-Pourquoi un violoniste?
-Vous m'aviez dit de choisir n'importe qui.
-Oui, mais pourquoi un violoniste?
-Parce qu'il avait une chaussure noire.



Dans les années 70 le réalisateur Yves Robert un as de la comédie française, la vraie, présente avec son comédien phare Pierre Richard, Le Grand Blond avec une chaussure noire, une comédie d’espionnage délurée incarnée par des comédiens extraordinaires. Je tiens tout d'abord à souligner la qualité du titre du film qui interpelle facilement et pose beaucoup de questions. Le scénario bien que simple est habile, réussissant à ancrer le récit dans une époque ou la paranoïa d'infiltration des services de renseignements étrangers est réelle, tout en nuançant le tout par de l'improbable burlesque. Un mélange à l'époque osé et efficace où le cinéaste attaque avec le sourire les vices et les ridicules de son temps dans une satire comique des mœurs du contre-espionnage.


Une parodie d’espionnage, pleine d'attrait et de séduction, cependant non dénuée de légers défauts. Avec une réalisation un peu trop simple, ainsi qu'un problème du rythme avec un début assez long, l'oeuvre ne réussit pas le sans-faute, mais ne gâche pas pour autant le spectacle.


L'intrigue commence sur une simple méprise causée par une chaussure noire à cause d'une mauvaise blague, qui va engendrer une succession de péripéties aussi improbables qu'hilarantes, avec des séquences pour le moins savoureuses. Le cinéaste rend le comportement habituel d'un homme (Pierre Richard) plus ou moins lambda (quoique pas mal farfelu), suspect auprès de Milan (Bernard Blier), un agent persuadé par le fameux piège à cons, que le gaillard en question serait un agent secret. C'est ainsi que les agissements bizarres et incrédules de Pierre Richard vont paraître tout du long suspects plongeant ainsi Milan dans une parano poilante des plus intenses, orchestrée par le responsable des agents secrets Louis Toulouse par le grand Jean Rochefort.


Les prestations des acteurs sont un réel plaisir. Chacun amène de son propre folklorique. Pierre Richard, Jean Rochefort, Mireille Darc, Colette Castel, Bernard Blier, Jean Carmet ou encore Paul Le Person, une belle équipe drôle à souhait.
Ce joli cocktail efficacement dirigé par Yves Robert amène des séquences aussi cultes que burlesques comme avec :
" -la partie de jambes en l'air entre Pierre Richard et la frivole Colette Castel avec le fameux hennissement du cheval,
-le rendez-vous entre Pierre Richard et la magnifique Mireille Darc avec sa fameuse robe laissant entrevoir la courbe de son dos ainsi que la raie de ses fesses, qui plus tard amènera la belle à se coincer les cheveux dans la braguette du pauvre François Perrin.
-la descente en vélo chaotique de Pierre Richard et Jean Carmet,
-l'orchestre qui en pleine représentation part totalement en couille avec des grimaces magnifiques des comédiens,
-les multiples confrontations finales entre les différents agents dans le logement de Pierre Richard laissant un Jean Carmet délirant, car étant le seul à voir tous les cadavres... "


Pierre Richard sous les traits du fameux et iconique François Perrin fait des merveilles. Son personnage d'homme au grand coeur, naïf, un peu idiot, et toujours au mauvais endroit au mauvais moment ne le quittera finalement jamais, que ce soit au côté de Gérard Depardieu ou encore celui d'Yves Robert. L'expression de son visage simplet et grimaçant est parfaite, alliée à un ensemble de gestes expressifs et de jeux de physionomie qui accompagnent ou remplacent efficacement son langage oral. Le comédien est superbe, il marque les esprits, y va de son improvisation comme avec la scène du violon strident devant Mireille Darc. Il parvient à imposer sa personnalité dans le monde cinématographique de la comédie. Sa confrontation face à deux hommes (Jean Rochefort et Bernard Blier) au pouvoir dangereux dont il n'a même pas conscience, oscille intelligemment entre réalisme et irréalisme.


S'il fallait choisir une qualité sortant particulièrement du lot avec ce long-métrage, ce serait son excellente musique reconnaissable entre mille, composée par Vladimir Cosma. Interprétée avec une flûte de pan en soliste et un cymbalum qui l’accompagne amenant une expérience musicale grandiose qui deviendra un véritable succès signant le départ de la carrière du compositeur. Cette musique confère une ambiance parfaite pour le sujet traité.


CONCLUSION :


Le Grand Blond avec une chaussure noire, est un classique de la comédie française réalisé par Yves Robert. Les dialogues sont percutants, la narration est intelligente, les gags fonctionnent habilement, les comédiens sont à fond, la composition est géniale, et l'écriture fait mouche en se focalisant autour d'un piège à cons auprès d'un personnage aussi étrange qu'oisif.


Une oeuvre irrésistible qui encore aujourd'hui se montre performante.

Créée

le 24 janv. 2020

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