Détartrage énervé

Formellement parlant, Le Dentiste ne déconne pas avec nous. Au début. Dès son ouverture, où la voix off vient se superposer aux mouvements lascifs des mains de ce cher Docteur Feinstone, on comprend tout de suite que quelque chose déraille chez le bonhomme. Colérique et pisse-froid (Corbin Bernson en fait des tonnes… et ça passe crème), notre bon dentiste pète un câble en voyant Madame mettre quelque chose de peu hygiénique dans sa jolie bouche. Dans la lignée de son monument Society, Brian Yuzna continue à défoncer la bourgeoisie américaine avec hargne et humour. Peuplé de personnages secondaires semblant tout droit sortir de Melrose Place, il place son protagoniste autoproclamé (c'est lui même qui nous le dit) comme témoin de la laideur intérieur de ses compatriotes. Et notre Alan semble l'imaginer en plongeant ses doigts dans la bouche d'autrui.
C'est ici que le récit perd son ambition très body horror pour s'embourber dans un shocker peu percutant. En focalisant la quasi totalité du reste du métrage dans le cabinet (très kitsch), Yuzna semble peu inspiré à rendre soit déstabilisant (la tentative de viol), ou rigolo (le règlement de compte de l'agent du fisc) les pétages de câble de son anti héros. Finalement assez télévisuel, et donc mou, la mise en scène ne rend jamais honneur aux jolis effets gores du film, noyés dans des champs/contres champs du sévices et des gros yeux du docteur en tentative d'occularisation des "patients".
Devenant dès lors un sous-Maniac (le final est ici dupliqué) à la sauce The Stepfather, Le Dentiste reste amusant et se suit sans déplaisir mais n'exploite jamais son idée de base avec sérieux. Ce qui ne l'aurait jamais empêché de partir en vrille dans du grand guignol qui tache, chose en laquelle Yuzna avait pour habitude de nous gratifier dans ses précédents efforts.