Le Château de Cagliostro
7.2
Le Château de Cagliostro

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (1979)

Le Château précurseur et révélateur du culte d'Hayao Miyazaki!



  • Ah ah! je n'ai jamais vu autant de pognon de toute ma vie! Nous sommes milliardaires! Ah ah!

  • Hey! Fait attention je ne vois plus rien.

  • À nous la belle vie, les palaces, les vies de pépé!

  • Ah ah ah! ...hein... J'aurais dû m'en douter, c'était trop beau pour être vrai.

  • Un problème patron?

  • Balance le fric.

  • Quoi!?

  • Tu m'as entendu, vire le fric. Ses billets sont des faux.

  • Vous voulez dire que... C'est impossible ça. Ce casino appartient au gouvernement et c'est lui qu'il le dirige.

  • C'est du bon boulot.

  • Je pense bien, puisqu'il arrive à rouler le gouvernement.

  • C'est le meilleur travail de contre façon que je n'ai jamais vue. Il faut trouver qui fabrique ses biftons. Ensuite on se débrouille pour contrôler le réseau. Ah ah! Tu as pigé Jigen!? On va repasser à la caisse!

  • Ouai ! Ah ah!

  • Enfin un défi à la hauteur de mon talent! Ah ah!

  • Et on ne prendra quand même pas trop de risques patron, si ça vous dérange pas. Ah ah!



Le Château de Cagliostro est la première réalisation du grand maître de l'animation Hayao Miyazaki à qui l'on doit des oeuvres phares telles que Princesse Monoke, Le Voyage de Chihiro, Porco Rosso, Le Chateau dans le ciel... Pour son premier film Miyazaki adapte les aventures populaires de Lupin III, une série animée et manga conçu par l'artiste Monkey Punch qui c'est lui-même directement inspiré du romancier français Maurice Leblanc avec Arsène Lupin le gentleman cambrioleur. Le résultat est sans appel, clairement le meilleur film sur le personnage de Lupin, mais aussi le meilleur de la filmographie d'Hayao Miyazaki. Une œuvre occupant une place incontournable et prépondérante dans la sphère de la Jap animation dont il serait fâcheux de louper.


Le scénario est écrit par Hayao Miyazaki et Haruya Yamazaki scénariste de : " Cobra, Rémi sans famille, Albator le corsaire de l'espace..." De leur union est née un récit soigné mettant en avant une aventure grandiose aboutissant à l’un des films d'animation les plus distrayants et amusants jamais réalisés. Sa construction a même l'intelligence de mettre le spectateur à l'aise puisqu'il n'a pas l'obligation de connaître la série animée Lupin III ni son manga pour pouvoir comprendre et apprécier le long métrage. Le récit est une mine à trésor en matière de références culturelles et littéraires, oscillants constamment entre la littérature d'Alexandre Dumas et de Maurice Leblanc, la fresque Romaine Mithologique, le film de gangsters Italien, un contraste d'infiltration Bondien, une texture samouraï Japonais et le tout agrémenté d'un bel esprit français année 60 bel oiseau, galant et canaille à la Jean-Paul Belmondo que j'apprécie beaucoup.


L'histoire se passe dans un très beau contraste. "Le château de Cagliostro" se révélant être la pièce majeure et essentielle du film lui conférant son atmosphère si particulière. Principauté européenne Cagliostro, plus petit pays du monde, état très Campagnac (commune française dans l'Aveyron) d'une population d'à peine 3 500 personnes, qui s'avère idéale comme lieu de théâtre pour une aventure pleine de mystère, où Lupin et sa bande entreprennent après un vol dans un casino de découvrir le mystère autour de la fausse monnaie qu'ils ont dérobée. Une aventure qui mènera Wolf à rencontrer la jeune Clarisse.



Hayao Miyazaki : Je crois que les âmes des enfants sont les héritières d'une mémoire historique universelle venue des générations précédentes.



