j'aime

23

I Am Not a Witch
Roinron
7

Ma sorcière mal aimée

Vous connaissez la Zambie ? Et le cinéma zambien ? Personnellement je ne connais de la Zambie que les chutes Victoria, à la frontière avec le Zimbabwe, et encore uniquement par le biais d’un...

le 2 janv. 2018

21 j'aime

6