Chat peau de pêche et bottes de cuir

Remettons les choses dans leur contexte : après un opus globalement salué (Shrek 1), les attentes et le budget sont au rendez vous pour Dreamworks qui ayant déjà bien caricaturé l'univers en prenant un anti-héros et détournant l'image de bon nombre d'habitants des contes de fée, se décide à continuer dans cette veine mais en utilisant des célébrités dudit monde et qui dit célébrité dit aussi Hollywood : cocktail rafraichissant, barge et au rythme déjà mieux pensé que dans le premier, ça allait de tous les cotés entre le mac do, marraine la bonne fée, le roi grenouille, prince charmant, les bébés âne-dragon, j'en passe et des meilleurs : un plaisir !

Or pour pallier le coté jesuisunogre/jesuisunâne/jesuisuneprincessetropbellemaisenfaitnonpuisquejesuisdésormaisuneogresse de nos héros en manque de sex appeal, ils introduisent donc le chat potté (Puss in boots) dont le nom anglais sonne mieux et dont le regard a su séduire les gardes et le spectateur, son accent espagnol et son coté vaillant en faisant d'office un personnage charismatique. Il est vêtu de cuir (bottes, ceinturon, chapeau), boit du lait mais n'est pas fétichiste, se bat au fleuret mais sait sortir ses griffes : une légende est née.

Donc suite à cette réussite pas totalement prévue, Dreamworks croit tenir là une aubaine et sort un film sur le miaou heu minou et on ne peut que malheureusement dire que ça nous hérisse le poil. On veut en faire une aventure indépendante du monde de Shrek pour toucher potentiellement un public plus large, on invente donc dans la précipitation des personnages et un scénario a faire frémir tout VRAI scénariste/conteur/comédien/écrivain/spectateur/poisson rouge !

Donc si je torture mon pauvre crâne pour m'obliger à me repasser ces séquences dans ma tête ça donne en gros :
- Le héros a l'air d'être un pauvre niais un peu simplet qui voudrait avoir la classe mais souffre en fait d'une blessure psychologique secrète qui vient de son dur passé dans un orphelinat ou il a déçu quelqu'un de cher à son coeur.
...
Oui je sais que Dreamworks vient de battre un record d'allumage de l'alerte kitsch, ils sont très bons.
- Son meilleur ami est un oeuf
...
Oui vous avez le droit de cogner votre tête contre un mur pendant une trentaine de secondes, je vais me chercher un doliprane.
- Son meilleur ami, disais-je, est un oeuf infoutu de se débrouiller tout seul, qui l'exploite, trompe son monde, organise des cambriolages, fantasme sur des haricots magiques pour réussir à voler une poule aux oeufs d'or (son but ultime dans la vie, cool, non ?). Heureusement SPOILER ALERT SPOILER celui-ci dit qu'il a envie de se réconcilier avec Potté qu'il avait déjà bien trahi et manipulé, ce qui lui permet en fait ... d'encore plus se venger contre Potté qui a eu le culot, après s'être fait bien manipuler, de lui en vouloir et l'a abandonné. On atteint donc des sommets dans les arcanes du vu et revu mais de manière encore plus laide et grossière que d'habitude mais qu'on sublime ENCORE PLUS en s'offrant une séquence des plus gerbantes de "oh mon Dieu pardonne moi ! Mais qu'ai-je fait ? Seule ma mort peut encore nous sauver, aurevoir John, dit à Laetitia que ses cheveux sentent la violette ! *Il saute dans le vide* NOOOOOON JOHN tu n'étais pas obligé de faire ça ! *larmes*". FIN DU SPOILER
-Ils seront accompagnés d'une fausse fausse gentille puisque fausse gentille mais qui finit par en pincer pour le héros et donc en fait n'est plus méchante. Oui c'est mal amené et c'est ridicule dans le film aussi. Sinon on lui invente aussi un complexe, un coté mignon et débrouillard histoire de pouvoir la faire jouer sur un double tableau, en faisant un faire valoir autant qu'un pseudo deus ex machina. Ah et puis elle aime bien déshabiller le héros.

Heureusement en dépit de ces erreurs, le film se sauve de la noyade la plus totale (par-ce-que chat échaudé craint l'eau froide, qu'un chat retombe toujours sur ses pattes) par quelques scènes assez amusantes, des références très bien pensées, une ou deux blagues bien casées et quelques personnages si ce n'est sympathique, tout du moins originaux. Dommage que le scénario, la cohérence et les personnages (dans leur construction) ne soient pas au rendez-vous ...

Je conclurais donc en citant un chat de l'animation plus vieux que moi "Tout le monde veut devenir un cat parce qu'un chat, quand il est cat retombe sur ses pattes ! C'est vrai !" sauf que comme nous l'apprend ce film, n'est pas quitte à être cat qui veut ...