L'architecture du château est sublime et sacrée, avec un rendu sur le détail extra-ordinaire avec ses hautes tours ainsi que ses nombreux pièges et autres salles secrètes qui le parsème, se révélant être un hommage dans sa composante au film d'animation La Bergère et le Ramoneur(1953) de Paul Grimault qui conduira au fameux Le Roi et l'oiseau(1980). Esthétiquement, le long métrage est absolument magnifique et stupéfiant, dans le parfait style si personnel de Miyazaki où la nature, les habitations en pierres, la populace du village, les vieux chemins de campagne, le design des vêtements ainsi que les avions sont forces de propositions. Malgré l'âge, les images ont bien vieilli et sont toujours aussi belles. Parsemé d'un visuel à couper le souffle, particulièrement bien illustré qui saisit par l'intégration d'un superbe arrière-plan continuel peint à la main subtilement coloré. Les différents contrastes sont agrémentés par des jeux d'ombres qui ressortent les environnements par des longs plans vifs appuyés par un champ vertical, qui en font un trait remarquable, avec des vues panoramiques grandioses. L'animation technique employée est fluide utilisée de manière maligne et intelligente rendant le tout incroyablement fonctionnel.


L'image fournie n'est jamais servie dans la facilité servant des fonds d'écran, où le paysage est constamment extrêmement détaillé, avec des variétés en tous genres dont il faudrait des centaines de visionnages pour en saisir toutes les nuances et autres subtilités. Que ce soit des plans paisibles sur des vastes étendues de prairies bousculées par une frêle brise de vent, des étendues d'eau ondulant au gré du courant; des jardins colorés imbriqués de vieille dalle de pierre, des intenses coucher de soleils avec son ciel pourpre contrastant superbement les divers battissent leur conférant un degré macabre et gothique, tout est magnifié de sorte à admirer le travail effectué. Une oeuvre d'art à part entière sous forme de tableau. Le genre d'attention du détail si dense et intense qui confère à Miyazaki le statut de géni absolu, capable sur une simple image de projeter son univers paradisiaque, où il y fait bon y vire et duquel on ne voudrait jamais quitter.


Les scènes d’action sont funs, attrayantes et pleines d'énergies véhiculant sans mal le panache et le dynamisme suffisant pour nous entraîner dans son tempo. Un rythme stimulant qui amuse durant certaines séquences, notamment durant la poursuite délirante en voiture avec la Fiat 500 jaune dropée de Lupin, qui livre un rodéo endiablé défiant toutes prouesses techniques et physiques. On peut y ajouter l'intense affrontement dans la tour de l'horloge avec sa machinerie infernale, ou encore l'impressionnant et burlesque jeu d'équilibriste de Lupin sur les toits du château pour accéder à la tour servant de cellule à la princesse Clarisse. Un savant mélange d'actions dans une ambiance toujours mystérieuse, amenant également des scènes dramatiques efficaces essentiellement entre le voleur gentleman et la princesse, offrant un final émouvant plein de douceur et de maturité.



Hayao Miyazaki : Je crois que les âmes des enfants sont les héritières d'une mémoire historique universelle venue des générations précédentes.



Les personnages sont dans l'ensemble bien écrit et fonctionnel, même si on peut avoir un léger regret du côté du samouraï Goémon trop peu utilisé. Les relations entre les personnages sont finement élaborés chacun possédant une personnalité bien distincte. J'aime et préfère la version d'Edgar Lupin de Miyazaki qui est un peu différente de celle du manga et de la série animé où il est beaucoup plus impur, sexiste et salace, le rendant moins sympathique. Pour ce film, il est beaucoup plus gentleman, estimable, généreux et mûr. Il a des allures de voleurs au grand coeur que je préfère largement, mais qui ne colle pas forcément à la création de Monckey Punch ce qui pourrait peut-être frustrer les fans de l'oeuvre, ce que je peux parfaitement comprendre.
Il est également affublé d'une panoplie de gadgets inédits vraiment cool, et d'une faculté de déguisement toujours aussi surprenante. Il peut toujours compter sur ses trois complices : " Goémon, Jigen et Fujiko (Magalie) toujours aussi impétueuse."


