A l’aube d’un nouveau millénaire, il existe un homme sortit de nulle part qui a changé le septième art à tout jamais. Cet homme, au passé filmographique injustement méconnu qui a appris le métier à la dure de film en film, démarrant avec un long-métrage amateur pour parvenir jusqu’à un projet commun avec Steven Spielberg sur une adaptation cinématographique de Tintin, celui qui était capable de rendre une amitié dérangeante belle et poétique et de rendre un film de mort-vivant kitsch et tordant.


Le projet remonte à un projet de négociation, entre J.R.R Tolkien l’auteur des romans sur la terre du milieu et les Beatles, qui n’a pas abouti. Après que Tolkien ait vendu les droits au studio United Artists, il faudra pourtant attendre plus de 30 ans avant qu’une adaptation live soit mise en chantier. Peter Jackson, qui ressortait de Fantômes contre Fantômes juste avant, s’était déjà intéressé au projet dés 1995 et même bien avant grâce au film d’animation de Ralph Bakshi de 1978. Il faudra attendre que Jackson passe un accord avec New Lines Cinema après un désaccord rencontré avec Miramax Films. Une trilogie de film est alors mis en chantier, chacun étant tourné au même moment avec énormément d’intensité pour le cinéaste comme pour l’équipe de tournage et le casting, sans parler des scènes rajoutées dans la version longue des 3 films et de nombreuses réécritures du scénario.


En voyant la chose sous cet angle, il n’aurait pas été surprenant d’envisager un échec cuisant pour cette trilogie que personne n’attendait à la base. Heureusement à notre grand bonheur, et dés ce premier film on remarque rapidement une chose : c’est que Peter Jackson est parvenu à avoir une idée très précise de ce qu’il voulait raconter malgré toutes les difficultés rencontrer et qu’il a su instaurer sa démesure ahurissante et retranscrire l’ambition herculéenne du projet toujours aussi forte aujourd’hui après plus de 15 ans d’existence.


L’introduction en elle-même est un exquis avant goût de tout ce qui s’ensuivra pour la suite : une terre vaste et énorme, l’anneau de pouvoir, un seigneur des ténèbres, une lignée maudite, la présentation du psychiquement détruit Gollum, cette très chère Cate Blanchett en Galadriel narrant les antiques histoires avec une musique prophétique exagérément mais savoureusement dramatique signée Howard Shore qui se lâche avec les chœurs pour bien nous faire comprendre que quelque chose de grave ou de dangereux va se produire. On donne le ton dés les premières minutes : on veut préparer le spectateur à une épopée capable de s’étendre et d’emporter son public. La photo est sublime et alléchante, les costumes magnifiques, le maquillage bluffant et les CGI très bien utilisés aussi bien pendant les combats qu'en dehors, surtout en comparant avec des productions plus récentes moins maîtrisées à ce niveau.


L’arrivée dans le village des hobbits change le ton le temps d’introduire ses personnages, nous transportant davantage sur la terre du milieu en découvrant un village de petit homme entièrement en décors réels, procédé qu’il reprendra très souvent en mixant très adroitement les fonds verts pour chaque nouvel environnement ou royaume que découvrira plus tard la communauté. En passant par la tour d’Isengard de Saroumane le blanc terriblement sinistre et inquiétant, les mines et tombeaux de la Moria conservant les restes d’une armée de nain et de l’ancêtre de Gimbli ou encore le royaume des elfes de Fondcombe foutrement lumineux et sacrée de sa mère. Même les plans d’hélicoptère sur les terres de la Nouvelle-Zélande ou l’on suit nos 9 compagnons emportent finissent par nous emporter, la caméra n’étant jamais simplement posé pour filmer fixement ou platement un décor ou la nature de cet univers infiniment grand et étendu. Les décors réels priment autant que possible sur les effets à l'ordinateur, sauf lorsque le recours est nécessaire. A ce jeu là, on comparera inévitablement avec les deux premiers film de la prélogie Star Wars bien moins adroit avec cette technologie.


Peter Jackson n’en oublie pas néanmoins de présenter ses personnages, la culture des peuples (les hobbits et les elfes en deviennent des êtres fascinant chacun à leur manière) ainsi que l’histoire de la terre du milieu en y insufflant de l’enjeu. En se calmant sur la démesure pour laisser vivre ses protagonistes, notamment lors des dialogues ou d’une dose d'humour pour détendre l’ambiance lorsque la tension grimpe. Et il sait quand faire une pause dans le récit pour souffler un peu avec les protagonistes.


