Par ce ridicule point d'interrogation placé à la fin du titre français, les traducteurs ont vraisemblablement voulu se mettre à l'abri des attaques, mais la précaution semble dérisoire car le droit de tuer (de façon affirmative ou interrogative) reste toujours une solution extrême. Le problème c'est que le film tiré du premier roman de John Grisham, plonge dans le passé de jeune avocat de son auteur, et cette transposition du Sud profond des 60's foncièrement raciste, frôle la caricature dans ces années 90, car il est difficile après l'affaire O.J. Simpson, de croire qu'un Noir ne puisse être encore jugé que par des Blancs, sans compter ces remous de Ku Klux Klan qui aujourd'hui a beaucoup moins de crédit qu'il y a 40 ou 50 ans. Le sujet est de toute évidence explosif, et Grisham, spécialiste des affaires judiciaires, se régale à en décrire le mécanisme, mais sous couvert de dénoncer le climat hyper raciste qui règne dans cette région des Etats-Unis, Grisham se fait carrément l'apôtre de l'autodéfense, adoptant le point de vue de l'accusé et de son avocat, en n'hésitant pas à énoncer quelques idées dérangeantes qui vont à l'encontre de la justice. Certes, ce que faisaient subir certains Blancs aux Noirs à cette époque était d'une honte sans nom, mais je crois qu'aujourd'hui, ce n'est plus comme ça. Aussi, ce thriller judiciaire à thèse tourne vite à la caricature sur fond de Ku Klux Klan, avec un traitement trop manichéen, il se perd dans le discours démonstratif et finit par amoindrir l'impact du message humaniste et politiquement correct. Là-dessus, la mise en scène de Schumacher n'évite pas les effets, manipulant sans vergogne le spectateur en jouant sur l'émotion facile et la belle image. En dépit de tous ces défauts, le film reste assez prenant par endroits, avec quelques scènes fortes et poignantes, et le casting est étincelant, avec notamment le bras de fer entre le procureur ambitieux et réactionnaire joué par l'excellent Kevin Spacey, et l'avocaillon idéaliste incarné par Matthew McConaughey qui fait preuve d'une présence très convaincante. Un film qui laisse dubitatif.

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le 3 nov. 2016

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