L'inspecteur Zenigata (Lacogne) me fait hurler de rire tant il est toujours aussi empoté à poursuivre indéniablement et sans relâche Lupin tel Bip-bip et le Coyote. Il est énormément utile à l'intrigue bien plus que Jigen et Goémon, et résolve des problèmes comme avec la séquence qui me tord à chaque fois de rire quand il divulgue à la télé les sous-sols du château abritant la fabrique à billet. J'aime car dans ce long métrage on voit la relation fraternelle qui unit Zenigata et Lupin ce qui s'apparenterait donc plus à une relation à la Tom et Jerry.


Parmi les nouvelles têtes on retrouve l'antagoniste principal le Comte Cagliostro, un homme énigmatique et cruel possédant de nombreuse richesses et contrôlant Cagliostro obsédé par la prophétie des anneaux de la lumière et des ténèbres du symbole du Capricorne. C'est un personnage froid et charismatique qui ne voit en Clarisse qu'un moyen de parvenir à ses fins en l'épousant. En cela il ramène (une fois de plus) au film d'animation Le Roi et l'oiseau où il semble clairement inspiré du Roi Charles de Takicardie avec son mariage forcé avec une jeune fille. J'aime bien le Comte car il fait un parfait adversaire à Lupin, d'ailleurs, la morale finale autour du sort réservé à cet illustre et obscur protagoniste est des plus ingénieuse.



Hayao Miyazaki : Ce que j’ai appris, et qui est au fond le plus important, c’est qu’il faut toujours montrer aux enfants que c’est une très bonne chose qu’ils fassent partie de ce monde, qu’ils soient parmi nous.



Vient enfin la Princesse Clarisse dernière héritière de Cagliostro qui incarne un personnage physiquement fragile mais mentalement fort et indépendant, ayant un passif avec Lupin. La relation qu'elle entretient avec ce dernier est respectueuse et pleine d'émotion, n'hésitant pas à se sacrifier pour lui. À ma grande surprise Lupin ne la traite pas comme un objet sexuel ce qui rend leur duo intéressant, elle réussit même à changer Lupin qui finalement se refuse à elle ne voulant pas l'entraîner dans son existence périlleuse dans une séquence tout bonnement magique :


- Est-ce que je vous reverrais un jour?
- Avec un peu de chance jamais. Sincèrement Princesse je ne suis pas le genre d'ami qu'il vous faut.
- Je veux partir avec vous! Ne plus vous revoir m'est une idée insupportable! Je vous aime! Je n'y peux rien.(Elle se jette dans ses bras) Je ferais n'importe quoi pour rester avec vous! J'apprendrais même à voler! À mentir!
- Ne pleurez pas Clarisse.
- Je n'étais qu'une enfant quand on s'est rencontré, mais au premier regard je vous ai aimé. C'est vous mon chevalier, mon prince charmant, l'homme dont j'ai toujours rêvé.
- Vous n'allez pas fréquenter un voleur au moment même où commence pour vous une vie merveilleuse. Croyez-moi votre avenir s'annonce merveilleusement beau. (Il la repousse avec hésitation et difficulté) Et de toute façon aujourd'hui on se dit au revoir mais pas adieu. Dès que vous avez besoin de moi vous appelez et je vole vers vous. Je vous aimerai toujours comme un grand frère Clarisse. Bientôt vous rencontrerez le grand amour et vous serez contente de l'avoir attendu...(Il l'embrasse sur le front)


De ce fait on se prend d'admiration pour Clarisse faisant preuve d'un surprenant courage pour qui la liberté est un véritable trésor.


