Pour dominer la nature, apprends d'abord à lui obéir.

Cinq ans après la sortie de la production ambitieuse et coûteuse La guerre du feu et ayant obtenu le césar du meilleur réalisateur, Jean-Jacques Annaud avait suffisamment de quoi convaincre l’écrivain Umberto Eco d'adapter au cinéma son roman Le nom de la rose, livre qui a connu un succès mondial suite à sa vente en plusieurs millions d'exemplaires. Se lancer dans un tel projet pour une quatrième réalisation d’une carrière de réalisateur ne semble pas à première vue raisonnable mais Jean-Jacques Annaud avait bien montré sa réelle détermination à l’écrivain d’adapter son bouquin et apparemment, il savait ce qu’il faisait. Ce dernier avait un objectif précis à accomplir en tant que réalisateur, créer un film en générant un suspense particulier et il a jugé que Le nom de la rose était le long-métrage qu’il fallait créer pour atteindre son objectif.


Ce dernier avait à sa disposition une équipe de professionnels cinématographiques très bien placés dans le cadre de la réalisation de ce projet. Un producteur allemand fortuné, plusieurs scénaristes compétents et un monteur de décors italien, le réalisateur tenait une équipe qu'il allait satisfaire ses besoins. Il ne restait plus qu’à réunir le casting dans l'optique de représenter et d'animer principalement des moines et là, le réalisateur a connu quelques problèmes sur le choix des acteurs. Tout d’abord, le choix de Sean Connery n’a pas du tout été approuvé par quelques producteurs et en particulier par l’écrivain. L’acteur n’avait plus tourné une seule production depuis trois ans et sa dernière expérience avec Jamais plus jamais lui avait posé quelques problèmes avec la justice. C’est l’acteur lui-même qui a convaincu le metteur en scène qu’il était fait pour ce rôle et surtout, il avait vraiment besoin d’un vrai rôle qui lui permettait de relancer sa carrière.


Tout du coup, Sean Connery était obligé d’interpréter son rôle du mieux qu’il pouvait et on peut dire que sa participation a été glorieuse, il a reçu le British Académie Film Awards du meilleur acteur en 1988. En ce qui me concerne, Sean Connery interprète le moine inspecteur Guillaume de Baskerville avec beaucoup de tact et d’adresse, tout en conservant une image respectable de moine. Autre problème que le réalisateur a connu dans sa sélection d’acteurs, celui qui était censé interpréter le moine bossu Salvatore. Pour une question de contrat et pour un refus artistique, l’acteur sélectionné a refusé de camper ce rôle et Jean-Jacques Annaud a donc fait appel à Ron Perlman, acteur qui a campé un rôle dans sa précédente réalisation La guerre de feu.


Comme Sean, Ron est absolument convaincant dans son rôle de moine simple d’esprit et d’un physique repoussant. Le reste du casting est très acceptable avec des acteurs qui gèrent bien leurs rôles avec assurance comme Michael Lonsdale ou également Christian Slater en jeune moine accompagnateur et apprenti de Guillaume de Baskerville. Un casting satisfaisant dans l’ensemble, comme la maîtrise de la production prouvant tout à fait que le metteur en scène était l’homme de la situation. Tout d’abord, il gère un suspense très accrocheur tout en dégageant beaucoup de mystère dans une abbaye de moines très particulière, créant une ambiance sombre, cachottière et énigmatique. C’était bien la première fois que le cinéaste développait un film de genre policier mais pourtant, il ne donne pas l’impression d’être débutant dans ce domaine.


Surtout que se lancer dans un tel projet dans un environnement complexe comme une abbaye de moines n'est forcément pas une idée subtile de se plonger dans une enquête et de respecter les principes. Apparemment, cela n’a jamais été un obstacle pour le metteur en scène. Il gère comme un pro le milieu policier tout en structurant son scénario à la conformité de ce genre de production, en passant par les interrogatoires, les indices retrouvés et le sens de l’observation. De plus, il a su être entouré d’artistes ayant été capables de construire des décors de l’abbaye fabuleux et d’une beauté irréprochable. Le réalisateur aurait pu ne filmer que des plans beaux et magnétiques, tout en ajoutant une once d’ambiance horrifique, comme les plans larges de l’abbaye et de son environnement, avec un ciel sombre et nuageux.


On peut constater aussi une certaine finesse brillante dans le tournage de certaines scènes comme celles montrant une liaison de nombreuses pièces par des escaliers, un peu comme une sorte de labyrinthe. Sans omettre des répliques habiles et le sens du spectacle qui se fait sentir pendant tout le visionnage. Une simple et grande fresque très réussie, même si on regrette peut-être un manque de sérieux du christianisme, de la religion ou des activités des moines dans une abbaye comme je l’ai pu entendre. Si c’est le cas, on peut toujours considérer le film comme une parodie ou une satire mais cela ne change rien à sa qualité. 9/10



Les rats encore plus que les savants raffolent des parchemins.


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le 27 janv. 2019

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