Chevaux de course et amitié virile

Si la course automobile passe bien à la télévision, elle n’a que rarement donné lieu à des films mémorables. Bâti sur le choc entre deux champions que tout opposait, le sage Lauda et l’incontrôlable Hunt, le récent Rush était une heureuse exception. Malgré un titre canadien racoleur et trompeur, Ford contre Ferrari, nous ne saurons que très peu de choses du challenger italien et de la Scuderia. Plus qu’un film sur la course, James Mangold magnifie l’amitié liant deux quadragénaires, Carroll Shelby (Matt Damon) et Ken Miles (Christian Bale).


Ancien pilote vainqueur du Mans 1959 sur Aston Martin, le texan Shelby a vu sa carrière brisée par des ennuis cardiaques et s’est reconverti dans la préparation de voitures de course, les mythiques Cobra et Ford Mustang. Pilote d’origine britannique, Miles est irascible, mécanicien de génie et, pour faire bonne mesure et élargir le public de notre blockbuster mécanique, (très) bon père de famille.


Henry Ford II règne sur une multinationale à la dérive. Ses grosses berlines plaisent moins. Un vice-président lui propose de gagner le Mans. Un petit constructeur britannique, Lola Cars, conçoit la GT40, qu’améliorera notre ami Shelby, jusqu’à la fameuse course du Mans 1966. Le scénario ne s’attarde pas sur le conflit Ford/Ferrari, mais sur la lutte implacable qui oppose Shelby à la machine Ford, à l’image Ford et à l’esprit d’équipe Ford.


Les précieux bolides de l’époque faisant les bons jours des musées, Mangold filme, avec talent, une trentaine de répliques. Il nous offre le meilleur du Mans en quelques dizaines de minutes, un cocktail bien dosé de dépassements, de lignes droites interminables, de pluie, de fatigue, de brouillard et d’accidents. Le véritable Mans, c’est très, très long.


Matt Damon et Christian Bale sont des stars. Leur complicité est manifeste. Damon vit la course à distance et craint pour son ami... Bale est un peu perché. Ces tirades sur la vitesse et les 7000 tours minutes rappellent les aphorismes creux de Livingston le Goéland de Richard Bach, l’auteur préféré de mon beau-frère, mais ceci est une autre histoire. Au final, c’est trop long et à réserver aux passionnés de grosses cylindrées. Le géant américain aura-t-il raison de l’artisan de Maranello ? C’est probable... Il n’y a pas de justice.


6,5

Créée

le 20 nov. 2019

Critique lue 2.1K fois

26 j'aime

Step de Boisse

Écrit par

Critique lue 2.1K fois

26

D'autres avis sur Le Mans 66

Le Mans 66
Sergent_Pepper
6

American Race

On ne peut pas dire qu’on n’est pas prévenus : un biopic sur une victoire américaine par Ford contre Ferrari n’impliquait pas vraiment un traitement dans la dentelle. Deux fausses pistes laissaient...

le 18 nov. 2019

66 j'aime

8

Le Mans 66
Maxime_T__Freslon
8

Plus qu'une voiture, plus qu'une course, plus qu'un biopic : une passion.

Il y a deux ans de cela, James Mangold faisait carton plein avec le phénomène super-héroïque de 2017 que l’on n’attendait pas autant après ses deux premiers spin-off : Logan, un film X-Men sur un...

le 9 nov. 2019

49 j'aime

1

Le Mans 66
Moizi
7

bouuum et des bangs en Ford Mustang

Agréablement surpris, je me rends compte que j'aime bien les films de bagnole, jour de tonnerre, rush et maintenant ça... D'ailleurs j'aime la tournure que prend le film, vu le titre original Ford v...

le 20 nov. 2019

46 j'aime

Du même critique

Gran Torino
SBoisse
10

Ma vie avec Clint

Clint est octogénaire. Je suis Clint depuis 1976. Ne souriez pas, notre langue, dont les puristes vantent l’inestimable précision, peut prêter à confusion. Je ne prétends pas être Clint, mais...

le 14 oct. 2016

125 j'aime

31

Mon voisin Totoro
SBoisse
10

Ame d’enfant et gros câlins

Je dois à Hayao Miyazaki mon passage à l’âge adulte. Il était temps, j’avais 35 ans. Ne vous méprenez pas, j’étais marié, père de famille et autonome financièrement. Seulement, ma vision du monde...

le 20 nov. 2017

123 j'aime

12