Todd Haynes rate son adaptation du roman hybride (prose et illustration) de Brian Selznick, livrant un patchwork cinématographique laborieux aux ficelles narratives grossières.


Nous suivrons les deux histoires de deux enfants en parallèle : la quête paternelle de Ben en 1977, et la fuite de Rose en 1927 dans un monde en pleine transition entre le muet et le parlant. Chacun des deux se veut hommage au cinéma de l’époque, de l’image jaunie des seventies au noir et blanc dramatique qui marque le début du vingtième siècle. Les deux jeunes héros étant frappés de surdité, Todd Haynes semble vouloir accorder un soin particulier à la bande son pour retranscrire leurs points de vue.


Malheureusement, cela ne fonctionne pas. Wonderstruck est sans équivoque une curiosité, comme celles du cabinet de curiosités qui hante l’intrigue. Mais d’effets de style forcés en bons sentiments sans émotion, le film se vautre à un tel point qu’on se demande vraiment si c’est un final cut et non une version intermédiaire mal dégrossie qu’on nous présente en Compétition au Festival de Cannes. Les deux intrigues ne cessent de se répondre, sans aucune subtilité ; ne manque plus qu’une immense pancarte “regardez comme tout est lié dans ce film !”. La mise en scène, brouillonne, n’est sauvée que par ses décors qui abritent un peu de magie au sein d’un film qui semble parfois avoir été terminé à la hâte. Le noir et blanc trop propre et les artifices dramatiques à la limite de l’absurdité gâchent le traité “années 20” autrement intéressant lorsqu’il fait écho à la surdité de la jeune Rose.


Le pire dans Wonderstruck réside dans son récit qui, non content de nous balader deux heures pour révéler ce que nous savions déjà, prête à ses personnages des comportements incohérents, se perd en circonvolutions, et accumule les deus ex machina. “Comme par hasard !” nous dirons-nous bien trop souvent, avant de retomber dans l’ennui. On a envie que ça avance, parce qu’on a tout compris à la moitié du film, mais Wonderstruck s’enlise dans la pénibilité, sans réussir à créer de véritable enjeu ou d’affection envers ses héros, qui méritaient pourtant de nous émerveiller.

Filmosaure
3
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Vus au 70è Festival de Cannes (2017)

Créée

le 18 mai 2017

Critique lue 618 fois

2 j'aime

Filmosaure

Écrit par

Critique lue 618 fois

2

D'autres avis sur Le Musée des merveilles

Le Musée des merveilles
takeshi29
9

Todd Haynes, plus si loin du paradis

L'exemple parfait de ce que devrait être un film familial. Haletant, merveilleux (Le titre original ne ment pas), émouvant, intelligent, d'une inventivité formelle incroyable, "Le Musée des...

le 18 nov. 2017

34 j'aime

8

Le Musée des merveilles
Sergent_Pepper
5

Robinet de curiosités

Après Scorsese et son Hugo Cabret, c’est à Todd Haynes de céder aux charmes de l’écriture de Brian Selznick et son Wonderstruck, dans lequel on retrouve ce qui tapa dans l’œil du papy cinéphile : le...

le 19 mars 2018

20 j'aime

7

Le Musée des merveilles
Kiwi-
5

Wonder Oddity.

De tous les films de la sélection officielle du 70ème Festival de Cannes, « Le Musée des Merveilles » est bien l’un des seuls que l’on pouvait attendre d’emblée comme un futur classique. Après «...

le 5 juin 2017

17 j'aime

Du même critique

Boule & Bill
Filmosaure
1

Boule débile

Que ceux qui déclaraient d’emblée, sans même avoir vu le film, que l’on massacrait leur enfance à la scie sauteuse, se rassurent : ils avaient raison. Nous passerons outre le débat sur la médiocrité...

le 1 mars 2013

111 j'aime

51

Only God Forgives
Filmosaure
5

Critique de Only God Forgives par Filmosaure

Comme pour dissiper une confusion existant depuis le succès de Drive auprès du grand public, Nicolas Winding Refn revient avec Only God Forgives, un exercice hautement stylistique qui relève plus du...

le 22 mai 2013

86 j'aime

13

L'Odyssée de Pi
Filmosaure
9

Prière cinématographique

Ang Lee nous a montré au cours d’une filmographie hétérogène qu’il était capable du meilleur comme, si ce n’est du pire, tout au moins du médiocre (oui toi Hulk, je te regarde). L’on tend à retenir...

le 4 déc. 2012

74 j'aime

10