Par le sabre et le verbe

De héros, il ne sera guère question. Le capitaine des hussards rouges Charles-Grégoire Neuville (Jean Dujardin) a promis d’épouser Pauline, la cadette des Beaugrand, mais a été contraint de rallier son régiment le jour des fiançailles. Depuis, il n’a plus donné de nouvelles. La promise dépérit et, pour la sauver, sa sœur Élisabeth (Mélanie Laurent) se pique d’écrire à sa place. Elle écrit fort bien, se prend au jeu et, sous sa plume, Neuville se pare de mille couleurs, se muant en héros riche à millions... Elle le tue, afin que Pauline épouse un voisin.

Or, Neuville n’est point mort et n’est point un héros. Il a déserté à Essling et, depuis, clochardisé, se cache pour survivre. Il n’est plus rien... Sauf chez les Beaugrand où, il découvre, émerveillé, que le souvenir du héros a survécu. Il rendosse son rôle et contraint Élisabeth à l’aider : elle écrira, il déclamera. Le cavaleur fait frémir les dames et l’escroc fascine les hommes.

Laurent Tirard nous propose une reconstitution historique convaincante. Les références à Balzac sont nombreuses, mais le ton a tôt fait de virer à la parodie. On sur-joue, on crie, on rit... Si la mise en scène est laborieuse et les seconds rôles écrits à la va-vite, Dujardin est impérial, notamment dans un duel mémorable, puis dans une confrontation héroïque à La Horde Sauvage, réplique cosaque de celle jadis vaincue par Henri Fonda.

Les héros classiques brillaient sur le champ de bataille, ils y mouraient souvent. Seuls les personnages de fiction, d’Artagnan ou Cyrano, sont immortels. Jean Dujardin incarne une chimère, piètre guerrier mais fougueux orateur, qui captive son auditoire par la seule magie du verbe. Une création fragile, car suspendue au retour du réel...