Le Roi et Moi
6.6
Le Roi et Moi

Film de Walter Lang (1956)

Ce film m'a été conseillé par une élève, venue m'en parler à la fin des cours avec les yeux qui brillaient. J'ai noté le titre, l'année, et je l'ai oublié quelques semaines. Puis elle est revenue me voir, pour savoir si je l'avais regardé. Voilà qui m'a forcée à me lancer.


Dès les premières images, j'ai été séduite par les couleurs du film. Des couleurs très vives, très contrastées. Les costumes, les décors sont somptueux. Les chansons - car c'est un film musical (je ne dis pas comédie à dessein) - sont classiques et rappellent My Fair Lady ou Mary Poppins.


Outre l'aspect esthétique, ce film est notable par sa portée réflexive. C'est la rencontre entre un univers purement phallocratique et une professeure indépendante (veuve - les seules réellement libres, nous diraient les Romains) ; les interrogations se succèdent : sur l'amour, les relations homme-femme, l'éducation, la religion et la science, ce qui est permis ou non au nom de la culture. Cependant, toutes ces problématiques ne sont qu'esquissées, et les éléments de réponse sont davantage illustrés par le film qu'énoncés de la bouche des personnages. J'avoue que j'ai trouvé par moment que ce n'était pas suffisamment approfondi, et c'est cela qui me retient de mettre une note encore meilleure - cela et les ficelles - classiques, visibles, mais pas forcément déplaisantes - des productions hollywoodiennes.


Une scène notamment m'a intéressée, lorsqu' Anna conseille le roi sur ce qu'il convient de faire lors de la visite des ambassadeurs ; il lui est dit qu'il faut savoir "conseiller en donnant l'impression que c'est l'autre qui est à l'origine de l'idée" : c'est la définition exacte que m'avait donnée une traditionaliste sur la phrase de Paul "Femmes, soyez soumises à vos maris" ; ici, le roi n'est pas dupe, et comme tout au long du film il ne fait que conserver les apparences tout en s'appuyant sur sa conseillère - ce qui le met bien sûr hors de lui quand on le souligne.


C'est d'ailleurs pour cela que la fin me déplaît : Anna en restant au palais (elle n'aura jamais eu sa maison, d'ailleurs) devient une sorte d'esclave volontaire, et fournit sans cesse du pain à ses élèves au lieu de leur apprendre à en cuire : la fin, bien-pensante, contredit tous les principes féministes et éducatifs illustrés au fil du film.


La partie la plus extraordinaire à mon sens, celle à cause de laquelle je conseillerai ce film à tous, y compris ceux qui n'aiment pas particulièrement les films musicaux, est la représentation de théâtre thaï, adaptation dans le film de La Case de l'oncle Tom par la jeune maîtresse du roi Tuptim. C'est extraordinaire de clarté, de grâce et de fluidité.

LuiseDiLida
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le 21 juin 2017

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LuiseDiLida

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