D’ailleurs parlons-en des personnages : comment citer la saga sans parler ne serait-ce que l’un d’entre eux ? Quasiment tout le monde a au moins un personnage à apprécier, aucun n’étant entièrement lisse ou unidimensionnel : Frodon Saquet le jeune Hobbit fils d’un auteur et ancien aventurier qui a malgré lui le destin de la terre du milieu entre les mains, Gandalf le gris le magicien sage cultivé et bienveillant joué par un Ian McKellen débordant de prestance, Aragorn le dernier descendant d’Isildur voulant fuir la malédiction de sa lignée dont Viggo Mortensen déborde de charisme à chaque instant, Legolas l’elfe archer avec un Orlando Bloom en pleine cabriole acrobatique, Gimli le nain fier, le bad guy de la saga Sauron dont la présence se ressent constamment depuis le prologue, Sam l’ami fidèle de Frodon ou encore le duo comique tout aussi attachant Merry et Pippin sans parler de Boromir, Galadriel ou le seigneur Elrond.


Certains sont plus simple de caractère mais sont correctement installé pour jouer leur rôle sur le long terme en 3 films, même une love interest comme Arwen développant une romance avec Aragorn inspire de la sympathie par les conséquences de son union. Moins manichéen qu'on ne le pense en plus lorsqu'on voit les effets de l'anneau de pouvoir portée par Frodon, Boromir en particulier sans parler du fardeau d'Aragorn.


Enfin, impossible de ne pas parler de l’avalanche d’émotion et de la bourrasque épique qui souffle le spectateur en près de 3 heures. On insiste en une scène (simple, efficace, courte et sombre) en quoi les Nazgul sont une menace impossible à tuer, on insiste aussi bien sur le visuel que sur la forme pour nous présenter un clan d’Elfe comme divin et sacrée qu’est celle de la forêt de Lothlorien et surtout on montre qu’on a des burnes en faisant crever (enfin, c’est ce qu’on a tous cru à mon avis) Gandalf après le cultissime :



Vous ne passerez pas !



Et en donnant une fin héroïque à un Boromir aussi humain et vulnérable qu’il nous sera sympathique, avec des ralentis parce que ça va avec le délire de Jackson.


On n’imaginait pas d’ailleurs que Peter Jackson était doué pour filmer des scènes d’actions et les combats à courte distance et fait preuve d’une vraie maîtrise dans le montage et le filmage : la caméra à épaule ne donnant jamais le vertige et restant en mouvement pour faire vivre une action ou une séquence lorsque cela l’exige comme la fuite dans les bois d’Arwen face aux Nazgul. Le bonhomme avait déjà expérimenté avec le climax ridiculement gore et tordant de Braindead et il aura l’occasion de remettre ça par la suite.


Impossible aussi de faire l’impasse sur les thèmes musicaux d’Howard Shore. Etant pourtant un bel inconnu du public lui aussi, le partenaire de Cronenberg ne se prive pas pour libérer la force des chœurs lorsque la menace plane, battre la cadence lors des morceaux guerriers se manifestent ou faire pleurer son spectateur quand un drame intervient pour nos héros. Je mets quiconque au défi de ne pas retenir un thème musical après le visionnage.


On pourra toujours reprocher un ou deux mouvements un peu plus fake qu’à l’époque par moment ou certains effets spéciaux un peu ancrée aussi dans le début des années 2000, mais dans l’ensemble c’est un divertissement à grand spectacle que le réalisateur du remake de King Kong parvient à nous livrer alors qu’on n’en est qu’au premier acte d’une saga. On sent du début à la fin un véritable investissement de la part de l’équipe aussi difficile furent les conditions de tournage. Ça en fait des tas ? Surement ! Trop vous seriez tentez de dire ? Surement, mais c’est pour ça que j’aime Peter Jackson : il fait quelque chose, il le fait à fond quitte à aller dans la démesure la plus magnifique qui soit.


Et pourtant, nous ne sommes qu’à l’aube de cette grande aventure qu’est la trilogie de Jackson, malgré le peu de mal que j'arrive à dire du premier volet.

Créée

le 11 avr. 2017

Critique lue 1.3K fois

26 j'aime

5 commentaires

Critique lue 1.3K fois

26
5

D'autres avis sur Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'anneau

Du même critique

Les Animaux fantastiques
Maxime_T__Freslon
5

Dans la continuité de ses prédécesseurs... mais pas pour le meilleur.

EDIT ! Y’avait autant de raison d’être enthousiaste et heureux de voir la saga sur le sorcier à lunette au cinéma que d’être inquiet et sceptique quand on voit la politique actuelle des studios...

le 18 nov. 2016

91 j'aime

15

Bohemian Rhapsody
Maxime_T__Freslon
4

God save the Queen !

Queen et le cinéma, c’est très loin de se limiter qu’à ce projet de biopic autour de son chanteur Freddy Mercury et de l’émergence du groupe au cours des années 70. La présence du groupe passe tant...

le 31 oct. 2018

82 j'aime

27

Blade Runner 2049
Maxime_T__Freslon
8

Loneliness and birth !

Dans la grande catégorie des suites tardives ou exploitation de licence qui n’ont pas été demandé, on peut trouver beaucoup de films qui ont vu le jour à l’aube de ce vingt-et unième siècle et...

le 4 oct. 2017

75 j'aime

4