Lors de la fin de la Première Guerre Mondiale, les allemands et Robert Wiene restèrent sans voix, tant ce dernier réalisa un film muet qui sera considéré comme le précurseur du cinéma expressionniste, avec Le Cabinet du Docteur Galigari. Une oeuvre reflétant une vision pessimiste déformée de la réalité pour une grande intensité expressive. Un film hanté par une guerre, visant une nouvelle psychanalyse et une recherche symbolique.

Le film prend place dans une fête foraine, véritable lieu sordide propice aux légendes d'épouvantes, où le jeune Francis, après avoir présenté sa femme aux allures de zombie demeuré, décide de raconter son drame à un vieil homme.

C'est dans une ambiance glauque et avec une musique qui l'est tout autant, que nous allons découvrir cet univers agressif et anguleux. L'histoire débute avec la découverte ridicule de l'escroquerie foraine de Caligari, qui se revendique capable de réveiller un mort : César. Cadavre connaissant l'histoire, et l'avenir, rien que ça. Et quand, César prédit le décès du pote de Francis à l'aube, c'est le paranoïa générale. Psychose décuplée lorsque la prédiction s'avère vraie.

C'est avec un décor somptueux, support principal de la narration que nous allons suivre cette histoire surprenante. C'est le véritable point fort du film où l'expressionnisme s'impose partout, avec ces courbes exacerbées et ces jeux de couleurs doux et violents à la fois, où le pellicule est tantôt teintée de bleu ou de rose par exemple. Mais plus qu'une histoire prenante et presque malsaine, plus qu'une démonstration esthétique à l'audace visuelle rare, Le Cabinet de Docteur Galigari impose une réflexion non moins intéressante.

L'oeuvre de Wiene, au départ destinée à Fritz Lang, traduit une situation humaine et sociale, où le peuple allemand est renvoyé à ses craintes et ses fantasmes. En effet, à travers ce charlatan criminel qui exerce une hypnose au pseudo-défunt, on y voit la personne qui hypnotise tout un peuple. Il exerce une impression d'horreur et de fascination au public à travers son spectacle, et cette même foule se laisse endoctriner par la supercherie pourtant douteuse. On peut y voir cette période d'insatisfaction du peuple allemand de l'époque, qui subit une forte dépression, mais également une mise en abyme du potentiel dictateur.

Les crimes commis, fabuleusement mis en scène par supposition et jeux d'ombres sont d'autant plus forts, lorsqu'on connait la montée du nazisme quelques années plus tard. Le côté pseudo-horreur est réussi grâce aux nombreux artifices comme les effets spéciaux, les décors oppressants et la musique stridente. Mais cependant, malgré des cartons fantaisistes cool, le côté muet ne me dit pas grand chose, et fait perdre une certaine efficacité au scénario en particulier avec les longueurs sur la fuite de Caligari vers l'asile.

Avec cette illusion qui nous aura bien berné pour la majorité d'entre-nous, on découvre une certaine vérité intéressante de l'époque qui pose réflexion. Le malaise social est très bien retranscrit, mais il se ressent également, car quand même, une heure quinze de muet, faut suivre. Puis le Docteur Caligarigole pas beaucoup.
Alex-La-Biche
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le 12 janv. 2015

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Alex La Biche

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