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La première chose à laquelle on pense au commencement de ce film, c'est que ça va être du Kore-Eda... et c'est le cas, mais pas vraiment.
Il est évidemment dans la lignée de Une affaire de famille qui parle de la misère sociale et Nobody knows qui traite de l'absence parentale. Mais ici Omori traite un aspect bien différent de son compère Kore-Eda.


On suit tout au long de ce film, le parcours de Shuhei, un garçon qui subit du début à la fin l'irresponsabilité de sa mère. La longueur des plans permet une immersion dans le quotidien du garçon et ce choix de laisser les scènes couler autant que nécessaire met en avant la réalité brute à laquelle il fait face. Les cadrages sont d'ailleurs extrêmement bien travaillés et arrivent à eux seuls à montrer l'attitude d'enfant irresponsable de la mère et le comportement mature et adulte du garçon. Mais c'est surtout dans les dialogues et le jeu des acteurs que beaucoup se joue et les deux sont incroyablement bons. On évite les dialogues pompeux, moralisateurs, ou explicatifs qui auraient juste été lourds et auraient gâchés ce réalisme apporté par la réalisation. Au lieu de ça, c'est surtout par le silence que Omori décide de transmettre l'émotion en optant pour des dialogues simples qui sont magnifiés par l'interprétation des excellents acteurs. Le montage est tout aussi bon avec des cuts qui frappent toujours juste pour nous faire ressentir la douleur du personnage à travers sa passivité face aux évènements.


Pendant son parcours Shuhei aura de nombreuses occasions de gagner sa liberté, d'abord en ayant la possibilité de vivre avec son père, ensuite de continuer l'école grâce à l'assistance sociale et enfin grâce à son travail. Mais tout son potentiel est systématiquement inhibé par sa mère. L'amour qu'il a pour elle l'empêche de la quitter ou de la contredire. Un sentiment que sa mère a aussi envers Ryo, un des hommes avec qui elle a couché. Malgré la violence, les tromperies et les abandons de ce dernier, la mère ne peut s'empêcher de vouloir son retour.


L'arrivée en prison de Shuhei est donc paradoxalement une libération de l'emprise que sa mère avait sur lui. Sa vie de nomade étant terminée, il peut enfin manger, lire et s'épanouir comme une personne "normale".


Chez Omori ce n'est donc plus la situation précaire (Une affaire de famille) ou l'absence parentale (Nobody Knows) qui conduit à la déchéance, mais plutôt l'amour. C'est cette amour que Shuhei ressent pour sa mère qui a été destructeur pour lui. Et c'est là que le film gagne vraiment en intensité, car c'est ce sentiment purement bon et sincère (selon Shuhei) qui est la cause de tous ses maux.

Quinlan-V
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le 15 déc. 2020

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Quinlan-V

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