La musique est signée Yuji Ohno et on peut dire qu'il y a un excellent travail de composition avec de surcroît une chanson envoûtante et mélancolique "Fire Treasure" interprétée par Toshie Kihara à la sonorité profonde que l'on peut entendre juste après la scène d'ouverture. S'ensuivra une compilation de titres différents en musique de fond illustrant parfaitement la tonalité des séquences avec des airs funky et jazzy vraiment cool et d'autres plus graves. Seul un génie peut fusionner un morceau à la mélodie si profonde avec du jazz enivrant. Une belle expérience poussant l'ingéniosité jusqu'aux bruits de fond, qui sont tout aussi intenses, surtout dans les traductions de paix où le bruit du vent qui s'infiltre, celle de la nature et des oiseaux, offrent un aspect réellement décontractant.



Hayao Miyazaki : Je dois porter sur le monde un regard sans haine.



Le doublage Vf ! Composé de trois versions, celle de 1983 (que je n'ai pas vue) intitulé "Vidocq contre Cagliostro", de 1996 et enfin de 2005. La version de 2005 (celle sortie sur grand écran en France) est connu pour avoir redonné le véritable prénom à Edgar, mais aussi pour employer les prénoms français de la série animée. Personnellement je ne suis pas du tout fan de cette dernière traduction qui certes confère les prénoms de la série Vf mais livre des narrations beaucoup moins percutantes. Je suis principalement attaché à la version de 1996 où certes Edgar à troquer son prénom par Wolf (surnom que je trouve classe), mais au moins les autres personnages ont retrouvé leurs prénoms originaux, car Inspecteur Lacogne à la place de Zenigata ça fait vraiment mal aux oreilles. De plus, les paroles et autres répliques sont beaucoup plus travaillées et personnelles dans cette version, où il est par exemple judicieusement dit par le jardinier que l'inspecteur Zenigata(Lacogne) est réellement attaché à Edgar Lupin(Wolf) :


Zenigata : - Oh le saligaud, il m'a encore échappé, mais la prochaine fois c'est sur je le coince.
Clarisse : - Il devrait plutôt être récompensé de ce qu'il a fait, sans lui le Comte aurait réussi à m'épouser.
Zenigata: - Peut-être, mais il est venue voler une chose et il est repartis avec. Et à votre avis c'est quoi cette chose ? Ce que vous avez de plus précieux, votre coeur.
Clarisse : - Oh oui.
Zenigata: - Alors je dois l'arrêté. Hum... En avant l'ennemie est en vue ! Rattrapons-le !
Le Jardinier: - Zenigata semble avoir beaucoup d'affection pour Wolf.


Séquence parfaite qui donne tellement de sens à leurs relations, dont malheureusement on ne peut pas profiter dans les autres doublages, où ils disent une chose qui n'a rien à voir. Pareil pour la voix de Clarisse qui est bien moins banale et mieux accentuée. Je trouve que ce doublage de 1996 améliore l'expérience, par ailleurs si cette version diffère c'est pour des raisons de problèmes de droits d’auteur, et pour le coup j'ai envie de dire tant mieux car c'est vraiment la meilleure à mon sens.



CONCLUSION:



Le Château de Cagliostro, première oeuvre du grand Hayao Miyazaki est le précurseur de ce qui sera une filmographie divinement culte et mythique dans l'univers cinématographique. Une expérience audiovisuelle qu'il obligatoire de voir, au moins une fois dans sa vie tant le travail accompli autour de l'animation, le dessin, le coloris, les OST et le rythme sont indéniablement géniaux. Vu tant de fois et en adoration à chaque fois, à un point où je n'ai pas pu résister à sa nouvelle sortie au cinéma français, malgré la centaine de fois où j'ai dû le voir. Ce film que je chérirai jusqu'au bout marque l'ère de l'animation dont je suis le plus fan, et je tiens à souligner à quel point cette oeuvre mérite d'être en haut du podium des films d'animation.



Chef d'oeuvre ultime de l'animation!


B_Jérémy
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Top 100 de mes meilleurs films tous genres confondus.

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le 4 mars 2019

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